Au Maroc, polémique autour d’une "taxe casher" qui "n’existe pas"

Depuis quelques semaines, la communauté juive au Maroc et à l’étranger est déconcertée suite à la polémique autour d’une "taxe casher" qui aurait été imposée par la Commission de la cacheroute à certains opérateurs touristiques. Explications.
Sputnik
"Cette histoire de taxe est scandaleuse", "cette histoire n’est pas vraie", "c’est compliqué parce que des personnes sont impliquées dans cette histoire". Les propos divergent lorsque l’on demande l’avis de la communauté juive sur la polémique autour d’une "taxe casher".
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L’histoire remonte à une circulaire datant du 23 juillet 2021, co-signée par le ministère de l’Intérieur, de l’Agriculture et du Tourisme, reconnaissant à la Commission de la cacheroute [ensemble de règles alimentaires juives, ndlr.] "l’exclusivité" de la remise du label casher. Le but de cette reconnaissance est d’empêcher "certains hôtels et organisateurs de cérémonies et de fêtes" de prétendre frauduleusement être agréés par la Commission de la cacheroute marocaine, induisant en erreur les personnes de confession juive. À ce titre, "les établissements touristiques et les organisateurs d’événements souhaitant délivrer des prestations casher conformément au culte juif […] doivent impérativement obtenir au préalable une autorisation "Teoudah" [qui atteste que les produits sont casher, ndlr.] délivrée par la Commission de la cacheroute".
Peu de temps après, plusieurs médiasmarocains ont relayé les plaintes de certains hôteliers et opérateurs touristiques qui se seraient vus imposer une taxe de quatre euros par nuitée et par personne, pour consommer casher durant leur séjour, en contrepartie de la certification. Pour ces derniers, imposer une taxe en période de reprise économique est "inacceptable", d’autant plus que des taxes israélites sont déjà en vigueur. "Ils ont peut-être fait une bêtise, c’est possible. Peut-être se sont-ils dit qu’il y a une manne pour renflouer les caisses de la communauté", observe le responsable d’une boucherie casher à Casablanca.
De leur côté, la Commission de la cacheroute comme le Conseil de la communauté israélite du Maroc (sous l'autorité duquel elle opère) ont conjointement démenti cette information dans un communiqué datant du 8 novembre. "Il n'a jamais été objet d'instituer une taxe par personne et par nuitée en contrepartie de la délivrance du Label Casher Maroc". Contacté par Sputnik, le secrétaire général du Conseil de la communauté israélite, Serge Berdugo, assure lors d’un bref échange que cette taxe n’existe pas.
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Un membre de la Commission de la cacheroute contacté par Sputnik a infirmé à son tour l’existence de cette "taxe casher". Elle confie toutefois que des mesures sont actuellement à l’étude pour permettre le financement des activités de la Commission, qui s’agrandissent depuis le rétablissement des relations avec Israël et l’important flux de touristes israéliens. "La structure a besoin de mieux s’organiser, non plus autour de Casablanca qui était la principale ville de l’activité mais désormais dans tout le Maroc, cela requiert des moyens…" dit la source qui a requis l'anonymat, en ajoutant que la cachérisation des produits "coûte cher".

Mises en garde

Il y a quelques jours, une chaîne de la télévision israélienne a mis en garde les juifs qui envisageraient de se rendre au Maroc contre la validité des produits casher : "Le monopole de la cacheroute a été confié au président de la communauté du Maroc qui délivre des certificats aux établissements de son choix. Les rabbanim redoutent cette directive car le président ne respecte pas la Torah et Mitsvot [commandements contenus dans le livre saint de la Torah, ndlr.]…" avant d’ajouter que "plusieurs grands rabbanim du parti sioniste religieux devraient publier au cours des prochains jours une mise en garde concernant la cacheroute pour les voyageurs vers le Maroc. Plusieurs rabbanim ont déjà signé, et d’autres ne devraient pas tarder à les rejoindre". Pour le responsable de la boucherie contacté par Sputnik, certaines personnes chercheraient à viser directement Serge Berdugo, secrétaire général du Conseil de la communauté israélite depuis 1987. En effet, les opposants de la taxe reprochent également la non-tenue d’élections depuis 1969, malgré l’appel du roi en 2019 à respecter la périodicité du renouvellement des instances représentatives des communautés israélites au Maroc. Pour le boucher,"C’est une personne publique, des personnes lui en veulent terriblement, mais il est irremplaçable… qui de mieux que lui?".
Questionnée au sujet de la validité des produits casher, la source issue de la Commission s’indigne de l’émergence de plusieurs groupes non contrôlés, "qui se développent à notre insu". "Il y a une dizaine de groupes casher à Marrakech, qui les prépare? qui les supervise? …", dit-il en insistant sur le coût d’un tel contrôle.
La communauté juive semble donc divisée à ce sujet. Si la Commission de la cacheroute nie fermement l’existence d’une "taxe casher", elle ne cache pas le besoin en moyens financiers pour accompagner le développement du secteur en "bonne et due forme". Ceux qui affirment l'existence de cette "taxe" ne décolèrent pas et ont même envisagé "de mener une action commune contre la Commission de la cacheroute", selon le site d’information marocain le Desk.
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