Depuis le 2 mars dernier, date du premier cas déclaré de coronavirus, le Maroc voit son tourisme s'effondrer. Non seulement les frontières sont fermées mais de toute façon, les pays qui drainent généralement les vacanciers vers le Maroc, sont confinés (Italie, France et Espagne). Le Conseil national du tourisme a indiqué, ce 17 mars, que dès le mois d’avril, le Maroc ne verra plus un seul touriste sur son territoire.
Pour un pays qui a enregistré en 2019 près de 13 millions de visiteurs, le choc sera rude.
Tourisme au point mort
Un constat partagé par Lahcen Haddad, député et ancien ministre du Tourisme, interrogé par Sputnik: «Il n'y a aucun avion, dans certains hôtels on trouve à peine deux chambres occupées, aucun restaurant n'est ouvert ni aucune boîte de nuit. On n’a jamais vu ça», observe-t-il en faisant allusion aux mesures drastiques prises par le gouvernement, depuis quelques jours, afin de limiter la propagation du Covid-19.
Le Conseil national du tourisme estime que le Maroc devrait s’attendre à une chute globale de près de 6 millions de touristes (-98%), qui occasionneront une perte totale de 11,6 millions de nuitées pour les trois mois à venir (-80%).
«De son côté, la Confédération nationale du tourisme précise que le manque à gagner pourrait s’élever à plus de 50 milliards de dirhams (4 milliards d’euros) pour le secteur, dont seulement 13 milliards de dirhams (1,3 milliards d’euros) devraient incomber à la filière de l’hôtellerie. Le tout en sachant que les recettes du tourisme s’élèvent normalement à près de 76 milliards de dirhams (7,1 milliards d’euros)», mentionne Moez Kacem.
L'universitaire précise «qu’il y a des défis à court terme, notamment concernant les moyennes et petites entreprises» qui ne pourront pas tenir le coup durant la crise à venir. Pour le Conseil national du tourisme, pas moins de 9.000 entités seraient menacées, dont des entreprises d'hébergement touristiques classées, des entreprises de restauration touristique, des agences de voyages, des sociétés de transport touristique et des sociétés de location de voitures.
«Personne ne peut dire ce qu’il en sera, mais ça dépend également de la situation dans les autres pays. Il faut qu’ils s’en sortent, même chose ici», prévient de son côté l’ancien ministre du Tourisme Lahcen Haddad.
Des solutions énergiques attendues
En guise de solutions, les professionnels du tourisme attendent un soutien sans faille de l’État. Le 15 mars, un communiqué du cabinet royal annonçait la création d’un fonds spécial dédié à la lutte contre la pandémie du coronavirus. Parmi les fonctions de ce fonds, en plus de couvrir les dépenses pour les infrastructures sanitaires, il sera également question de couvrir les différents secteurs touchés par la crise économique provoquée par le Coronavirus.
«Ce matin, j’ai demandé au chef du gouvernement s’il était possible de louer les hôtels. On pourrait les transformer en centres de confinement, de quarantaine ou de santé. De cette façon, on pourrait à la fois les maintenir en activité et avoir une capacité importante en matière de lits pour les victimes du coronavirus», fait savoir Lahcen Haddad.
Comment financer ces locations? L’ancien ministre du Tourisme répond que l’État doit intervenir de façon énergique. Le Maroc n’est pas le seul à opter pour cette approche. «Les autres pays concurrents du Maroc au niveau touristique ont choisi également d’intervenir pour sauver le tourisme, notamment en Tunisie et en Égypte», précise pour sa part Moez Kacem.
«Ce qui est certain, c’est que nous aurons des retentissements négatifs en 2020 et en 2021», avertit Lahcen Haddad.
En attendant, le Maroc, comme la plupart des pays, continue de vivre son lockdown avec des villes touristiques comme Marrakech complètement à l’arrêt. «On n’a jamais connu notre ville comme ça. Même durant le ramadan, on retrouve encore des touristes. On ne sait plus quoi faire», nous confie, désespéré, un habitant de la ville ocre qui travaille dans le secteur de la location de voitures.