"Je ne me résous pas à ce que plusieurs centaines de milliers d’entre vous soient depuis trop longtemps sans emploi, souvent sans ressources. Sans perspectives". Dans un message publié sur Facebook, Emmanuel Macron a annoncé le lancement au 1er mars 2022 du "contrat engagement jeune" (CEJ). Un dispositif qui permettra aux moins de 25 ans sans formation ni emploi d’obtenir une allocation pouvant aller jusqu’à 500 euros par mois, en échange de 15 à 20 heures par semaine de formation ou d’accompagnement. Néanmoins, ce contrat n’ouvrira des droits que pour une durée maximale de 12 mois, extensible jusqu’à 18 mois pour les plus exclus. Le tout "sous condition de revenus, d’assiduité et d’acceptation des offres d’activité faites", a d’ores et déjà prévenu le chef de l’État.
"Ce n’est pas la grande mesure pour les jeunes à laquelle on aurait pu s’attendre", tacle d’emblée au micro de Sputnik l’économiste Henry Sterdyniak.
"Cela ne fait que reprendre la “garantie jeune”, il y a très peu de différence", poursuit-il. Ce premier dispositif, lancé en 2015, lui aussi destiné aux plus précaires, permet le versement d’une allocation financière et un accompagnement renforcé vers l’emploi. La Cour des comptes avait d’ailleurs été saluée ce mécanisme.
Des objectifs revus à la baisse
Une énième usine à gaz? Pour parer à toute critique, Jean Castex a plaidé que le CEJ ne s’ajoutera pas "aux nombreux dispositifs existants". "Il les remplace, il les intègre, les harmonise, les décloisonne, au sein d’un nouveau cadre commun à tous les opérateurs, fondé sur les mêmes règles, les mêmes exigences, et doté de moyens renforcés", a-t-il poursuivi, lors d’un discours à Vitry-sur-Seine, dans le Val-de-Marne.
En outre, le CEJ devrait concerner "au moins 400.000 jeunes en 2022", a indiqué le Premier ministre. Un chiffre à nuancer, puisqu’il englobe les 200.000 bénéficiaires de la "garantie jeune". À terme, ce sont 500.000 personnes qui seront accompagnées. Cet objectif reste toutefois moins ambitieux que dans la version initiale du "revenu d’engagement" annoncé par le chef de l’État le 12 juillet dernier, qui prévoyait d’aider un million de bénéficiaires. Or, en 2018, 963.000 jeunes âgés de 16 à 25 ans n’étaient ni en études, ni en emploi, ni en formation selon des chiffres cités par la Direction de l’Animation de la recherche, des Études et des Statistiques (Dares).
"Ce dispositif n’est finalement pas universel et ne correspond pas aux attentes initiales", a donc regretté Paul Mayaux, président de la Fédération des associations générales étudiantes (Fage) et membre du comité de pilotage de l’ex-revenu d’engagement.
"C’est un peu décevant par rapport à une allocation qui couvrirait l’ensemble des jeunes en difficulté, ça ne s’adresse qu’à des jeunes un peu particuliers. Cela ne réglera donc pas la question de la précarité", abonde Henry Sterdyniak.
Comme l’économiste l’explique, les étudiants issus des milieux populaires, les précaires qui enchaînent des petits boulots ou les jeunes diplômés en recherche d’un premier emploi ne seront pas concernés par le CEJ.
Éviter le procès en assistanat
Alors fallait-il créer un "RSA jeune"? Rien n’est moins sûr, estime Henry Sterdyniak. Selon lui, "cela aurait coûté beaucoup plus cher". De plus, "il n’est pas complètement stupide de dire: “attention, on ne peut pas commencer sa carrière professionnelle par un RSA”", avance l’économiste. D’autant plus que politiquement, l’exécutif aurait pu essuyer un procès en assistanat. Des accusations que Matignon souhaitait éviter: "Il n’était pas question de créer un RSA jeune. L’idée est de miser sur un accompagnement extrêmement intensif pour mettre le pied à l’étrier de nombreux jeunes".
Or, pour ce faire, Henry Sterdyniak prévient qu’il est nécessaire de créer des postes pour les encadrer. Et pour cause, durant son contrat, le jeune sera en contact avec un référent unique, à savoir un conseiller de la mission locale ou de Pôle emploi. Le gouvernement devrait ainsi mobiliser 2,6 milliards d’euros dès 2022, auxquels s’ajouteront 550 millions, notamment pour financer 900 créations de postes à Pôle emploi.
Des sommes engagées qui ont néanmoins suscité l’ire de Xavier Bertrand, candidat à la Présidentielle: "On a un président qui ne se soucie pas du long terme, il fait campagne avec le chéquier de la France tous les jours, et ça, c’est insupportable", a-t-il tonné sur France 2. "C’est un chèque de plus, sans provision à ce stade", a quant à lui critiqué Christian Jacob, président de LR sur BFM TV.
Faudrait-il donc y voir une simple mesure de campagne? "La question n’est pas de savoir si c’est une mesure électoraliste ou non, mais de savoir si nous avons posé le bon diagnostic et si nous y apportons des solutions", s’est en tout cas défendu le Premier ministre Jean Castex devant les députés LREM, mentionnent Les Échos.