Les Canadiens auront suivi de très près les événements liés à la mort de George Floyd chez leurs voisins américains. Comme dans de nombreux autres pays, le débat sur le racisme est reparti de plus belle au Canada.
«Quand je vois toute cette mobilisation-là autour de la communauté noire, je me dis: tant mieux! […] Mais une femme autochtone a été abattue par des policiers à Edmundston. Est-ce qu’on va avoir la même mobilisation? Est-ce qu’il va y avoir une mobilisation artistique, politique, sociale et culturelle autour de ce décès-là? Non, on ne l’aura pas. Je marche à côté de mes frères et sœurs de la communauté noire, mais je sais qu’on n’aura pas le même traitement. C’est ça qui me fait de la peine, qui me choque», a déclaré l’ex-commissaire à La Presse.
Au Canada, la mort de George Floyd a brutalement mis fin à plusieurs semaines durant lesquelles la crise du Covid-19 a occupé une place centrale dans les médias. Mais la relance du débat sur le racisme survient aussi dans un contexte où huit personnes amérindiennes ont été abattues en l’espace de trois mois lors d’interventions policières.
Des Autochtones abattus par la police lors d’interventions musclées
Pas moins de 17 rapports officiels portant sur les relations difficiles entre les services de police (fédéraux, provinciaux et municipaux compris) et les Autochtones ont été déposé depuis les années 1960.
«Les Autochtones sont terrifiés par la police, car lorsque nous appelons à l’aide, ils nous viennent rarement en aide ou lorsqu’ils viennent, ils appliquent une force excessive, y compris, bien trop souvent, une force mortelle», dénoncent quatre importants leaders autochtones dans une lettre adressée à Marc Miller, ministre fédéral des Services aux Autochtones.
«Le gouvernement du Canada reconnaît que les peuples et les communautés autochtones s’affrontent toujours à des obstacles systémiques au Canada. De plus, le racisme auquel ils font face prend souvent la forme d’interactions avec les services policiers. Nous travaillons assidument pour rendre nos systèmes plus justes et nous avons pris des mesures dans la bonne direction. Nous savons également qu’il reste beaucoup de travail», a plaidé M. Malik au micro de Sputnik.
Un rapport déposé le 3 juin dernier à la Ville de Montréal conclut que la vision négative de la police des personnes autochtones contribue à nourrir la méfiance de ces dernières et nuit particulièrement aux femmes issues des Premières Nations. À l’instar de plusieurs rapports publiés récemment au Canada, celui-ci pointe également les liens supposés entre les «pratiques coloniales» des différents paliers de gouvernement et le «racisme systémique».
Profilage racial: la «colonisation» toujours au centre du débat
«L’historique de ces interactions négatives entre les forces policières et les femmes autochtones contribue à nourrir leur situation de vulnérabilité, d’autant plus qu’elles ont peur de porter plainte», peut-on lire à la page 76 du document intitulé «Racisme et discrimination systémique dans les compétences de la Ville de Montréal».
Le 12 juin dernier, la Gendarmerie royale du Canada (GRC) –plus haut corps de police au pays– a reconnu officiellement l’existence du «racisme systémique» dans ses propres rangs. La veille, Brenda Lucki, la commissaire à la tête de la GRC, avait affirmé qu’il valait mieux parler de «préjugés inconscients», mais s’est rétractée le lendemain après avoir été recadrée par le Premier ministre Justin Trudeau.
«Nous travaillons avec les peuples Inuits, métis et des Premières Nations, ainsi qu’avec des partenaires municipaux, provinciaux et territoriaux afin de répondre aux appels à la justice de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées, y compris les appels liés à la police. […] Sécurité publique Canada a financé un examen des politiques et des pratiques policières afin de déterminer les lacunes et les défis liés à la prestation de services culturellement compétents», précise à Sputnik le porte-parole du ministère de la Sécurité publique.