"L’autorisation donnée par Biden aux Européens de livrer des F-16 à l’Ukraine n’est qu’une manière d’effacer, par un coup de communication, le revers stratégique" d’Artiomovsk (Bakhmout) "et surtout, d’en tirer bénéfice pour l’industrie américaine", a déclaré le général français Jean-Bernard Pinatel dans un article publié par Le Dialogue.
"Cette perte risquait d’avoir un impact considérable sur le moral des forces ukrainiennes et sur ceux de leurs soutiens extérieurs dont les médias et consultants aux ordres n’arrêtaient pas d’annoncer jusqu’à ce jour l’imminence d’une contre-offensive ukrainienne qui ne pouvait être que victorieuse du fait de l’aide massive occidentale, notamment en chars lourds", affirme le général.
La livraison de F-16 n’aura aucune incidence concrète à moyen terme sur la puissance de feu de l’Ukraine et sur la défense de son espace aérien, à son avis. D'ailleurs, le Président Biden avait aussi exprimé un avis pareil. Il avait déclaré que la fourniture de F-16 à Kiev n'aurait pas amélioré la situation à Bakhmout.
Ces avions ne pourront pas servir à l’Ukraine pour acquérir une supériorité aérienne avant plusieurs années pour deux raisons, explique le général.
L’Europe est équipée surtout de F-16AM/BM MLU, une version fabriquée sous licence jusqu’en 1980, détaille M.Pinatel.
"Entrés en service il y a plus de 40 ans, ces appareils sont surclassés par les chasseurs russes les plus modernes et n’ont aucune chance de mettre en danger le dispositif russe protégé par des systèmes sol-air S-400";
Savoir piloter un avion de chasse et une chose, combattre avec lui en est une autre, poursuit le général.
"Un pilote ukrainien aguerri sur MiG peut acquérir une ’compétence consciente’ sur F-16 en un an. Mais passer en ’compétence inconsciente‘ c’est-à-dire être capable de combattre sous stress par ’réflexe’ prendra plusieurs années, affirme-t-il.
L'industrie américaine en profite
Selon M.Pinatel, c’est l’industrie américaine qui pourrait gagner le plus de cette décision: elle pourra ainsi accélérer le rythme de construction et d’exportation de nouveaux appareils F-35 dont le coût unitaire avoisinent les 200 millions de dollars.
Un haut responsable de l’administration Biden avait récemment déclaré à la chaîne de télévision NBC que Washington et ses alliés prévoyaient de livrer ces appareils, dont l’efficacité reste à prouver, à l'Ukraine, même si ces derniers ne proviendront pas forcément des États-Unis. Par ailleurs, un document d’évaluation de pilotes ukrainiens s’entraînant à Tucson, dans l’Arizona, avait fuité dans les médias.