Afrique en marche

La sécurité par le developpement et les drones: un expert analyse les dépenses militaires en Afrique

Les budgets militaires de l’Afrique, contrairement à ceux de l’Occident, ont diminué en 2022. Mokhtar Saïd Mediouni, ex-colonel algérien, indique à L’Afrique en Marche que des pays africains souhaitent assurer leur sécurité pas uniquement par des moyens militaires et qu'ils utilisent efficacement des équipements auparavant inaccessibles.
Sputnik
Les dépenses militaires mondiales ont augmenté pour la huitième année consécutive en 2022 pour atteindre un niveau record de 2.240 milliards de dollars, indique le dernier rapport de l'Institut international de recherche sur la paix de Stockholm (SIPRI). En plus des États-Unis, la plus forte hausse a été observée en Europe (+13%). Dans le même temps, les dépenses militaires des pays africains ont totalisé 39,4 milliards de dollars en 2022, soit une diminution pour la première fois depuis 2018, avec 5,3 % de moins qu'en 2021 et 6,6 % de moins qu'en 2013.
Mokhtar Saïd Mediouni, ex-colonel de l’armée de l’air algérienne et expert en questions sécuritaires et de Défense, estime que la réduction des budgets militaires en Afrique est due en partie à une approche plus approfondie à la sécurité et à l'utilisation d'une gamme plus large de moyens. "Il ne peut pas y avoir uniquement la lutte armée et militaire pour combattre le terrorisme. Il faut développer les régions économiquement pour tarir les sources de recrutement des groupes terroristes", affirme l’expert à Radio Sputnik Afrique.
Tout d'abord, les questions de la sécurité alimentaire et de l’approvisionnement en eau devraient être réglées. Selon l’ex-colonel algérien, s'il y avait en Afrique "une vraie solidarité, il n'y aurait pas eu de problème d'eau" sur le continent, qui abrite par exemple le lac Victoria, le deuxième plus grand lac d'eau douce de la planète. Le fait que l'Afrique reste divisée serait une conséquence de la politique coloniale et post-coloniale française: l'une des principales tâches de Paris était "de ne jamais permettre une connexion interafricaine".
Outre cela, l'exemple du Mali, qui recourt avec succès aux drones pour lutter contre le terrorisme, montre que même les budgets limités peuvent être utilisés efficacement. Bamako a compris très tôt la valeur de ces équipements, "mais malheureusement les drones étaient inaccessibles: on ne voulait pas les vendre aux pays arabes et africains", rappelle M.Mediouni.
Quant aux dépenses militaires des pays occidentaux, l'expert cite deux raisons fondamentales pour expliquer leur augmentation: "La première tient au fait qu’un conflit de haute intensité se déroule actuellement, pour la première fois depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, sur le territoire européen. En effet, depuis le début de l’Opération spéciale militaire russe en Ukraine, le sentiment que l’Europe était devenu un territoire de paix pérenne sous les auspices de l’Union européenne et de l’Otan, qui en assure la sécurité, a volé en éclats. La seconde est que depuis plus de trois décennies, les pays européens, comptant essentiellement sur la puissance militaire américaine au sein de l’Otan pour assurer leur sécurité, ont de moins en moins alloué de budget pour le maintien de leurs armées. Pis encore, ils ont même laissé tomber leur industrie militaire. Aussi, pratiquement toutes les armées européennes se sont réduites à peau de chagrin, ne pouvant plus assumer les exigences en termes humains, de munitions et de matériels militaires, sinon pour quelques semaines, d’un conflit de haute intensité qu’ils croyaient faire partie du passé.
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