La catastrophe financière de 2008 ne s’est pas répétée pour l’instant, notamment parce que le monde actuel n’a rien à voir avec celui de 2008. Quelques mots désagréables échangés récemment entre les habitants des principales puissances économiques, principalement aux Etats-Unis et en Chine, en sont la preuve.
Encore hier soir (heure de Moscou) les marchés américains ont ouvert en hausse et ils ont été suivis par les marchés asiatiques, européens et russes. La crise n’a duré que trois jours : lundi les marchés américains ont réagi à l’abaissement de la note de crédit des Etats-Unis par une baisse de 7%, 7% également pour les bourses asiatiques et pratiquement 8% pour la Russie. Mardi les autorités financières et les analystes de divers pays ont commencé à expliquer que tout irait bien. Mercredi les marchés se sont calmés et les actions ont commencé à être achetées à nouveau.
Il s’agit simplement de l’économie. Et en ce qui concerne les remarques politiques fielleuses, elles sont également intéressantes et montrent une carte du monde changée par rapport à la crise de 2008.
Déni de confiance
On pourrait longtemps débattre pour essayer de déterminer s’il s’agissait d’un roulement de tonnerre avant une nouvelle crise ou du retour de celle de 2008.
Quoi qu’il en soit, la crise actuelle a des particularités évidentes sous la forme des querelles entre l’Asie et la civilisation occidentale. En 2008, on se rappelait également que "toutes les crises mondiales viennent des Etats-Unis", mais le ton dans ce chœur avait été donné par le président français Nicolas Sarkozy. Aujourd’hui, Sarkozy et d’autres dirigeants européens font profil bas et essayent de régler leurs affaires moroses.
Et Pékin, plutôt au niveau idéologique que gouvernemental, a cette fois immédiatement réagi en pinçant les Etats-Unis au moins à deux reprises. En commençant par un litige excessivement dramatique entre l’administration de Barack Obama et ses opposants républicains concernant le défaut de paiement des Etats-Unis. La presse chinoise a dénoncé la politique américaine : quel est ce modèle américain de démocratie capable de provoquer subitement des bouleversements économiques mondiaux et nationaux?
Et lorsqu’ensuite l’agence de notation Standard & Poor’s a abaissé d’un cran la note de crédit de la dette américaine maximale AAA, la Chine s’est réellement mise en colère, car les Etats-Unis sont le principal débiteur de la Chine. Les accusations (selon Global Times) sont les suivantes : l’agence de notation a pointé l'incompétence de la politique américaine et dévalué le
"capital politique" des Etats-Unis. Elle est a aussi montré que l’Europe était incapable de parvenir à régler les problèmes clés. On ignore ce que cela signifie pour la Chine mais il faut en tirer des conclusions.
Début août, le gouvernement chinois a également à maintes reprises déclaré qu’il était temps de cesser d’acheter les dettes américaines et de penser à une alternative, ce qui a immédiatement provoqué les commentaires acerbes de nombreuses personnalités.
Dans les débats entre les républicains et les démocrates résonnait souvent la proposition suivante : pourquoi ne pas déclarer un défaut de paiement s'il agit d’une dette envers la Chine? Le mot clé entendu à Pékin était "irresponsabilité".
Bien sûr, les Etats-Unis y ont répondu. Par exemple, dans le magazine américain Foreign Policy qui suggère l’idée suivante : qui en Chine achète la dette américaine avec le surplus de dollars formé en raison du déséquilibre du commerce au lieu d’allouer ce surplus à la croissance de la demande de consommation en Chine même? Ils sont eux-mêmes responsables.
Dans l’ensemble, la seconde vague encore possible de la crise engendre sous une forme quelque peu différente les litiges qui n’ont pas été réglés pendant la première. En se réduisant en fait à la nécessité d’un nouveau modèle économique mondial post-crise.
Tout allait si bien…
Si la "première vague" de la crise 2008 a des conséquences globales, elles se limitent à une simple formule : la crise a profité à la Chine, l’Inde, l’Asie en général. Qui en 2009 a maintenu une croissance économique de 8,8% tandis que le monde entier a connu une baisse de 2,2%? La Chine. L’Inde a connu une croissance "modeste" de 6%, ce qui n’est pas mal non plus.
Et voilà ce qui s’est finalement produit : au début du siècle on pensait que l’économie chinoise égalera celle des Etats-Unis au milieu du siècle. Mais les estimations actuelles montrent que ce sera le quart dans les dix prochaines années, et pour 2050 elle sera deux fois supérieure à l’économie américaine, tandis que l’Inde rattrapera les Etats-Unis (l’auteur de cette estimation, faite en mars dans le magazine Russia in Global Affairs, est Chas Freeman).
Par ailleurs, l’auteur suit avec intérêt l’évolution des relations entre deux économies complémentaires : le secteur du service de l’Inde et l’industrie de la Chine. Comment elles vont vers un échange commercial de 100 milliards de dollars sans même avoir démarqué la frontière après la guerre de 1962. Autrement dit, dans le contexte de la mondialisation on assiste à la création de deux économies mondiales : l'une, asiatique, "saine" et l'autre, occidentale, "claudicante".
Bien sûr, l’Asie est territoire immense. Mais la récente crise de trois jours montre que les faibles économies asiatiques ont réagi aux événements avec un œil sur les Etats-Unis et l’autre sur la Chine. Toutefois, il y a également le Japon, mais on assiste là à un cas particulier par rapport à 2008. L’économie japonaise a subi le grave préjudice de Fukushima, qui est bien plus terrible que des bourses américaine ou chinoise. Les indices japonais ont également diminué, mais pendant ces trois jours Tepco, qui a pris en charge les rémunérations et d’autres dépenses en raison de la catastrophe nucléaire, a annoncé des pertes financières, et il est désormais impossible de déterminer ce qui a surtout influencé les indices. Quoi qu’il en soit, pour l’instant le Japon n’est provisoirement pas un acteur mondial.
En se souvenant du cours des débats lors des réunions du G-20 financier, dont à juste titre font partie les "vainqueurs de la crise" (l’Inde, la Chine et d’autres Etats), on tentait de s’y entendre sur le fait que le marché national accru de ces pays et leur classe moyenne renforcée
(230 millions en Chine, à peu près autant en Inde) permettraient d’aider les économies en difficulté de l’Europe et des Etats-Unis grâce à la demande intérieure.
Et les pays asiatiques ont aidé. Au cours des dernières années la Chine importe des produits pour un montant de 700 milliards de dollars par an, en créant ainsi, selon ses estimations, 14 millions d’emplois à l’étranger. L’Inde ne peut pas se vanter de tels acquis, mais dans l’ensemble elle aidait de son mieux les pays en difficulté.
En fait, la réaction de l’Inde aux troubles actuels est différente de celle de la Chine. Elle est dans une autre situation. L’Inde n’achète pas la dette américaine et se souvient que 60% de ses exportations de produits informatiques vont vers les Etats-Unis. Ainsi, en Inde on entend principalement les exhortations à "faire le ménage chez soi" en prévision d’une nouvelle vague d’éventuelles catastrophes, et dans l’ensemble des appels à se concentrer. Cependant, on ne ressent aucune joie.
Bien qu’en cherchant, on pourrait trouver ceux qui rejoignent l’avis qu’il existe un problème au sein du système politique aux Etats-Unis et en Europe, si la crainte du verdict des électeurs mène à de nouveaux bouleversements économiques qui affecteront précisément les électeurs. Est-ce que cela signifie qu’au G-20 les asiatiques relanceront l’idée de Sarkozy concernant l’établissement du contrôle des financiers arrogants, mais l’étendront cette fois également aux politiciens?
L’opinion de l’auteur ne coïncide pas forcément avec la position de la rédaction
Crise mondiale: l'Asie a été capable de faire front
12:24 11.08.2011 (Mis à jour: 16:05 05.10.2015)
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La catastrophe financière de 2008 ne s’est pas répétée pour l’instant, notamment parce que le monde actuel n’a rien à voir avec celui de 2008.