Les observateurs européens persona non grata pour les futures élections gabonaises?

L’UE a annoncé qu’elle n’enverrait pas d’observateurs pour surveiller les prochaines échéances électorales au Gabon. Libreville n’a pas fait de demande en ce sens, alors que des tensions étaient apparues lors des présidentielles de 2016.
Sputnik
Aucun observateur européen ne se rendra au Gabon pour les prochaines présidentielles, a annoncé Rosario Bento Pais, ambassadrice de l’UE dans le pays. La diplomate a souligné que Libreville n’avait pas fait de demande en ce sens. Elle a souligné que l’UE ne pouvait pas imposer d’elle-même ses observateurs, au risque d’affaiblir ses relations avec le Gabon, qui sont déjà houleuses.
"Non, il n’y aura pas une mission d’observation électorale au Gabon pour les présidentielles de 2023. Nous n’avons pas été saisis […] Pour avoir une mission d’observation, il faut que le gouvernement fasse la demande. Si on n’est pas le bienvenu on ne peut pas venir", a ainsi déclaré la responsable en conférence de presse.
Une décision qui ne semble pas du goût de l’opposition. Au contraire de la diplomate européenne, certains pensent que l’UE peut et doit envoyer ses observateurs au Gabon. Pierre-Claver Maganga Moussavou, chef de file du Parti social-démocrate (PSD) fustige ainsi la mollesse de Bruxelles sur le dossier.
"Je pense à la non-assistance à personne en danger. L’UE ne peut pas baisser les bras. Elle peut imposer ses observateurs parce qu’il y a une ingérence pour imposer la démocratie. Il suffit que l’exploitation du pétrole cesse et si on arrête d’exploiter le manganèse, le Gabon n’a plus de ressources", déclare-t-il ainsi à RFI.
Du côté de l’exécutif, on affirme au contraire que les processus d’observation ont fait leur temps, et relèvent de logiques paternalistes.
"Ces pratiques sont d’un autre temps. Elles relèvent d’une forme de paternalisme, d’un passéisme pour ne pas dire plus. Imagine-t-on des observateurs de l’Union africaine venir observer des élections dans un pays européen? Ce serait totalement abscons" confie ainsi un membre du gouvernement à La Libreville.

Les tensions de 2016

Si le Gabon n’est pas pressé d’accueillir les observateurs européens, c’est sans doute que les souvenirs de la mission d’observation de 2016 sont vivaces. Cette année-là, la mission d’observation électorale de l’UE avait rendu un rapport critique sur le déroulement des élections présidentielles. Celui-ci pointait des "anomalies [qui] mettent en question l’intégrité du processus de consolidation des résultats et du résultat final de l’élection".
Les observateurs n’avaient pas seulement mis en cause les résultats, mais également les réactions de la Cour constitutionnelle, qui avait finalement validé la réélection d’Ali Bongo.
Les élections de 2016 avaient vu l’ancien ministre Jean Ping arriver au coude-à-coude avec le chef d’État sortant Ali Bongo, moins de 5.000 voix séparant les deux hommes. L’opposition avait contesté les résultats et plusieurs manifestations avaient dégénéré. L’Assemblée nationale avait été incendiée. Des heurts avec la police avait causé plusieurs morts.
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