Une employée de la chaîne de télévision équatorienne TC Televisión de Guayaquil, investie le 9 janvier par des bandits armés alors qu'une émission était en direct, a raconté à Sputnik ce qu'elle et ses collègues avaient vécu lors de cette attaque. Craignant pour sa vie, elle a requis l’anonymat.
"Pour exprimer véritablement ce qui s'est passé... nous ne pourrons jamais décrire ce que nous avons ressenti à ce moment-là. Décrire cela, c'est comme regarder un film d'horreur...", indique l'employée.
Selon elle, c'était une "journée de routine pour les médias", mais des collègues sont arrivés en courant vers 14h10, et ont dit qu'il y avait des tirs.
"Quand nous avons essayé de nous enfuir, ils étaient déjà à un mètre de nous. Nous avons décidé de nous cacher parce que c'était la seule solution. Nous pouvions entendre tout ce qu'ils disaient. Certains d'entre eux disaient: 'Je veux les tuer, je veux les tuer, je veux les tuer'. D’autres disaient: 'Apportez, apportez des armes'", note la journaliste.
Les employés de la chaîne ont aussi entendu les assaillants prononcer les mots "machettes" et "couteaux".
"Et puis soudain une voix: 'Apportez des explosifs, avez-vous des bombes? Apportez des explosifs'. Et en réponse: 'Oui, il y a des explosifs, amenez-les pour faire exploser'".
"Un champ de bataille" dans le studio
La salle s'est transformée en champ de bataille, selon elle.
"Ils ont pris des otages […]. Ils les ont emmenés et ont crié: 'Nous voulons ouvrir la porte'. Parce qu’à ce moment-là, nous avions un journal télévisé en direct. 'Nous voulons ouvrir la porte, ouvrez-nous la porte' Ils ont frappé aux portes, cassé les vitres, volé de l'argent, volé nos affaires", poursuit l'employée.
Le peu que les journalistes ont pu dire à leurs parents et amis, c'est qu'ils étaient retenus par un groupe criminel. Les bandits ont déclaré: "Oui, oui, nous sommes la mafia. Personne ne nous arrêtera. Nous dirigeons le pays".
"Ils ont réussi à prendre des otages. Et ils les ont emmenés au studio. La porte du studio est très solide. On peut l'ouvrir de l’intérieur mais pas de l’extérieur. Ils ont emmené des gens de la salle de contrôle: le producteur de l'équipe, les assistants de production, les caméramans, et leur ont fourré des explosifs sous la menace d'une arme. Cachés, nous les avons entendu dire qu'ils voulaient nous tuer".
Arrivée de la police
Soudain, les journalistes ont entendu les bandits dire que les policiers étaient arrivés. Les gangsters ont menacé de tuer les otages.
"Ils ont pointé leurs armes sur tous ceux qui se trouvaient dans le studio. Et soudain on a entendu: bang, bang, bang, bang! 'Au sol!' Des insultes se sont fait entendre. C'était un champ de bataille. Nous tous qui étions là, qui étions sous les balles, nous avons entendu des insultes et des menaces. On pourrait dire que nous étions à l’épicentre de tout. Nous avons vu les balles voler à côté de nous".
Semer la terreur
Selon l'employée, ceux qui ont pris le contrôle du studio de télévision voulaient "semer la terreur parmi les Équatoriens".
Finalement la police et les forces armées ont neutralisé les gangsters qui étaient au nombre de 13 dans le studio.
"Au total, il nous a fallu environ deux heures pour être sortis de cet enfer."
Situation en Équateur
Le Président Daniel Noboa a déclaré le 8 janvier l'état d'urgence pour 60 jours en Équateur. Cela permet au dirigeant de recourir à l'armée pour reprendre le contrôle du système pénitentiaire, où 139 employés sont retenus en otages.
Des émeutes ont commencé dans plusieurs villes du pays dans la nuit du 8 au 9 janvier. Des criminels ont incendié des voitures et des bus. Des explosions de bombes artisanales ont été signalées à Guayaquil. Selon la police, des inconnus ont kidnappé sept policiers dans la capitale Quito et à Machala en moins de 24 heures. Trois agents de police de Machala ont plus tard été libérés vivants.
Le 9 janvier, des inconnus masqués et armés ont fait irruption dans le studio de la chaîne TC Televisión de Guayaquil, prenant les journalistes en otages.
Le Président Noboa a déclaré que l'Équateur était en état de conflit armé interne. Il a ordonné à l'armée de neutraliser 22 groupes criminels comptant des dizaines de milliers de membres.
Pour le chef du commandement unifié des forces armées, Jaime Vela Erazo, ces groupes criminels sont des cibles militaires et les autorités n'ont pas l'intention de négocier avec eux.