Le 1er septembre 1939, Hitler commencera son attaque en bombardant le Westerplatte dans la périphérie de Gdansk puis envahira la Pologne.
"Aujourd'hui, ici c'est un musée. De nombreux touristes viennent, les Allemands en particulier, mais on peut y rencontrer aussi des Russes. L'agence RIA Novosti est le premier média russe qui ait vraiment manifesté un si vif intérêt pour cette histoire.
En tout cas, pour autant que je sache, après 1989 s'est entamé une profonde transformation politique et économique de la Pologne et c'est pas pour autant que es journalistes russes s'y sont rendus" a déclaré Andrzej Jarcewski, directeur du musée "Station radio de Gliwice".
Un peu d'histoire
Gliwice est une ville de Silésie située dans le sud de la Pologne (en polonais, Gliwice, en allemand, Gleiwitz, en tchèque, Hlivice). Comptant actuellement quelque 200.000 habitants, c'est selon les normes européennes une ville moyenne.
C'est en 1276 que le nom de Gliwice est mentionné pour la première fois. Avant de devenir polonaise, la ville de Gliwice était tchèque. En 1742, elle a été incorporée à la Prusse. Après la Première Guerre mondiale, trois insurrections et trois plébiscites ont eu lieu en Silésie. Lors du plébiscite du 20 mars 1921, la population devait se prononcer pour son appartenance à la Pologne ou à l'Allemagne. 32.029 électeurs (78,7% des voix) ont souhaité rester au sein de l'Allemagne tandis que 8.558 (21%) ont voté pour leur entrée dans la Pologne. Au total, 97% de la population ont participé au scrutin. Gliwice était la dernière grande ville du IIIe Reich qui n'était qu'à 5km de la frontière d'Etat avec la Pologne. Depuis 1945, après la fin de la Seconde Guerre mondiale, Gliwice, comme toute la Silésie, fait partie de la Pologne.
Une tour en bois insolite
"L'antenne de la station radio de Gliwice est une des constructions en bois les plus intéressantes de Haute Silésie. Non seulement elle est en bois mais c'est également la plus haute au monde avec 111mètres", raconte Andrzej Jarcewski.
Grâce à un entretien technique méticuleux, à des travaux de maintenance prophylactique et aux réparations annuelles, la tour sera fonctionnelle en toute sécurité pour 20 ans encore. "Elle a été construite en bois de mélèze, un bois résistant surtout aux parasites et aux facteurs atmosphériques, sans un seul clou de fer. Les poutres sont jointes par seize mille vis en laiton", poursuit le directeur du musée. L'ensemble des bâtiments de la Station radio a été construit en 1935 par la société allemande Lorenz. De nombreux appareils radio d'avant-guerre fabriqués par les sociétés Siemens, Telefunken, AEG et d'autres fonctionnent toujours dans le bâtiment principal. La tour porte jusqu'à présent quelques dizaines de différentes antennes de transmission qui desservent le Centre du Service de sauvetage de Gliwice, les réseaux de téléphonie mobile ainsi que d'autres systèmes de télécommunications. Grâce aux paiements des usagers, la tour finance elle-même son entretien.
"Grand-mère est morte"
Le 31 août 1939, à 20 heures, des SS armés habillés en civil ont fait irruption dans les locaux de la station radio de Gliwice se faisant passer pour des "insurgés silésiens". L'opération était dirigée par le SS-Sturmbannführer Alfred Naujocks, choisi à cette fin par le SS-Gruppenführer Reinhard Heydrich, chef du service central de la sécurité du Reich, agissant lui-même directement sous les ordres d'Hitler.
L'opération se devait d'être ultrasecrète. Heydrich a transmis par téléphone à Naujocks le message codé suivant: "Grossmutter gestorben" (Grand-mère est morte), signal du déclenchement l'opération.
Les SS déguisés n'ont pu émettre sur les ondes qu'une partie du message (10 secondes seulement) en polonais: "Attention! Ici Gliwice. La station radio est entre les mains des Polonais…" Le reste du message n'a pu être émis du fait qu'un employé de la station passant près du poste principal à l'insu des SS avait appuyé sur le bouton "Débrancher".
"Bouclier humain"
"C'est ici, devant l'entrée du bâtiment de la station radio, qu'a été tué Franciszek Honiok, Polonais de Silésie considéré comme la première victime de la Seconde Guerre mondiale", a fait savoir le directeur actuel de la station radio de Gliwice.
La veille, Honneck avait été arrêté par la Gestapo dans son village natal situé près de Gliwice. Les hitlériens l'ont transféré à la station radio comme "bouclier humain" et l'ont fusillé à 20h10.
Le Silésien devait servir de preuve tangible de la "culpabilitié polonaise". Le coup monté d'assaut d'une station allemande par de faux soldats polonais défiant les allemands sur leurs ondes avait pour but de montrer que l'attaque allemande contre la Pologne ne visait qu'à riposter aux actes de violence commis par les Polonais contre la population allemande. Le lendemain, 1er septembre 1939, Hitler prononçait un discours promulguant le bien fondé du lancement d'actions militaires sous forme de provocations à la frontière.
Durant l'été 1939, les Allemands avaient lancé de nombreuses provocations le long de la frontière entre la Pologne et l'Allemagne. L'opération "Grand-mère est morte" avait pour objectif principal de persuader les gouvernements français et britannique de passer outre les traités garantissant une assistance militaire à la Pologne. "Leur "logique" était simple, puisque les Polonais ont "attaqué" les Allemands, la France et la Grande-Bretagne ne devaient pas agir aux côtés de " l'agresseur polonais",explique M.Jarcewski.
Le SS-Sturmbanführer Alfred Naujocks est entré dans l'histoire comme "l'homme qui a déclenché la Seconde Guerre mondiale". Il est décédé à Hambourg en 1960.
Ce qui est arrivé à Gliwice a été dépeint dans tous les grands journaux du monde, transmis par la radio et les agences télégraphiques. La vérité sur la provocation de Gliwice devra attendre le procès de Nuremberg pour être finalement établie.
Jadis, on y brouillait les émissions de Radio Liberté, à présent, c'est un musée sur l'histoire de la radio. En 2002, les autorités de Gliwice ont racheté le territoire et les biens immobiliers sur une surface de 3 hectares à l'entreprise "Télécommunications polonaises" qui avait utilisé après la guerre l'ensemble de la station radio de Gliwice.
Jusqu'en 1951, la station radio de Gliwice avait transmis des émissions de Radio Katowice, et plus tard, jusqu'en 1956, c'est de là on brouillait les émissions de Radio liberté/Europe libre. Par la suite, des émetteurs et toutes sortes d'équipements de télécommunications ont été produits sur son territoire.
En 2005, la station radio a été mise à la disposition du musée de Gliwice qui y a ouvert sa filiale "Musée de l'histoire de la radio et des arts visuels".
En ce moment, les réparations du bâtiment du musée et de la tour en bois sont entrain d'aboutir. "La station radio ne sera pas seulement le lieu des leçons d'histoire, elle aidera aussi les jeunes qui se passionnent pour les technologies de pointe et les multimédias", poursuit Jarcewski.
La tour en bois est très jolie sous les ténèbres. Illuminée par des dizaines de milliers d'ampoules et de puissants réflecteurs, elle est visible à une distance de plusieurs kilomètres. Les travaux doivent s'achever vers fin août. Un test technique a été effectué spécialement pour RIA Novosti. La station radio de Gliwice se présentera ainsi chaque soir à partir du 31 août 2009.
UNE MESSE POUR LA PAIX
Gliwice est une ville frontalière où les différentes cultures se sont entremêlées au cours des siècles. Des représentants de différentes nations y ont vécu en harmonie.
"Avant la Seconde Guerre mondiale, c'était une ville allemande, mais des Polonais y ont vécu depuis toujours", affirme le maire de la ville Zygmunt Frankiewicz.
En 1945, Gliwice a été la première ville allemande libérée par l'Armée rouge. En 1945-1946, des Polonais de l'Est y ont déménagé et la population allemande en a été évacuée plus à l'Ouest. A ce moment-là, les Polonais déportés du territoire de l'Ukraine occidentale actuelle, pour l'essentiel, de Lvov et de ses environs, constituaient la majeure partie de la population de Gliwice. Ma mère est également née sur le territoire de l'Ukraine", se souvient Frankiewicz.
Pour les citadins, la station radio est un lieu historique, car c'est là qu'a commencé la Seconde Guerre mondiale. "La tour en bois est une oeuvre unique en son genre. C'est pourquoi les autorités ont décidé de racheter la tour et tous les bâtiments attenants. La ville a déjà dépensé près de deux millions d'euros pour les travaux de réaménagement de la station radio. Nous avons l'intention de restaurer ensuite tous les bâtiments voisins, nous voulons demander une aide financière à l'Union européenne et nous espérons recevoir cet argent. Ce sera un site touristique important", explique le maire de Gliwice.
"Le 30 août, des activités y auront lieu à l'occasion du 70e anniversaire du début de la Seconde Guerre mondiale. Le soir, un orchestre symphonique y donnera la "Messe pour la paix" (Missa Pro Pace) du célèbre compositeur polonais et chef d'orchestre Wojciech Kilar. Nous avons invité des hôtes de divers pays et des villes jumelées, entre autres, de Suède, de Grande-Bretagne, de RFA, de Hongrie, de Slovaquie et de France", ajoute M.Frankiewicz.
Le maire de Gliwice a précisé que ces activités tiendraient lieu dans la ville le 30 août et non pas le 31. "Tout aura lieu la veille, et non pas le jour de la provocation. Nous ne voulons pas célébrer l'anniversaire de la provocation. Nous voulons commémorer l'endroit où a commencé la tragédie. A présent, ce sera une messe pour la paix. Il faut aller de l'avant. Il vaut envisager l'avenir au sein de l'Union européenne au lieu de remuer les plaies du passé", a déclaré M.Frankiewicz.
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