La Russie cherche son identité

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Qu'est-ce que l'Etat, la société et la nation russes représentent dans le monde d'aujourd'hui ? Pourquoi la Russie postcommuniste devrait rechercher son idée nationale, alors qu’elle pourrait simplement rejoindre la civilisation occidentale?

Qu'est-ce que l'Etat, la société et la nation russes représentent dans le monde d'aujourd'hui ? Pourquoi la Russie postcommuniste devrait rechercher son idée nationale, alors qu’elle pourrait simplement rejoindre la civilisation occidentale?

Les intellectuels occidentaux ne comprennent pas cette quête de la Russie. Ils pensent qu’elle devrait se transformer en pays démocratique, avec des libertés civiles et un système juridique efficace, et qu’alors tout irait bien. D'ailleurs, les représentants de l'opposition libérale russe qui ont participé aux récentes discussions du Club Valdaï ont tenu les mêmes propos : selon eux la société russe est déjà si imprégnée par l’idée de consommation et la soif de réussite personnelle que le slogan traditionnel "pour l'empereur, pour la patrie et pour la foi", que l'élite conservatrice cherche encore à utiliser, s'est transformé en pièce de musée.

Le président russe Vladimir Poutine a dénoncé cette approche qu’il juge simpliste lors de son intervention à la dernière réunion du Club Valdaï. Après avoir reconnu que le gouvernement devait entretenir un dialogue plus attentif avec la nouvelle génération russe, il s'est prononcé en faveur de la préservation des valeurs traditionnelles dans la société et pour une distanciation entre la vie russe et l'Occident postmoderniste.

Poutine voudrait deviner la tendance politique de son propre peuple et y voir une aspiration à l’identité européenne, mais différente des valeurs occidentales actuelles. Après le cataclysme des années 1990, cette distanciation apporterait un sentiment de dignité à la population. La plupart des Russes soutiennent la "révolution conservatrice" comme moyen pour se distancer de l'Occident sans quitter l'Europe. Mais cette idée a une lacune : elle n’est pour l’instant fondée que sur une opposition à "l'extrémisme libéral" de l'Occident.

Le débat sur l'identité russe a porté sur des thèmes larges comme le multiculturalisme et la diversité du pays - ses régions donatrices riches et ses régions assistées pauvres, sa société laïque et l'islamisation du Caucase du Nord… Troisième ligne de partage : les citadins qui pensent "à l'européenne" et la population rurale conservatrice. Ou encore : la capitale, Moscou, contre tout le reste du pays. Un jeune penseur russe a conclu qu’en Russie, une partie de la population vivait au XXIe siècle et l'autre au XVIe.

Quelle sera la situation en Russie dans un futur proche ? A ce sujet le Forum de Valdaï n'a pas omis d’évoquer le phénomène de la classe moyenne. Jusqu'à récemment, elle n’existait qu’en Occident. Aujourd'hui elle est omniprésente en Russie. Elle se bat pour une participation plus active à la politique et pour la création d'une société civile où le rôle de l'Etat serait réduit. L’un des participants a comparé la "révolution" actuelle de la classe moyenne aux tentatives de révolution ouvrière mondiale du début du siècle dernier. Les intervenants du Forum ont finalement conclu que la révolution de la classe moyenne était un mythe. Il n’existe pas selon eux de potentiel révolutionnaire en Russie, comme on a pu le penser pendant les manifestations de 2011. Et à observer la carte géopolitique du Moyen-Orient, on voit qu’après les protestations civiles seules les positions islamistes se renforcent.

On assiste aujourd’hui à la renaissance de la géopolitique, au rétablissement de frontières civilisationnelles oubliées. L'Europe ne reconnaît pas l'Union eurasiatique et refuse de coopérer avec elle. La Russie, de son côté, est prête à châtier l'Ukraine par une nouvelle guerre commerciale si Kiev rejoignait l'Union européenne. Certains pays occidentaux ne font pas confiance à la diplomatie russe en Syrie, bien qu'elle ait empêché une nouvelle guerre au Moyen-Orient. Ces conflits reprennent un caractère idéologique en Europe : l'Occident croit défendre la liberté et les droits de l'homme ; la Russie protège les principes du droit international.

Les participants au Forum de Valdaï ont beaucoup débattu sur l'image du pays. Dans quelle mesure détermine-t-elle le statut d'un Etat dans la politique mondiale ? Les experts occidentaux ont cité l'exemple des USA et de l'Allemagne, deux pays bénéficiant des meilleurs indices en matière d'image. La Russie, elle, n'a pas encore trouvé comment s'attirer la sympathie du monde qui l'entoure, notamment parce qu'elle ne traite pas professionnellement son image extérieure. La Russie doit construire une image attrayante d’elle-même. Son succès dépend notamment de l'affaiblissement économique et moral de l'Occident. Et inversement : si la Russie n'arrivait pas à créer une "identité" en assurant sa modernisation économique et un milieu social sain, le pendule basculerait à nouveau du côté occidental.

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