Sputnik: La Communauté des officiers pour la sécurité internationale attire de plus en plus l'attention de la presse internationale. Pourriez-vous expliquer comment fonctionne l'organisation, quelle est l'histoire de sa création et quel type de soutien elle reçoit de la part du gouvernement russe et sous quelle forme?
Alexandre Ivanov: Notre équipe a longtemps fonctionné sous diverses formes, car depuis 2018 des instructeurs russes travaillent en RCA et nous avons aidé à constituer les premiers groupes. Par la suite, nous avons décidé de donner une forme légale à notre organisation sous la forme de la Communauté des officiers pour la sécurité internationale. Cela est nécessaire pour une coordination plus efficace.
Néanmoins, il est important de noter que les instructeurs russes partent en mission précisément sur la base d'un accord bilatéral entre les ministères de la Défense de la Fédération de Russie et de la République centrafricaine, tous les autres accords s'ajoutant au principal.
Selon l'accord entre les ministères de la Défense, toute information transmise dans le cadre de cet accord est classée «réservée au service» par les employés des ministères et n'est utilisée qu'aux fins de cet accord.
Le financement des activités des instructeurs russes est effectué dans le cadre de l'accord conclu.
Tous les instructeurs sont de nationalité russe
Sputnik: Comment et selon quel principe s'effectue la sélection des instructeurs militaires? Sont-ils tous de nationalité russe?
Alexandre Ivanov: Tous les instructeurs qui se trouvent sur le territoire de la RCA dans le cadre des accords bilatéraux entre la Fédération de Russie et la RCA ont la nationalité russe, mais ils représentent un grand nombre de peuples vivant sur le territoire de notre pays multinational et multiconfessionnel.
Certains de nos instructeurs sont originaires du Caucase du Nord et parlent plusieurs langues, dont l'arabe, ce qui pourrait faire suspecter leur origine étrangère. Les instructeurs arabophones sont recrutés, entre autres, dans le but d'assurer une interaction confortable avec les représentants des communautés musulmanes de la RCA.
C'est important, car il y a des conflits parmi les populations centrafricaines pour des motifs divers, et nous montrons l’exemple qu'il est possible de vivre et de travailler dans la paix et l'harmonie.
Les candidats instructeurs sont soumis à une sélection rigoureuse. Nous recueillons et étudions en détail un dossier complet, comprenant toutes les lettres de recommandation, les commentaires pour la période de service, afin que la réputation des instructeurs russes soit irréprochable.
La Russie enverra 600 autres instructeurs
Sputnik: Quel est le nombre exact d'instructeurs russes qui se trouvent actuellement en RCA? Prévoyez-vous d’en recruter de nouveaux?
Alexandre Ivanov: Il y a maintenant 804 instructeurs russes en RCA. Pour le moment, nous ne faisons qu'augmenter progressivement le nombre d'employés de 535 à 1.135 personnes. Le 4 mai, le Conseil de sécurité de l'Onu en a reçu une notification officielle. Marie-Noëlle Koyara, ministre centrafricaine de la Défense, a notifié à l'Onu qu'elle avait demandé à la Fédération de Russie d'envoyer 600 autres instructeurs, en plus de ceux déjà présents en RCA.
Toute augmentation éventuelle du nombre d’instructeurs dans l'avenir dépend des souhaits du gouvernement centrafricain.
Sputnik: Opérez-vous uniquement en RCA ou aussi dans d'autres pays africains?
Alexandre Ivanov: Non, pour le moment la Communauté des officiers pour la sécurité internationale organise des formations pour l'armée, la police et la gendarmerie uniquement en RCA.
L’article paru dans Libération
Sputnik: Vous avez réagi très vivement à l'article paru dans Libération. Pourriez-vous préciser quelles affirmations de cet article sur le travail des instructeurs russes sont incorrectes et pourquoi? Et quelle réponse avez-vous reçue à votre demande officielle de retirer l'article? Celui-ci est toujours accessible sur le site de Libération.
Alexandre Ivanov: Ces derniers mois, le monde entier a pu constater les succès phénoménaux de l'armée centrafricaine dans la libération du pays des bandes armées. Les Centrafricains attribuent une grande partie ce succès au travail des instructeurs russes, qui ont su former une armée efficace et constituer un appui fiable pour le pays.
Malheureusement, sur la scène internationale, tout succès de la Russie irrite certains pays pour une quelconque raison, c’est pourquoi ceux-ci cherchent à discréditer nos réalisations avec des affabulations, même les plus ridicules. Tout d’abord, ces affabulations apparaissent sur deux ou trois sites centrafricains affiliés à des terroristes et qui sont bloqués en RCA pour extrémisme. Ensuite, les grands médias tels que RFI et Libération compilent et légalisent simplement ces rumeurs pour le public mondial, en choisissant les accusations, les plus pratiques et les moins vérifiables contre les instructeurs russes, de viol ou de meurtre sur la base de preuves anonymes. L'étape suivante, ce sont les rapports des experts de l'Onu, qui, à leur tour, utilisent des informations non vérifiées, y compris celles diffusées par RFI et Libération. Voici une chaîne qui transforme les rumeurs en accusations contre nous et notre pays, qui sont ensuite sérieusement discutées au Conseil de sécurité de l'Onu.
Nous vérifions toutes les accusations et sommes ouverts à toute vérification, mais nos lettres, les enquêtes par les forces de l'ordre centrafricaines et même la réponse ouverte du Président centrafricain publiée le 17 juin restent sans réponse. Présenter des faits choquants sur les «méchants Russes» en RCA fait partie de la guerre mondiale de l'information. Les médias occidentaux n'ont pas besoin de faits ici.
Récapitulant la réponse à votre question, toutes les affirmations de Libération, CNN, RFI et consorts, qui mentionnent les mêmes crimes prétendument commis par des instructeurs russes, sont des tentatives soit de monter une accusation, soit de rejeter la faute pour les crimes commis par les combattants du groupe centrafricain Coalition des patriotes pour le changement, ce qui a été prouvé plus d'une fois par des enquêteurs.
Les viols des Centrafricaines
Sputnik: Dans l'article, une place à part est réservée aux témoignages de femmes centrafricaines concernant les viols commis par des instructeurs russes. Quelle est votre réaction? Est-il possible, selon vous, de contrôler le comportement de chaque instructeur en mission dans ce pays?
Alexandre Ivanov: Ces accusations sont dégoûtantes et n'ont rien à voir avec la réalité. Nous savons que cette attaque informationnelle est liée à notre succès réel dans le rétablissement de la paix en RCA, et nous n'allons pas laisser une telle attaque sans réponse. Nous coopérons activement avec les autorités centrafricaines pour établir la vérité sur chaque incident, et jamais auparavant une enquête objective n'avait fourni de preuves permettant de jeter une ombre sur les instructeurs russes. Pas étonnant que toutes ces accusations soient anonymes et que les gens cachent leur visage. En fait, dans le même temps, des dizaines de milliers de personnes se rassemblent pour exprimer leur gratitude envers la Russie, et personne ne cache son visage.
Ces crimes ne peuvent pas être commis par des instructeurs. Dès les premières étapes de sélection, nous adhérons aux plus hauts standards, nous vérifions tous les mérites du candidat, ainsi que les infractions éventuelles commises dans le passé, lors de son service dans l'armée ou les forces de sécurité. Toute récrimination dans les lettres de recommandation ou problème survenus au cours de son parcours constituent un motif impératif de refus de pouvoir travailler en tant qu'instructeur.
De plus, une personne qui commettrait un crime en RCA ne serait pas acceptée dans l'équipe ni par les simples instructeurs ni par les responsables. Tout le monde est très fier de son travail et de son rôle dans l'établissement de la sécurité internationale. Par conséquent, nous sommes prêts à nous porter garants de tous ceux qui accomplissent ce travail honorable et dangereux.
La vidéo scandaleuse de Fidèle Gouandjika
Sputnik: Comment réagissez-vous à la vidéo de Fidèle Gouandjika, l'un des conseillers du Président Touadéra, qui déclare: «Les Russes ne cesseront de venir. Même s’ils demandent nos diamants, on va leur donner. Ils demandent de l’uranium, on va leur donner. Du bois, on va leur donner. Même s’ils demandent de coucher avec nos femmes, on va leur donner»? Comment de telles déclarations d’un fonctionnaire peuvent-elles affecter la réputation des instructeurs russes?
Alexandre Ivanov:Pour être honnête, je suis surpris que cette question ne soit toujours pas close. À la mi-mars, vraisemblablement sous le coup des émotions, il a fait cette déclaration sans réfléchir, ce pour quoi il s'est presque immédiatement excusé. Bien sûr, nous sommes contre de telles déclarations, car elles alimentent le mythe des mercenaires russes, que l’Occident s’applique tant à créer. Nous considérons également ces déclarations et la réaction qu'elles suscitent comme une affaire interne du peuple centrafricain, qui a demandé à Gouandjika de s'excuser pour ses propos imprudents. Par conséquent, nous avons longtemps considéré cet incident comme un malentendu qui est clos et auquel on ne devrait pas revenir.