Des pesticides interdits depuis des années toujours présents dans l’organisme des Français

Une partie de la population reste exposée à des pesticides interdits depuis plus de dix ans, bien que les niveaux d’exposition des Français à ces substances soient similaires à ceux retrouvés dans la plupart des pays étrangers, indique une étude de Santé publique.
Sputnik
L'exposition des Français aux pesticides reste importante, montre l’étude de biosurveillance Esteban menée par Santé publique France (SPF) et dévoilée le 16 décembre.
SPF a étudié l'exposition de 2.503 adultes de 18 à 74 ans et 1.104 enfants de 6 à 17 ans à cinq familles de pesticides, dont les organochlorés, les plus anciens et les plus toxiques, ainsi qu'aux PCB, dioxines et furanes, présents dans l’environnement et la nourriture.

Les résultats

Par rapport à la dernière étude en date sur la question, menée entre 2006 et 2007, l'exposition des Français est en baisse pour toutes les substances recherchées, à l'exception du métabolite de la deltaméthrine, insecticide largement utilisé sur les arbres fruitiers. Globalement, les niveaux mesurés en France sont similaires à ceux retrouvés dans la plupart des pays européens et en Amérique du Nord.
Cependant, 99% des Français présentent des traces d'insecticides pyréthrinoïdes, et 90% pour les insecticides organophosphorés.
Santé publique France juge "préoccupantes" ces expositions à des substances interdites parfois depuis plus de 10 ans. Par exemple, le bêta-HCH, un sous-produit du lindane, présent à des niveaux supérieurs en France par rapport au reste du continent européen. Le lindane, insecticide longtemps utilisé en agriculture, est interdit depuis 1998. Néanmoins, sa présence a été détectée chez un Français sur deux, et même chez les enfants.
Quant au glyphosate, Santé publique France établit qu'il se retrouve dans moins de 20% des tests effectués.

Sources d’exposition

L’alimentation reste la première source d’exposition aux pesticides. Ainsi, la consommation d’œufs ou de matières grasses issus de l’agriculture conventionnelle peut augmenter les imprégnations aux organochlorés, PCB/dioxines/furanes, et la consommation de viande bovine augmente l’exposition aux pyréthrinoïdes, PCB/dioxines/furanes, explique SPF. La consommation de tabac et l'utilisation d'insecticides domestiques peut entraîner la concentration dans l’organisme des pyréthrinoïdes.
Pour limiter l’exposition, l’agence suggère d'adopter une consommation alimentaire intégrant des produits de l'agriculture biologique, qui n’utilise pas de pesticides.

"Afin de diminuer certaines concentrations, nos résultats suggèrent d’adopter une consommation alimentaire variée intégrant des produits de l’agriculture biologique. Mais également de respecter les conditions d’utilisation des insecticides au domicile et d’aérer régulièrement son intérieur", signale Clémence Fillol, responsable de l’unité surveillance des expositions de Santé publique France.

Utilisation des pesticides

Le sujet de l’exposition aux pesticides, qui regroupent plus de 1.000 substances très hétérogènes, reste très sensible en France. Fin octobre, l’exécutif a tranché dans la reconnaissance d’un lien entre certaines pathologies, et notamment le cancer de la prostate, et une vaste utilisation des pesticides: ainsi, le ministère de l’Agriculture s’est engagé à reconnaître le cancer de la prostate comme maladie professionnelle chez les agriculteurs.
Pourtant, malgré l'objectif du plan Ecophyto, qui vise une réduction du recours aux produits phytopharmaceutiques, dont les pesticides, de 50 % d'ici à 2025, leurs ventes ne diminuent pas. À l’inverse, en 2020, les ventes de pesticides ont grimpé de 23% par rapport à l’année précédente, soit à 44.036 tonnes, selon les données du ministère de l’Agriculture.
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