«Une immense victoire pour les consommateurs, les travailleurs et les PME.» C’est ainsi que s’est exprimé sur Twitter le Démocrate David Cicilline, président de la sous-commission sur l’antitrust aux États-Unis. Au terme d’une session de plus de trente heures, qui s’est terminée le 24 juin, une commission parlementaire américaine a approuvé une série de projets de loi visant à imposer de nouvelles règles aux GAFAM (Google, Apple, Facebook, Amazon, Microsoft).
Concrètement, le texte vise à encadrer les méthodes de commercialisation des produits distribués par les firmes de «Big Tech». Amazon, par exemple, commercialise ses propres produits sur son site de commerce en ligne, où elle fixe aussi les règles pour les autres entreprises qui y vendent des biens. Idem pour Apple avec l’App Store, ce service d’applications incontournable pour les utilisateurs d’iPhone et les éditeurs d’applis. Une position dominante et monopolistique que le législateur américain entend donc réguler.
«Ce double rôle des plates-formes dominantes crée des conflits d’intérêts irréconciliables et le projet de loi résoudrait le problème en les obligeant à choisir entre être une plate-forme ou commercialiser des produits et services sur une plate-forme», a expliqué le démocrate David Cicillin.
Mais le projet de loi ne s’arrête pas là, puisqu’il prévoit également le démantèlement des empires de la Tech si les règles de la concurrence s’avéraient faussées.
Vers une fin du monopole des GAFAM?
«Amazon, Apple, Facebook et Google sont les gardiens de l’économie en ligne. Ils enterrent ou achètent leurs concurrents», a martelé David Cicilline.
Parallèlement, l’un des volets du projet de loi envisage d’imposer la «portabilité» des données et «l’interopérabilité» des services. Derrière ces deux termes barbares se cache une réalité toute simple: la difficulté pour les utilisateurs des réseaux sociaux de retirer des contenus privés des plates-formes en ligne. Principal visé: Facebook, bien souvent épinglé en matière de sécurité des données personnelles. Les utilisateurs de Facebook pourraient alors plus facilement quitter le réseau social, emportant avec eux leurs contacts et leurs infos personnelles. «Si vous ne pouvez pas déplacer vos informations, vous êtes prisonnier de la plate-forme», a ainsi argumenté la démocrate Zoe Lofgren. En janvier dernier, WhatsApp créait la polémique en annonçant changer ses conditions d’utilisation pour ouvrir ses données à Facebook.
Lobbying de la Silicon Valley pour faire annuler le texte?
Le projet de loi du Congrès américain est ainsi le fruit de 15 mois d’enquêtes et d’auditions sur les pouvoirs accumulés par les GAFAM, sur fond de rivalité croissante entre la souveraineté des États et le monopole des géants de la Tech. Mais la messe est loin d’être dite pour ces derniers. Une fois adoptées au niveau de la commission judiciaire, les propositions de loi devront passer par la Chambre des représentants, à majorité Démocrate, puis par le Sénat, où leur sort est plus incertain. Surtout, tout porte à croire que les grandes firmes de la Silicon Valley mèneront un intense lobbying afin de rendre caduques les dispositions prises par le législateur américain.
La bataille rangée entre l’État américain et les GAFAM ne fait, semble-t-il, que commencer.