«Aujourd’hui, on est face à un tout autre type d’agression qui est purement raciste et qui n’a plus aucun motif crapuleux. On a une vraie évolution en intensité et en quantité.»
Sacha Lin-Jung, cofondateur de l’Association des jeunes Chinois de France (AJCF) et également vice-président de l’Association des Chinois résidant en France (ACRF), n’a aucun doute: «La crise du Covid a démultiplié les actes et les propos racistes d’une manière jamais vue en Occident.»
En France, le procès de cinq étudiants s’est ouvert le 23 mars dernier au tribunal judiciaire de Paris après une campagne de haine sur Twitter et d’appels au meurtre lancée en octobre 2020.
Autant d’éléments qui ont poussé l’Association des jeunes Chinois de France à lancer une campagne de sensibilisation «Nous sommes d’ici!» pour témoigner son soutien au mouvement #StopAsianHate, mais également afin de permettre à la communauté française de s’exprimer.
Il faut dire qu’il y a urgence, comme le rappelle Sacha Lin-Jung, «il y a des gens qui se font agresser, insulter de manière très violente pour aucune autre raison que leur apparence asiatique». Selon une étude menée par la sociologue Simeng Wang, le racisme anti-asiatique est exacerbé dans les transports, les lieux publics, au travail ou à l’école. Ainsi, un peu plus de 41% des 255 personnes sondées ont souffert de discrimination ethnique dans les transports. 35% d’entre elles ont remarqué une discrimination similaire dans les espaces publics et 14,5% dans des espaces publics fermés tels que les cafés et les restaurants.
Le traitement médiatique de la Chine en question
Le vice-président de l’ACRF confirme que ses adhérents lui font part d’actes qui vont de «l’éloignement social dans l’espace public à des regards durs» et qui peuvent déboucher sur des «agressions pures et simples, qui nécessitent des jours d’ITT et des soins médicaux», détaille-t-il.
«C’est une espèce de défouloir pour des gens qui souffrent de la crise sanitaire, économique et sociale et qui ont trouvé dans les personnes asiatiques des coupables à blâmer.»
Face à cette recrudescence de xénophobie, le 24 mars dernier, Élisabeth Moreno, ministre délégué à l’Égalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Égalité des chances, s’est entretenue avec des associations engagées contre le racisme anti-asiatique afin de rappeler l’engagement du gouvernement à lutter contre «toutes les formes de discrimination». En outre, les travaux concernant le futur Plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme ont également été lancés en mars dernier.
Pour Sacha Lin-Jung, afin d’éradiquer ce phénomène, il faut aller au-delà du «Éducation, prévention, sensibilisation et répression» car la xénophobie envers les Asiatiques, mais plus particulièrement les Chinois, n’est pas nouvelle. Selon lui, elle est entretenue par une partie des médias.
«Il y a une responsabilité des lignes éditoriales qui alimentent un sentiment négatif à l’égard, disent-ils, du gouvernement chinois, mais qui immanquablement provoquent un sentiment négatif, non pas seulement contre le gouvernement chinois mais envers toute la population chinoise», avance le cofondateur de l’Association des jeunes Chinois de France.
Pour l’heure, le fait que Donald Trump ait parlé de «virus chinois» aura, selon lui, justifié «dans l’inconscient collectif de pouvoir accuser la Chine de l’épidémie». Le Président américain avait notamment lancé, en septembre dernier à l’occasion de l'assemblée générale de l'ONU, que «les Nations unies doivent tenir la Chine pour responsable de ses actes» au début du Covid-19 et pour avoir «lâché cette plaie à travers le monde».