Durant cinq jours, le monde entier a gardé les yeux rivés sur le sort du petit Rayan, bloqué dans un puits de plus de 30 mètres de profondeur dans la campagne de Chefchaouen, au Maroc. Malgré les tentatives des équipes qui ont déplacé, jour et nuit, des quantités pharaoniques de terre pour le sauver, le Palais royal a annoncé le décès de l’enfant samedi 5 février au soir, quelques minutes après son exfiltration du puits. L’annonce a provoqué un déferlement d’émotion sur les réseaux sociaux, et dans la presse internationale, qui ont suivi de près les opérations de sauvetage.
Le monde arabe en émoi
C’est un véritable choc, pour le monde entier, notamment le monde arabe mobilisé aux côtés du peuple marocain dès les premières heures de ce drame qui s’est déroulé dans un village de la province de Chefchaouen. En effet, des millions de personnes ont passé ces quelques jours suspendues au sort du petit Rayan, comme en témoigne notamment la couverture quotidienne de certaines chaînes télévisées arabes, dont la qatarie Al-Jazeera qui ont diffusé en continu le live des opérations de sauvetage, ou encore la réaction des commentateurs de la chaîne beIN Sports, dont les nerfs ont lâché, à l’antenne, lors d’une émission en marge de la Coupe d’Afrique des nations:
Après l’annonce du décès, des messages de tristesse et de soutien de personnes sous le choc ont inondé les réseaux sociaux:
"Repose en paix Rayan, puisse Dieu donner la force à ses parents"
L’élan de soutien manifesté par le peuple algérien et les articles de presse de certains médias privés ont également touché le peuple marocain, à un moment pourtant critique des relations entre les deux pays:
L’espoir du "happy ending" dans un contexte "morose"
Comment expliquer cette vague de mobilisation sans précédent, cet état de choc collectif, dans un contexte miné par de profondes tensions? Pour le journaliste politique marocain Abdellah Tourabi, interrogé par Sputnik, cela peut s’expliquer par le profil de la victime, le déroulement du sauvetage, ou encore le sombre climat social qui règne depuis des mois.
"D’une part, je dirais que c’est naturel d’avoir de la compassion pour un enfant. Mais il y a aussi quelque chose dans la tentative de sauvetage, qui relève de l’héroïsme, nous sommes au Maroc, qui n’est ni un pays riche, ni développé, mais qui a tout de même réussi à mobiliser d’importants moyens pour sauver cet enfant. Cela ressemblait à une scène de film, un feuilleton de plusieurs jours où l’on voit des équipes qui se démènent pour sauver un enfant, tout le monde espérait un happy ending".
Par ailleurs, la condition sociale de l’enfant, de sa famille, et même de certains sauveteurs a suscité une importante compassion, particulièrement dans le monde arabe qui avait besoin "de croire en des figures héroïques".
"C’est une région rurale que même certains Marocains sont incapables de localiser sur la carte. Puis nous avons vu des figures populaires, le Marocain ordinaire qui durant quatre jours a creusé sans relâche, on a tous en tête le visage de Ba Ali Sahraoui qui a creusé manuellement durant des heures… nous avions besoin d’avoir des figures héroïques auxquelles nous identifier en ces temps difficiles."
"Quand on voit des messages de petits enfants algériens par exemple, ça recolle un peu les morceaux et créé un sentiment de proximité qui remédient à ces tensions, du moins au niveau populaire", conclut le journaliste.
La tragique histoire de Rayan a également ravivé d’amers souvenirs dans certains pays comme en Espagne, endeuillée en 2019, après la mort du petit Julen, tombé dans un puits de 100 mètres de profondeur dans le sud du pays, mais aussi en Algérie, lorsqu’un jeune homme dénommé Ayache, a connu le même destin tragique en 2018, après six jours d’opérations de sauvetage.