Le juge chargé de l'enquête sur les circonstances de la mort de l'ex-agent du FSB Alexandre Litvinenko a ordonné d'extraire du dossier, à la demande des autorités britanniques, une information importante sur l'implication éventuelle des renseignements russes dans le crime.
Par ailleurs, la majeure partie des audiences se dérouleront désormais à huis clos. Ceux qui critiquent cette décision estiment que le cabinet de sa Majesté a décidé de sacrifier la justice au profit de l'amélioration des relations entre Londres et Moscou, écrit lundi le quotidien Novye Izvestia.
L'enquête officielle tant attendue sur les circonstances de la mort de l'ex-agent du FSB Alexandre Litvinenko devrait débuter le 2 octobre 2013. Cependant, à plus de 4 mois du procès, le coroner – juge spécial qui enquête sur les morts subites - doute qu'il réussira à prononcer un verdict juste et impartial. Le juge principal de la Cour royale de Londres, Robert Owen, chargé de cette affaire, a déclaré que sous la pression du Foreign Office il était contraint de retirer du dossier l'information concernant une éventuelle implication des services de renseignement russes dans la mort de Litvinenko. Il dit regretter cette décision contre laquelle il n’a "rien pu faire".
Le ministre des Affaires étrangères William Hague en avait fait la demande le 7 février. D'après ses arguments, une partie de cette information pourrait nuire considérablement aux relations internationales du Royaume-Uni. Le ministre n'a pas précisé quelles étaient les informations en question. Robert Owen a également pris une décision extrêmement rare : il a l'intention d'organiser plusieurs audiences sans journalistes ni spectateurs. A huis clos, on cherchera à déterminer si les autorités britanniques pouvaient empêcher la mort de l'ex-agent du FSB qui s'était réfugié en Grande Bretagne. "Les résultats de l'enquête seront incomplets et le verdict pourrait être erroné et injuste", a déclare le communiqué officiel d'Owen. Il devrait annoncer la suite de ses actes le 11 juin.
Alexandre Litvinenko est décédé suite à un empoisonnement au polonium-210, injecté dans son thé dans un hôtel de Londres en 2006. Avant son décès, il avait accusé le gouvernement russe d'avoir porté atteinte à sa vie. La mort de Litvinenko a fait chuter au plus bas les relations déjà complexes entre Londres et Moscou. Toutefois, la situation s'était peu à peu normalisée. Selon l'opinion générale, la visite du premier ministre David Cameron à Sotchi en mai visait à améliorer définitivement les relations entre les deux pays.
Le gouvernement britannique a annoncé qu'il examinait de près la décision du coroner. La veuve de Litvinenko, Marina, a été plus catégorique : elle est horrifiée par ce choix de Robert Owen et estime qu’il s’agit d’une tentative d'aider la Russie et le Royaume-Uni à rétablir des relations normales. "Tous ceux qui veulent connaître la vérité seront choqués d'apprendre que les gouvernements des deux pays ont conclu un pacte politique pour cacher la vérité", a-t-elle déclaré à la presse.
L'avocat de la veuve, Ben Emmerson, critique également la décision du coroner Owen. Il est convaincu que Hague et Cameron veulent cacher des informations afin de ne pas détériorer les relations commerciales avec la Russie et que le gouvernement britannique danse la "tarentelle" moscovite. La presse suppose même que le gouvernement britannique a échangé son soutien dans l'affaire Litvinenko contre le soutien russe de la position occidentale en Syrie.
De leur côté, ceux qui ne croient pas à la "trace russe" disent que la justice britannique a simplement renoncé à une accusation que, de toute manière, elle n’aurait pas réussi à prouver.
Ou elle n'a pas voulu se déshonorer en déclarant coupables des personnes qu'elle ne pourra jamais traduire en justice.