Un nouveau Premier ministre en Libye: «Ça a surpris tout le monde»

Dix ans après le déclenchement de la guerre civile en Libye, un nouveau chef du gouvernement par intérim a été désigné. À défaut de victoire militaire claire, qui a gagné les hostilités sur le plan politique? Décryptage de Michel Scarbonchi, ancien député européen et consultant international, pour le Désordre mondial.
Sputnik

La guerre civile en Libye est-elle enfin terminée? Le cessez-le-feu mis en place en octobre dernier entre le gouvernement soutenu par l’Onu et les forces du maréchal Khalifa Haftar –le général américano-libyen à la tête de l’Armée nationale libyenne basé à Tobrouk, soutenu par la Chambre des représentants libyenne élue– semble avoir ouvert la voie à une solution politique. Mais tiendra-t-elle dans la durée?

La Libye a un nouveau Premier ministre par intérim, Abdel Dbeibah, choisi par 75 délégués à travers un processus supervisé par l’Onu. Pourquoi ce choix a-t-il surpris certains observateurs? Qui est-il précisément? Et pourquoi n’a-t-il pas encore nommé de gouvernement de transition, ce qu’il était censé avoir fait fin février?

Libye: «Décrédibilisée, la France essaie de revenir par la petite porte»

Le 22 février dernier, le ministre de l’Intérieur soutenu par l’Onu, qui était le grand favori de la presse internationale au poste de Premier ministre par intérim, a échappé à une tentative d’assassinat dans les faubourgs de Tripoli. Qui pouvait vouloir sa mort? Que se passe-t-il vraiment dans les coulisses en Libye? 

Michel Scarbonchi, ancien député européen et consultant international, dresse le tableau de la situation politique du pays:

«La Libye actuelle est en convalescence. Le nouveau pouvoir politique a été mis en place par le forum du dialogue. À la surprise générale, en nommant un homme de Benghazi président du Conseil présidentiel, puis un Premier ministre issu de Misrata –par ailleurs ancien proche de Mouammar Kadhafi–, tout le monde a été surpris. Mais en même temps, comme le maréchal Haftar a adoubé ce nouveau tandem pour diriger la Libye, on ne peut être qu’optimiste.»

Qu’est-ce qui pourrait porter atteinte à ce premier pas vers une résolution politique? Michel Scarbonchi explique en quoi ce début de règlement de la crise est fragile:

«Il y a des gens qui ont tout intérêt à voir le chaos se maintenir. Ces personnes sont contre cet accord, car elles tirent leur fortune et leur richesse de la débâcle qui règne en Libye depuis près de dix ans. Les milices de Tripoli ne vivent que des vagues migratoires, de différents trafics de drogue d’essence, d’argent, d’êtres humains […] Elles n’ont pas intérêt à ce que le pays retrouve la paix parce que cela mettrait fin à leur business.»

Après dix années de conflit et de guerre civile –déclenchés avec une participation occidentale, y compris française–, quel bilan peut-on faire de la situation? L’ancien député européen ne mâche pas ses mots:

«Le bilan de cette guerre est totalement épouvantable quand on constate le nombre de morts, de blessés, de mutilés, la destruction d’un pays qui était le plus florissant du monde arabe et de l’Afrique.»
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