Coup de tonnerre dans le ciel médiatique: un reconfinement n’était sans doute pas nécessaire!
Chiffres et graphiques à l’appui, une journaliste de LCI a dévoilé une information cruciale: au moment du confinement et des annonces du Président, prévisions du nombre de morts apocalyptiques à l’appui, la décrue de la «deuxième vague» était déjà amorcée. Pire même, en Île-de-France, la baisse de la présence du SARS-CoV2 dans les eaux usées avait été détectée dès le 17 octobre, soit à quelques heures de l’entrée en vigueur du couvre-feu, qui a pris effet à cette date à minuit.
Observée de près par Eau de Paris (l’opérateur public chargé de la production et de la distribution de l’eau dans la capitale) et les chercheurs de l’Observatoire épidémiologique dans les eaux usées (Obépine), la quantification du génome viral permet-il d’évaluer et même de prédire la dynamique de l’épidémie avec plus de précision que d’autres indicateurs? Au micro de Sputnik, Vincent Maréchal, Professeur et directeur de l’UFR Sciences de la Vie Paris Faculté des Sciences et Ingénierie de la Sorbonne, prône un «discours modéré», mais dévoile la fiabilité de ses méthodes de veille.
Eaux usées: un signal d’alarme précoce sur l’évolution du Covid-19
150 stations d’épuration de France sont surveillées par des scientifiques pour quantifier le génome viral dans les eaux usées. Dès le mois de mars, ils constataient «une très bonne corrélation entre la quantité du virus dans les eaux usées et la circulation du virus.»
«On a commencé par démontrer que c’était un très bon indicateur de circulation du virus. Ainsi, lorsqu’on a mis le pays sous confinement, on a très vite vu la diminution de masses de virus dans les eaux usées», explique le professeur Vincent Marechal.
«Nous, on a vu apparaître la deuxième vague très tôt dans les eaux usées. C’est un outil qui marche bien», signale Vincent Maréchal.
L’observation a montré que la charge virale n’a cessé d’augmenter pendant tout l’été, jusqu’à ce qu’apparaissent en septembre «d’autres marqueurs épidémiologiques, notamment le taux d’hospitalisation, le taux d’entrée en réanimation.» À partir du 2 novembre, en Île-de-France, la diminution du virus dans les eaux usées a de nouveau été observée, peut-être en raison «du couvre-feu et des vacances scolaires», avance le professeur Maréchal.
Mais pourquoi n’y prête-t-on pas assez attention?
Les scientifiques peinent à se faire entendre
Loin du battage médiatique, les scientifiques n’ont pourtant pas perdu de temps pour tirer des leçons de la première vague de l’épidémie. Une étude intitulée «Évaluation de l’impact du confinement sur la dynamique du SARS-CoV-2 grâce à la quantification du génome viral dans les eaux usées de Paris» a été publiée dès le 12 avril 2020 sur la plateforme MedRxiv. Même si le sous-titre mentionne que l’article «fait état de nouvelles recherches médicales», non évaluées et qui ne devraient donc «pas être utilisées pour guider la pratique clinique», la méthode semblait fiable.
Et pourtant…
«Pour les gens de l’exécutif qui doivent prendre des décisions, il était difficile de comprendre que cet indicateur voulait dire quelque chose. On était peu nombreux à travailler sur la question. Et avant de prendre une décision, les politiques ont besoin d’être sûrs que les indicateurs soient de qualité. Attitude raisonnable, quand même», temporise Vincent Maréchal.
Au début de l’automne, «il n’y avait pas d’autres signes que les eaux usées.» Or, le Professeur Maréchal admet qu’un reconfinement reposant sur un tel argument n’aurait pas été accepté par l’opinion. La tâche n’était pas facile pour la science fondamentale: il faut être «à la fois» en capacité de pouvoir convaincre les scientifiques, les médecins, les politiques que c’est un indicateur intéressant et de dire «attention, le virus circule».
Aussi souligne-t-il également la vigilance trop lâche quant à «l’isolement des cas positifs».
«On a beaucoup testé, mais on n’a pas assez isolé, ou n’a pas assez vérifié que les gens s’isolaient ou étaient testés trop tard. Et les gens ont eu le temps de contaminer autour d’eux», souligne le virologue.
Si elle ne saurait garantir la guérison des malades, une surveillance quantitative des génomes du SARS-CoV-2 dans les eaux usées apparaît au moins comme un outil bon marché et non invasif pour prévenir les épidémies.