Meurtre d’une Française à Tiznit: Rabat plaide pour "un acte isolé"

Sous le coup d’une enquête antiterroriste, les motifs exacts derrière l’assassinat de la ressortissante française à Tiznit, au Maroc, n’ont pas encore été élucidés. Le gouvernement marocain évoque néanmoins "un acte isolé" commis par un individu souffrant d’importants troubles psychiatriques.
Sputnik
L’affaire secoue le Maroc jusqu’aux plus hauts sommets de l’État, alors que de son côté le ministère français des Affaires étrangères a recommandé à ses ressortissants de faire "preuve de vigilance dans l’ensemble des lieux publics et lors de ses déplacements au Maroc". Mais le porte-parole du gouvernement marocain, Mustapha Baitas, rassure. "Ces actes arrivent partout dans le monde et pas que dans notre pays. On parle ici d’un acte isolé qui peut arriver et qui est en lien avec l’état psychologique de la personne qui a commis ce crime", a-t-il affirmé jeudi 20 janvier. Le responsable a également informé que le crime est lié à la situation psychologique de l’auteur, avant d’ajouter: "Si ces incidents isolés se transforment en phénomène, alors le gouvernement doit intervenir afin de revoir la politique pénale".
Samedi 15 janvier, la brigade de la police judiciaire relevant du district provincial de sûreté de Tiznit a ouvert une enquête judiciaire suite au meurtre de Christiane Fourret, ressortissante française âgée de 79 ans, tuée à l’arme blanche. Le présumé assassin, âgé de 31 ans, a été repéré par une caméra de surveillance alors qu’il prenait la fuite après l’agression. Il s’en est également pris à des clients d’un café sur la côte d’Agadir, dont une ressortissante belge, actuellement hospitalisée.
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Un lourd passif psychiatrique

Selon différents rapports médiatiques, les résultats d’une enquête préliminaire auraient montré que l’accusé a un casier judiciaire vierge, mais qu’il a déjà été admis au service de psychiatrie de l’hôpital Hassan Ier de Tiznit, pour une période d’un mois, de septembre à octobre 2021. Une perquisition effectuée à son domicile aurait d’ailleurs permis d’y saisir 13 ordonnances psychiatriques, confirmant ainsi un déséquilibre mental. Par ailleurs, des sources proches de l’enquête, citées par la presse locale, affirment que l’accusé aurait tenu des propos incohérents lors de son interrogatoire, confirmant alors une importante instabilité psychique voire une "aliénation mentale". L’individu aurait même affirmé agir "sur injonctions d’une voix", qui lui ordonnerait de vivre "dans l’insalubrité en souillant ses effets vestimentaires et même une copie du saint Coran par ses excréments". Compte tenu de ces éléments, le juge d’instruction près l’annexe de la cour d’appel de Salé a prononcé son internement à l’hôpital psychiatrique Arrazi de Salé, pour s’assurer de sa santé mentale.
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La piste terroriste demeure pour autant sur la table

Deux jours après le crime, le dossier du présumé assassin a tout de même été transféré au procureur général de la cour d’appel de Rabat, spécialiste des affaires terroristes, qui a ordonné au Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ) d’instruire l’affaire. Le parquet national antiterroriste (PNAT) français a également annoncé mercredi 19 janvier l’ouverture d’une enquête pour "assassinat en relation avec une entreprise terroriste", suivi de la Belgique qui à son tour a ouvert une enquête pour "tentative d’assassinat dans un contexte terroriste". Pour le moment, aucune information officielle évoquant un lien avec une organisation terroriste n’a été communiquée.
Pour Ghita El Khayat médecin psychiatre et psychanalyste contactée par Sputnik, les deux thèses sont plausibles.

"Le fait qu’il ait interagi avec des non-musulmans serait une note xénophobe. Que cette personne soit malade mentale c’est une chose, mais il n’est pas allé assassiner une jeune fille de son village ou de sa ville. Même s’il délire, dans son délire il y aurait une connotation xénophobe. D’ailleurs, Tiznit est très fréquentée, c’est peut-être un choix délibéré de victime."

Pour ce qui s’agit de sa santé mentale, elle affirme que:

"La véracité du dossier psychiatrique doit être vérifiée. À ce moment-là, interviennent les experts en psychiatrie. C’est très facile de dire: +c’est un fou+, mais il faut le prouver avec un dossier béton. La gravité de l’acte ne s’efface pas, c’est aux experts de traduire ce que le malade dit, si maladie il y a et de nuancer ses propos, car ses délires peuvent également avoir une teinte religieuse."

Acte terroriste ou non, cet acte effroyable rappelle la sombre histoire qui avait bouleversé l’opinion publique marocaine en 2018. Deux touristes scandinaves avaient alors été assassinées à l’arme blanche en 2018, à Imlil, près de Marrakech. Les trois coupables ont été condamnés à mort par le tribunal antiterroriste, pour avoir décapité les victimes au nom de Daech*.
*Organisation terroriste interdite en Russie
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