L’OCS à l’épreuve de la Mongolie

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L’approbation du Règlement sur le mode d’admission de nouveaux membres au sein de l’OCS (Organisation de Coopération de Shanghai) sera probablement l’événement principal du sommet de cette organisation qui se tiendra les 11-12 juin à Tachkent.

L’approbation du Règlement sur le mode d’admission de nouveaux membres au sein de l’OCS (Organisation de Coopération de Shanghai) sera probablement l’événement principal du sommet de cette organisation qui se tiendra les 11-12 juin à Tachkent.

Trois pays – l’Inde, le Pakistan et l’Iran – sont séduisants pour l’OCS: ils n’appartiennent pas à l’Asie centrale, ou plutôt ils y appartiennent, mais pas tout à fait. Chacun d’entre eux a ses propres problèmes qui, en cas d’admission, compliqueront la vie de l’organisation et rendront flou le cadre de ses compétences. Mais il y a aussi un autre candidat hypothétique à l’OCS, il s’agit de la Mongolie.

La Mongolie constitue un cas intéressant. Son exemple permet de mieux comprendre ce qu’est l’OCS, qui en a besoin et pourquoi, quels sont ses problèmes. Disons tout d’abord que la Mongolie bénéficie d’un statut d’observateur à l’OCS, mais elle ne manifeste aucun désir de changer de statut bien qu’elle participe assez activement aux activités de l’organisation. Son président Tsakhiaguiyn Elberdorj sera présent au sommet de Tachkent.

Des sources proches du secrétariat de l’OCS affirment que, si l’Iran ou le Pakistan peuvent rencontrer des problèmes pour leur admission, en revanche, tout le monde votera vite pour la Mongolie, sans examen approfondi. En quoi consiste alors son problème ?

Commençons par la géopolitique, c’est-à-dire – selon la définition classique – par la façon dont la géographie détermine la politique étrangère d’un pays. La Mongolie est un immense grain de lentille serré entre la Russie et la Chine. A première vue, l’absence de choix en matière de politique étrangère est évidente. Lorsque l’URSS et la Chine étaient au bord d’une guerre dans les années 1970, elle pouvait choisir l’une ou l’autre. Lorsque la Russie et la Chine sont partenaires et amis politiques, il n’y a pas de choix.

Mais la Mongolie n’est pas l’unique exemple montrant comment les pays (et les gens) détestent les situations où tout choix est de fait exclu, et comment ils font habilement tout leur possible, en dépit des circonstances, pour pouvoir tout de même faire un choix. On peut affirmer que l’essence de la politique étrangère de la Mongolie consiste à sortir de cette impasse. En principe, tous les membres de l’OCS se comportent de cette façon, aucun d’entre eux n’accepte d’alliance inconditionnelle et exclusive avec la Russie, avec la Chine ou avec les États-Unis ; mais la Mongolie s’active particulièrement dans ce sens.

Voici quelques extraits de la conception de la sécurité nationale mongole: son « existence est menacée par toute tendance de la part de n’importe quel État à imposer ses intérêts ou sa politique… un contrôle politique, militaire, économique et idéologique ». Dans cet ordre d’idées, le document mentionne ensuite les crises et les conflits qui pourraient entraîner la Mongolie dans une guerre. Certes, toutes les conceptions analogues dans tous les pays en parlent également, mais la Mongolie en parle bien sérieusement.

C’est pour cette raison qu’Oulan-Bator déploie depuis longtemps des grands efforts diplomatiques en vue de se lier d’amitié avec les États-Unis ou le Japon. Dans les documents officiels, ces États sont qualifiés de partenaires, après la Russie, la Chine, la Corée du Nord et la Corée du Sud (précisément dans cet ordre). Il en découle une situation assez curieuse: la participation de soldats mongols à l’opération lancée par George W. Bush en Irak (2003) ou à présent, en Afghanistan.

La Mongolie ne veut probablement pas faire figure de petit dernier à l’OCS si celle-ci ne traite que de politique et de questions de sécurité. Qui plus est, cela montre clairement ce qu’est l’OCS en réalité. On peut bien prétendre que la sphère de responsabilité de l’OCS s’étend à « toute l’Eurasie », en réalité, l’OCS n’a aucun poids à Saint-Pétersbourg ou à Shanghai. Sa sphère réelle de responsabilité embrasse les pays situés entre la Chine et la Russie, c’est-à-dire l’Asie centrale. L’OCS a été créée comme un programme visant à assurer la stabilité de cette région au nom de son futur développement économique. À l’heure actuelle, ce projet vise précisément à régler les problèmes de développement économique, car, dans l’ensemble, la stabilité existe déjà. Quant aux situations similaires à celle du Kirghizstan, c’est plutôt un problème du développement.

La source principale d’instabilité, pour l’Asie centrale et l’Ouest de la Chine, c’est l’Afghanistan. C’est un fait du passé, du présent et pour un avenir lointain.

Que dire de la Mongolie ?

Son économie est similaire à celle de la région de l’OCS. La Mongolie compte moins de 3 millions d’habitants sur un territoire de 1,5 million de kilomètres carrés (le 19ème territoire du monde). C’est un pays pauvre où un habitant sur cinq dispose de moins de 1,25 dollar par jour.

Pour cette raison, la Mongolie profite de son statut d’observateur à l’OCS, pour l’essentiel, en vue d’associer au monde des affaires son système économique qui se forme lentement. Ainsi, les séances du Conseil d’affaires de l’OCS ont récemment eu lieu à Oulan-Bator. Le fait que Dmitri Mezentstev, chef du conseil, soit devenu récemment gouverneur de la région d’Irkoutsk, c’est-à-dire voisin de la Mongolie, contribuera beaucoup à ce processus.

D’ailleurs, il ne faudrait pas oublier que les premiers projets de l’OCS concernent, pour l’instant, les routes et l’enseignement. Les routes conduisant de l’Ouest de la Chine en Ouzbékistan et dans les autres pays de la région contournent la Mongolie. C’est parfaitement compréhensible et logique. Bref, il faut intensifier l’activité économique, c’est alors que la réalisation d’autres projets déjà proposés sera lancée et que d’autres pays manifesteront leur désir d’adhérer à l’OCS.

Si l’OCS réussit à devenir une organisation économique, un club du développement, la Mongolie pourrait y adhérer. Si l’OCS continue à mettre l’accent sur la politique et les questions de sécurité, la Mongolie conservera son statut actuel.

Ce n’est d’ailleurs pas le pire des statuts. A présent, lorsque des règlements et d’autres documents de l’organisation sont enfin élaborés, le tableau qu’elle présente s’est fait plus harmonieux. Les observateurs peuvent participer à presque toutes les activités de l’OCS et, d’une manière générale, ils préparent complètement leur pays à l’adhésion, s’il le souhaite. Il y a encore le statut d’ « interlocuteur » (c’est le cas de la Biélorussie et du Sri Lanka). Ses bénéficiaires se trouvent à quelques pas plus loin de l’adhésion que les observateurs.

D’ailleurs, l’adhésion de l’Inde, de l’Iran et du Pakistan à l’OCS dépendra aussi de leur choix entre l’économie et la politique. La différence entre ces deux notions est importante pour l’OCS. S’il s’agit d’un partenariat économique, tout est clair et c’est positif. Mais s’il s’agit de politique, il faudra préciser laquelle.

Ce texte n’engage que la responsabilité de l’auteur.

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