La mort de Jovenel Moïse contribuera-t-elle à grossir les rangs de la diaspora haïtienne, qui compte déjà plus de deux millions de personnes dans le monde? Tout pointe dans cette direction. Le 27 juillet, le journal hispanophone Infobae faisait état de la présence d’au moins 10.000 migrants dans la ville de Necoclí, en Colombie. Une grande majorité d’entre eux sont originaires de la perle des Antilles.
«Il y a quelques jours, le gouvernement colombien a nié l'existence d'une crise migratoire à Necoclí. @MigracionCol [l’agence des services frontaliers de Colombie, ndlr] l'a nié dans divers médias. Ces images datent d'hier et parlent d'elles-mêmes.»
Vers une nouvelle crise migratoire au Canada?
Selon André Sirois, avocat auprès de l’Onu, il est probable que de nombreux migrants haïtiens parviennent à se rendre jusqu’au Canada en passant par les États-Unis. Selon la Haitian Bridge Alliance, une organisation de défense des Haïtiens aux États-Unis et au Mexique, depuis 2015, entre 5.000 et 10.000 migrants se retrouvent déjà coincés à la frontière de Tijuana, espérant pouvoir un jour entrer sur le territoire américain.
Ayant participé à la Mission civile internationale en Haïti de l’Organisation des États américains et de l’Onu, en 1993-1994, André Sirois rappelle que le Canada accueille des Haïtiens depuis des dizaines d’années, ce qui devrait inciter plusieurs de leurs compatriotes à les rejoindre:
«Il y a une histoire assez longue d'immigration des Haïtiens au Québec, par le biais des missionnaires qui en faisaient venir pour travailler comme infirmières au rabais dans les hôpitaux. […] Encore en ce moment, malgré toutes les déclarations du gouvernement fédéral, le Canada continue de donner de l'aide afin de garder les cerveaux sur place en Haïti, mais, en même temps, continue d'accueillir des immigrants haïtiens en quantité, exponentiellement vu l'immigration par regroupement familial», explique-t-il à notre micro.
Pour l’avocat de l’Onu, l’arrivée massive de migrants haïtiens au Canada pourrait représenter un risque du point de vue de la criminalité:
«Il y a longtemps qu’Immigration Canada prévient Ottawa de l'implantation à Montréal d'une pègre haïtienne, très jeune, très dangereuse et hors de contrôle. On a l'équivalent à Toronto avec la criminalité jamaïcaine. Dans les deux cas, la situation est considérée comme une bombe à retardement», avertit l’ancien haut fonctionnaire des missions de l’Onu et des tribunaux internationaux.
Ce ne serait pas la première fois qu’un tsunami migratoire venu d’Haïti atteint les rivages du Canada.
Des milliers d’Haïtiens attendus partout sur le continent
Un scénario appelé à se répéter prochainement? Contacté par Sputnik, le ministère de l’Immigration du Canada a préféré ne pas «avancer d’hypothèses quant aux tendances futures potentielles»:
«Le Canada est solidaire du peuple haïtien pendant ces moments difficiles et incertains. […] Nous surveillons continuellement les conditions et la situation dans d’autres pays pour orienter notre planification», s’est contenté d’affirmer le ministère Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada.
D'après les chiffres de la Haitian Bridge Alliance, repris par le magazine Time le 22 juillet, depuis le début de son mandat, Joe Biden a déjà fait expulser plus d'Haïtiens vers leur pays que Donald Trump durant les quatre ans de sa présidence!
Du côté de l’Amérique latine, la Colombie est loin d’être le seul pays à recevoir des migrants haïtiens depuis le meurtre par un commando du chef de l’État haïtien dans sa résidence. À la mi-juillet, le secrétariat à l’Intérieur du Mexique (Secretaría de Gobernación, Segob) déclarait espérer ne pas recevoir plus de 100.000 migrants en provenance d’Haïti, de Cuba et du Nicaragua pour 2021, trois pays se débattant actuellement dans d’inextricables difficultés:
«La situation est tellement compliquée [en Haïti, ndlr] -le pays est en convulsion, tellement anarchique, il est pratiquement sans Parlement-, qu’il est clair que plus de gens pourraient venir», soulignait Andrés Ramírez Silva, coordinateur de la Commission mexicaine d’aide aux réfugiés (Comar).