La Russie vue par la presse de la CEI et des Pays baltes

S'abonner

 

ESTONIE

Les médias continuent de commenter largement le discours du président Poutine à la Conférence de Munich sur la sécurité. Selon certaines éditions, la nomination en Russie d'un civil à la Défense qui n'est pas lié - sur le plan professionnel - à la sphère militaire est une réponse à la critique dont les propos de M. Poutine font l'objet. "L'Occident se sent offusqué par le discours de Poutine à Munich et celui-ci a décidé de montrer qu'il était un gentil petit chaton (...). La nomination de Serdioukov (à la Défense) ne devrait pas tellement flatter l'armée. Il (Poutine) aurait pu nommer à ce poste et avec le même succès son labrador Koni. Au poste de directeur du Service des Impôts, Serdioukov s'est rendu célèbre pour avoir écrit un manuel dans lequel il a appris aux gens à faire ce pourquoi son administration poursuit au pénal (cf. l'affaire Ioukos). Quelle sera la réaction de l'armée russe? Elle sera nulle. Même si on la soumet à des bombardements" ("Eesti Paevaleht", 16.02).

La presse locale souligne que les rapports entre Moscou et Washington se sont aggravés après l'annonce des projets américains de déployer des éléments de l'ABM américain en République tchèque et en Pologne. Les journalistes estoniens reprochent surtout au président américain de n'avoir pas estimé à sa juste valeur la menace qui émane de Moscou. "Il est clair que maintenant la Russie sera poussée à accorder toujours plus de ressources à la modernisation de son industrie militaire (...). Ce qui est clair également, c'est que la plus grave erreur de George Bush réside non dans la guerre en Irak mais dans son incapacité d'empêcher depuis des années le renforcement de la Russie" ("Parnu Postimees", 16.02).

LETTONIE

Le récent voyage de Poutine dans trois pays arabes est considéré par des observateurs dans le "contexte munichois". "Une tournée de trois jours du président russe en Arabie saoudite, au Qatar et en Jordanie est déjà qualifiée d'historique et de nouvelle page dans les rapports (de Moscou) avec ces pays. C'est justement dans cette région qui est une zone d'influence politique et militaire des Etats-Unis que Vladimir Poutine commence à mettre en oeuvre sa "stratégie munichoise" qui consacre le refus de Moscou de se soumettre à un monde unipolaire. De leur côté, ces pays, agacés par la politique que les Etats-Unis mènent dans cette région ces dernières années, ont intérêt à prendre ostensiblement leurs distances avec l'Amérique" ("Biznes&Baltija", 14.02).

La décision scandaleuse du parlement estonien de démanteler le monument au Soldat soviétique libérateur au centre de Tallinn a provoqué de vastes échos dans la presse locale. "Le monument aux soldats soviétiques devient le personnage central dans la campagne électorale en Estonie et il a fourni à la Russie un prétexte pour accuser notre voisin de faire renaître le nazisme, les députés estoniens ayant voté pour éliminer le monument du centre de la capitale (...). Ces deniers temps, c'est bien l'Estonie qui attire les volées de bois vert de Moscou qui ne cache pas sa colère face à la baisse de son influence dans l'espace de l'ex-URSS" ("Diena", 16.02).

LITUANIE

Selon les estimations des médias lituaniens, les rencontres que Vladimir Poutine a tenues avec les leaders des pays du Proche-Orient, de l'Inde et de la Chine illustrent nettement mieux que son discours munichois toute la menace qui émane de la Russie. "Le président russe s'est mis à "gagner à sa cause" - pour recourir au jargon des services de sécurité qui lui est habituel - non seulement auprès des pays qui revendiquent le rôle de centres mondiaux de force mais aussi des alliés des Etats-Unis. Mais, sur la liste des propositions de M. Poutine, on voit des projets commerciaux, très précis et souvent attrayants, adaptés à chaque pays donné, et non plus un face-à-face idéologique avec l'Occident" ("Lietuvos rytas", 19.02).

La proposition du président lituanien de livrer à la Biélorussie du pétrole pour remplacer les livraisons russes est qualifiée par les experts locaux comme bien réaliste et politiquement fondée. Ils soulignent en même temps qu'il serait plus avantageux pour la Lituanie de créer des infrastructures et des centres de logistique pour les sociétés de transport internationales et non pas de devenir un simple pays de transit (avec la Russie). Selon eux, c'est cela qui doit aider Vilnius à jouer un rôle particulier en Europe. "Une Lituanie pays de transit? Telle était la perception traditionnelle de notre pays mais nous en tirerons profit seulement si nous créons une valeur ajoutée et si nous accordons des services sûrs. Nous croyons que la Lituanie sera un entrepôt européen à la frontière russe. La Lituanie est membre de l'Union européenne et de l'OTAN et, pour les entreprises étrangères, stocker des marchandises à la frontière russe est plus avantageux que de le faire à l'intérieur de la Russie" ("Verslo zinios", 15.02).

UKRAINE

La presse a été extrêmement préoccupée par l'appel du député à la Douma d'Etat (chambre basse du parlement russe) Valeri Iazev, réputé pour ses relations étroites avec le monopole gazier, à passer aux livraisons de gaz directes en Ukraine via la société Gazpromexport.

"Si l'opaque RosUkrEnergo vend du gaz pour 130 dollars, et le transparent Gazprom n'accepte pas d'en vendre pour moins de 230 dollars, l'Ukraine a-t-elle vraiment besoin de réclamer cette fameuse "transparence"? ("Podrobnosti", 15.02).

Une partie des médias s'est enthousiasmée pour l'initiative du président lituanien, Valdas Adamkus, approuvée par son homologue ukrainien, Viktor Iouchtchenko, qui a proposé de coordonner les efforts des pays transportant du pétrole pour riposter à la pression de la Russie. Mais de nombreux observateurs ont exhorté le pouvoir à bien prendre garde en adhérant à des alliances dirigées, même indirectement, contre la Russie. Outre les frais financiers, inévitables lors de la construction de nouveaux pipe-lines et terminaux, Kiev risque d'écoper de nouvelles sanctions économiques imposées par Moscou.

"Nos fonctionnaires de haut rang agacent la Russie... On dirait qu'ils soufflent à leur voisine du Nord: vous nous vendez du gaz à des prix trop bas, à ce qu'il paraît" ("Oligarkh.net", 16.02).

"Les livraisons de pétrole en provenance de Rotterdam via Klaïpeda exigeront des dépenses supplémentaires: les achats en bourse coûteront quelque 50% plus cher" ("Delovaïa stolitsa", 19.02).

MOLDAVIE

Les médias sont indignés par le fait que la Russie continue de reporter le retour sur son marché intérieur des vins moldaves.

"Pourquoi Chisinau n'a-t-il toujours reçu aucun document formulant les reproches de la partie russe confirmés par des analyses de laboratoire?... Qui couvrira les pertes des producteurs moldaves? Pour quelles raisons Moscou reporte-t-il le règlement de la question relative à la reprise des importations? Et finalement, l'introduction de l'embargo était-elle une mesure politique ou non?" ("Moldova Suverana", 15.02).

ARMENIE

Les évaluations des perspectives de la coopération stratégique avec la Russie sont en train de devenir de plus en plus pessimistes. "Malheureusement, tout porte à croire que les troupes russes n'épauleront pas l'Arménie en cas de guerre contre l'Azerbaïdjan ou la Turquie... Où est donc le sens du partenariat stratégique avec la Russie? Les Etats-Unis disent: soyez avec nous, et vous serez bien. Et ils étayent leurs déclarations par des faits. En quinze années d'indépendance (de l'Arménie), les Etats-Unis ont offert à l'Arménie près d'un milliard et demi de dollars! Et la Russie dit: si vous n'êtes pas avec nous, alors cela ira mal pour vous. L'exemple de la Géorgie est on ne peut plus spectaculaire. La Russie oublie sans doute que le monde change aujourd'hui à une vitesse vertigineuse, et que de petits pays ont, eux aussi, leur sentiment de dignité et peuvent, par conséquent, ne pas pardonner un tel manque d'amabilité" ("Golos Armenii", 17.02).

GEORGIE

Les politologues trouvent justifiée l'âpreté des propos tenus par le président russe à Munich: la Russie s'est affermie à un tel point qu'elle peut d'ores et déjà dicter ses conditions à l'Occident. "En la personne de Poutine, la Russie a réaffirmé être passée à l'attaque. La Russie n'entend pas accepter les règles du jeu proposées par l'Amérique et ses alliés... La Russie est une puissance économique en plein essor... Quel que soit le prix du pétrole, de toute façon il ne chutera pas au point que la Russie en soit atteinte. La Russie a une grande influence sur le monde islamique, entretient de bons rapports avec la Chine, la Corée... Elle investit huit milliards de dollars en Corée du Nord pour que celle-ci renonce à ses programmes nucléaires. Bref, tous sont débiteurs de la Russie, elle est une force puissante sur la carte politique du monde contemporain. Et c'est sur ce fond que la Russie est passée à l'attaque et a déclaré ne pas aimer bien des choses dans la politique des Etats-Unis" ("Sakartvelos respublika", 15.02).

Les experts se reconnaissent incapables de comprendre les motifs du choix par Vladimir Poutine du nouveau chef du Pentagone russe. "Le président russe a pris une drôle de décision, retirant le poste de ministre de la Défense à Sergueï Ivanov, connu pour son agressivité et soutenu par les généraux russes, pour nommer à sa place le chef du Service fédéral des Impôts, Anatoli Serdioukov, homme qui ne connaît absolument rien au domaine militaire" ("Sakartvelos respublika", 17.02).

AZERBAIDJAN

Les médias affirment que la future modernisation des armements et du matériel à la base militaire russe de Gumri recèle une menace potentielle pour la sécurité de l'Azerbaïdjan. "Sur fond de conversations sur la préoccupation face à des systèmes antimissiles américains déployés à proximité immédiate des frontières russes, le général Vladimir Mikhaïlov, commandant en chef de l'armée de l'air russe, a annoncé, se trouvant à Erevan, la future modernisation du système de DCA en Arménie... Le Caucase du Sud est au seuil d'une nouvelle "injection militaire" d'envergure en Arménie... Inutile de rappeler que de telles déclarations ne sont interprétées en Arménie que comme allusion au futur appui militaire de la Russie en cas de reprise des hostilités dans le Haut-Karabakh" ("Ekho", 17.02).

KAZAKHSTAN

L'adoption de la loi estonienne autorisant la démolition des monuments soviétiques a suscité une vive discussion dans les médias. Les journaux progouvernementaux font état du mécontentement des parlementaires kazakhs qui préparent une note de protestation. La presse indépendante condamne les appels à s'ingérer dans un "conflit étranger". "C'est un problème russo-estonien. Il ne faut donc pas essayer de l'extrapoler artificiellement au Kazakhstan. Il ne faut pas nous mêler à cette sale affaire. Les diplomates et les hommes politiques des deux pays sont en conflit depuis longtemps... Nous voyons la Russie tomber dans une hystérie anti-estonienne. Des actes d'intimidation de toutes sortes se déroulent à Moscou et les hommes politiques moscovites adoptent un ton dur en parlant de l'Estonie. Nous l'avons déjà vu pendant la première campagne tchétchène, où des villes et villages de l'Itchkérie ont fini par être la cible de bombardements" ("Turkiston", 17.02).

KIRGHIZIE

Certains médias sont mécontents du statut de la Kirghizie au sein de l'Organisation de coopération de Shanghai (OCS). "Des sièges d'organisations clés de l'OSC se trouvent dans presque toutes les capitales des pays membres, sauf la Kirghizie. Les structures économiques siègent en Russie, la partie administrative en Chine, les structures militaires à Tachkent et les banques au Kazakhstan. La Kirghizie n'a rien qui puisse démontrer son rôle dans l'OSC" ("Alas", 15.02).

Ces derniers temps, la migration des habitants russophones vers la Russie est devenue un problème très sensible pour certaines régions kirghizes, selon les médias. Le nombre d'expatriés est en hausse et il ne s'agit pas que de "travailleurs migrants". "Rien qu'en janvier 2007, 67 habitants de la région d'Och ont quitté le pays pour résider en permanence en Russie... On ne part plus seul, mais en famille... Beaucoup d'habitants de notre pays se rendent dans les villes russes pour acquérir la nationalité russe" ("Obchtchestvenny reiting", 16.02).

OUZBEKISTAN

Selon les observateurs, la population russe des pays centrasiatiques s'est retrouvée dans un milieu hostile que tôt ou tard elle sera obligée de quitter. "Les russophones sont devenus une minorité ethnique... L'octroi de préférences aux nationaux en matière de privatisation et d'entrepreneuriat, le démantèlement des entreprises qui employaient essentiellement la population d'expression russe n'ont pas manqué d'aggraver la situation des russophones dont le nombre s'est encore réduit" ("Ferghana.Ru", 15.02).

TADJIKISTAN

Les experts en arrivent à la conclusion que Gazprom devient de plus en plus dépendant de la Turkménie. "Ce sont dans une large mesure les livraisons du gaz naturel turkmène qui ont permis et permettront à la Russie de compenser le décalage - qui se réduit - entre les quantités de gaz destinées à l'exportation et celles qui sont produites par Gazprom tout seul. (...) A l'heure actuelle, les positions de Gazprom sur le marché financier sont excellentes. Or, vu le fait que dans les années à venir il ne sera en mesure d'accroître sa production annuelle que de 0,5% tout au plus, sa dépendance vis-à-vis du gaz turkmène augmentera à moyen terme. (...) Ainsi donc, la Turkménie et son "combustible bleu" joueront un rôle grandissant dans l'équilibre gazier non seulement de la Russie, mais aussi de tout l'espace eurasien" ("Asia-Plus", 16.02).

Selon les médias, le projet de Norilsk nickel prévoyant l'exploitation à ciel ouvert du gisement de polymétaux à Kanimansour risque de causer un grand préjudice au patrimoine culturel national du Tadjikistan. "Kanimansour est un site unique en son genre. (...) Des monuments historiques attestent que lorsque la Sogdiane [ancien nom de Sughda, région qui occupait un territoire comprenant le Tadjikistan, l'Ouzbékistan du sud et l'Afghanistan du nord actuels] ripostait aux troupes d'Alexandre le Grand, les mines d'argent étaient déjà en service et jouissaient d'une vaste renommée. (...) Le gisement de Bolchoï Kanimansour doit être mis en valeur de manière à ne pas anéantir la mine ancienne unique en son genre. Kanimansour doit être sauvegardé en tant qu'élément constitutif du patrimoine culturel national du Tadjikistan" ("Fakty i kommentarii", 15.02).

Fil d’actu
0
Pour participer aux discussions, identifiez-vous ou créez-vous un compte
loader
Chat
Заголовок открываемого материала