Dans une commune du Togo, une morgue pour en finir avec la conservation traditionnelle des corps

Au Togo, les autorités locales d’une commune viennent de lancer la construction d’une morgue moderne pour réduire les risques sanitaires liés à la conservation traditionnelle des dépouilles. Pour elles, non seulement l’initiative répond à un besoin des populations, mais elle a aussi le mérite de traiter les morts avec une certaine dignité.
Sputnik
Yoto 2, une commune du sud du Togo, entreprend de construire d’ici six mois une morgue. Une initiative presque anodine sous d'autres cieux, mais qui revêt pour Ayawavi Adjra, la maire de cette commune interrogée par Sputnik,une importance particulière.
Et pour cause, la construction d'une morgue correspond "à un véritable besoin pour la population", puisque, explique-t-elle, toute la préfecture de Yoto qui abrite la commune de Yoto 2, ne dispose pas de morgue moderne. Dans la région, la conservation traditionnelle des corps est de mise.
Au Togo, des profanateurs de tombes pris le crâne dans le sac
"Quand quelqu’un décède chez nous, il y a des spécialistes en conservation des corps dans le milieu que l’on appelle. Ils préparent une solution qu’ils administrent par voie orale à la personne défunte, et une autre est injectée à plusieurs endroits du corps pour éviter sa décomposition durant tout le temps nécessaire avant l’enterrement. Cette technique a été appliquée par exemple à mon oncle il y a une dizaine d’années quand j’étais encore au village. Son corps était gardé dans une case juste à côté, sans odeur, sans décomposition, jusqu’à l’enterrement qui a eu lieu un mois plus tard", raconte à Sputnik Kossi Kikli, un natif du milieu.
Interdiction
N’ayant pas d’alternative à proposer aux populations, les autorités locales ont toléré jusque-là cette pratique, alors qu'elle est officiellement interdite au Togo, reconnaît la maire. La morgue moderne la plus proche est en effet située à des heures de route.
Interdite, la conservation traditionnelle des corps a la peau dure au Togo
"Quand la construction de la nouvelle morgue sera terminée, nul ne pourra plus courir ce risque de conserver le corps d’un défunt à domicile. Les récidivistes seront sanctionnés!", martèle-t-elle.
Des risques pour la santé
L’édile soutient que la manipulation des dépouilles présente "d’énormes risques pour la santé des populations, surtoutqu'il y a de nombreuses maladies qui peuvent être transmises lors de la manipulation des corps", précise-t-elle citant, par exemple, le Covid-19.
De même, poursuit la maire de la commune de Yoto 2, "des insectes peuvent être en contact avec les dépouilles et infecter la nourriture ou souiller l’eau qui est consommée dans les maisons où les conservations des corps sont faites".
Un partenariat public-privé
C’est donc pour prévenir cette petite commune, dont elle a la gestion, de ces risques sanitaires qu'Ayawavi Adjra vient de conclure un accord de partenariat public-privé de type concessif avec Togo Sépulture (TOGOSEP). La même société qui a reconstruit, il y a deux ans, la morgue du CHU Sylvanus Olympio de Lomé, la plus grande du pays d’une capacité de 300 civières.
Togo: «délaissées», des populations proclament leur rattachement au Bénin
Avec cet accord, cette société va construire en six mois sur fonds propres, pour 300 millions de francs CFA (l'équivalent de 458.000 euros), une morgue moderne d'une capacité de 100 civières, dans la commune de Yoto 2, précisément dans le village d’Ahépé.
"Ce partenaire sera ensuite chargé de gérer pour une durée déterminée et sous le contrôle de la mairie l’infrastructure afin de pouvoir rentrer dans ses fonds. Après quoi, le joyau deviendra une propriété à part entière de la commune", explique Ayawavi Adjra.
L’édile affirme vouloir conclure ce même type de partenariat avec d’autres sociétés pour le développement de la commune de Yoto 2, à travers des projets de constructions de routes, d’écoles et de marchés.
Discuter