Malgré un timide début de déconfinement, les Québécois sont encore loin de pouvoir tourner la page de la crise du Covid-19.
«Je suis député de Montréal. Je suis très inquiet pour les citoyens à Montréal comme je suis inquiet pour les gens à travers le pays», a déclaré Justin Trudeau, Premier ministre fédéral, lors de son point de presse quotidien du 9 mai.
Le 27 avril, François Legault, Premier ministre québécois, a présenté à ses administrés un premier plan de déconfinement graduel. Les écoles primaires et les crèches sont actuellement ouvertes à nouveau partout au Québec, à l’exception de celles de la grande région de Montréal, où le virus continue de se propager rapidement.
Montréal, épicentre canadien du Covid-19
Le 30 avril, trois jours après avoir présenté son premier plan, François Legault évoquait déjà la possibilité que le déconfinement soit reporté à Montréal. «Si la situation se détériore, il n’y aura pas d’ouverture à Montréal. Puis je n’hésiterai pas, là, je n’irai pas prendre de risques», a-t-il averti.
Parmi ces organismes se trouve l’Institut national de santé publique du Québec, lequel vient de publier une étude faisant craindre pour la sécurité des citoyens de la grande région montréalaise en cas de déconfinement. Selon ses résultats tirés de ce scénario, une moyenne de 150 personnes pourraient mourir chaque jour en juillet de complications dues au Covid-19.
Déconfinement: des projections très pessimistes pour Montréal
Ces perspectives semblent avoir été prises au sérieux par l’ensemble de la classe politique québécoise, à commencer par le maire de Montréal, Valérie Plante, qui a favorablement accueilli le dernier report de la levée des mesures.
«Ces chiffres [de l’Institut national de santé publique, ndlr] […], c’est l’élément le plus fiable dont le Québec dispose. Ils sont incontestables. Et ce que les chiffres nous disent en ce moment, c’est qu’en région, on peut déconfiner, mais pas à Montréal», a quant à lui souligné Gaétan Barrette, ministre de la Santé du Québec de 2014 à 2018.
Ces dernières semaines, plusieurs scandales de négligences envers des personnes âgées ont éclaté, alors que de nombreux centres d’hébergement pour aînés non-automnes ont été gravement touchés par la pandémie. Selon certains experts, des résidents de ces centres sont morts de faim et de soif en raison du manque de ressources et de personnel. François Legault a même dû demander à Ottawa de faire intervenir les forces armées canadiennes dans les résidences affectées.
Dans ce contexte difficile, la perspective d’un déconfinement pénible et risqué à Montréal semble avoir fait tourner le vent d’optimisme qui soufflait sur le Québec dans les premiers temps de la pandémie. Devenu emblématique de la crise, le slogan «ça va bien aller», affiché par de nombreux Québécois à leurs balcons et fenêtres a même commencé à faire l’objet de critiques, signe de ce changement d’atmosphère.
«Ça va bien aller»: un slogan qui ne fait plus consensus
Récemment, le célèbre chroniqueur Patrick Lagacé a évoqué dans La Presse une «overdose d’arcs-en-ciel», ce symbole coloré qui accompagne le slogan, tel un logo.
«Le Québec est l’épicentre de la pandémie canadienne de coronavirus. Montréal est une “anomalie tragique” dans un pays qui commence à aplatir sa courbe d’infections, selon les mots du Globe and Mail. Chaque jour, nous sommes les champions canadiens des nouvelles infections», déplorait-il le 7 mai.
«Ça va bien aller. C’est ce qu’on nous répète ad nauseam […] Ça ne va pas si bien aller tout le temps. On ne peut pas toujours avoir la tête en forme d’arc-en-ciel», tranchait de son côté Geneviève Pettersen, chroniqueuse au Journal de Montréal.
Au soir du 10 mai, 2.928 personnes étaient décédées au Québec de complications dues au coronavirus. La grande majorité des victimes sont des résidents de centres d’hébergement pour personnes âgées non-autonomes.