Hommes, femmes, même coupe mais à un prix différent: la plupart des salons de coiffure appliquent la «taxe rose», dénonce la coiffeuse indépendante Laura qui prône une politique tarifaire non genrée, établie en fonction du travail réalisé.
En tant que co-fondatrice et membre du collectif Coiffure en lutte, elle trouve plus logique «d'appliquer un tarif au temps passé» et non au genre de la personne.
«Cela nous semble illogique que pour la même coupe une femme devrait payer plus cher qu'un homme. La coiffure est un milieu artistique, nous souhaitons que les tarifs restent libres mais qu'ils soient étudiés sur la longueur des cheveux et/ou la durée de la prestation», explique la coiffeuse dans un entretien à Sputnik.
«Les formations pour coiffer les hommes étaient dissociées de celles pour coiffer les femmes, de plus les hommes fréquentaient les salons tous les 15 jours afin de tailler leurs barbes et rafraîchir leurs coupes».
Le président de l’Union nationale des entreprises de coiffure (UNEC), Christophe Doré, confirme au Parisien «avoir toujours connu cette différenciation tarifaire» et soutient l’idée d’établir le prix en fonction du temps consacré.
Durée et complexité
En moyenne, le délai constaté en salon c’est d’exécuter une coupe avec séchage en 30 minutes, que ce soit un homme ou une femme, indique Laura. Pour autant, le calcul du temps varie d’un salon à l’autre: «Certains salons prendront des clients-es toutes les 15 minutes, quant à d'autres, [ils prendront un client] toutes les heures, je parle ici de coupe uniquement, pour les autres services techniques (lissages, chignons...), les temps de prestations sont bien sûr différents».
Ainsi, «la durée va dépendre de la complexité de la coupe, un dégradé à blanc sur cheveux court est très technique alors qu'un rafraîchissement d'un dégradé homme classique ou bien même un coupe de pointes va demander moins de temps», précise cette coiffeuse des Hauts-de-Seine qui a travaillé pendant 14 ans en salon.
La situation est d’ailleurs compliquée pour les cheveux crépus, bouclés et frisés qui doivent aussi être pris en charge.
«Aujourd'hui certains salons refusent de coiffer les cheveux non caucasiens principalement par manque de formation. Les cheveux non-lisses ne sont pas considérés comme la norme et sont ainsi exclus des formations professionnelles», constate-t-elle.
Confort et accessibilité
Une expérience désagréable lors d’une visite en salon peut étouffer tout désir de recourir encore à ces services. Ainsi, une tâche majeure qu’assume Laura consiste en «respect de l'identité de chacun-une», y compris les personnes non binaires, trans et en transition, ainsi qu’une vaste catégorie des individus à mobilité réduite, ayant des problèmes de cheveux ou des particularités mentales.
Coiffure en lutte, qui regroupe coiffeurs et clients, aspire à ce que ces personnes «soient juste considérées comme n'importe quels clients-es et reçues avec sympathie et bienveillance».
Pour y parvenir, le but du collectif est de «sensibiliser les coiffeurs-euses sur les particularités des cheveux et du cuir chevelu (comme l'alopécie, le psoriasis…) afin d'éviter les remarques et le manque de tact».
La question du traitement respectueux dépassée, se pose celle des moyens dont disposent les salons. Laura souhaite «que les espaces dans les salons de coiffure soient revus, nous notons un manque d'accessibilité pour les personnes à mobilité réduite (mobiliers adaptés, rampe d'accès, toilettes…), mais aussi pour les personnes grosses (mobiliers inadaptés), ce qui leur donne un accès limité pour un service du quotidien qu'est la coiffure».
Ce qui peut en outre rendre l'interaction avec les professionnels de la coiffure compliquée c’est «le manque d'intimité, le bruit peuvent être extrêmement contraignant pour les personnes hypersensibles, neuroatypiques, autistes, cela va engendrer un stress important», note la coiffeuse.
Son grand espoir est que les codes de la coiffure évoluent «vers une liberté, une diversité et une inclusivité de tous les types de clients-es et collaborateurs-ices».