Les Canadiens se préparent plus que jamais à affronter le coronavirus, cet invisible danger qui sème de plus en plus la peur et la panique parmi eux.
Entre le 28 janvier et le 15 mars derniers, le nombre de cas recensés est passé d’un seul à 325 au pays de l’érable. C’est l’Ontario qui est la plus touchée depuis le début de la crise: province la plus peuplée (15 millions d’habitants), elle comptait dans la soirée du 15 mars 146 cas à elle seule, comparativement aux 39 cas recensés au Québec (8 millions de résidents).
«Tous les voyageurs doivent prendre la précaution de s’isoler pour deux semaines. Les gens doivent éviter les rassemblements, augmenter leur espace physique par rapport aux autres et travailler à domicile si c’est possible. […] Nous devons agir maintenant», a déclaré Theresa Tam, administratrice en chef de la santé publique du Canada, à la conférence de presse du 15 mars à laquelle Sputnik a assisté.
Mme Tam estime que «la marge de manœuvre est étroite pour aplanir la courbe» du COVID-19 et que celui-ci représente maintenant «une grave menace pour la santé publique».
Un constat qui ne vient pas trop tôt selon de nombreux citoyens et observateurs, pour qui le Premier ministre Trudeau aurait dû depuis longtemps interdire les vols en provenance des pays les plus touchés.
Covid-19: «une grave menace pour la santé publique»
Les appareils en provenance de Chine, d’Italie et d’Iran peuvent toujours se poser en territoire canadien, mais leurs passagers sont priés de se mettre en quarantaine durant 14 jours, sur une base volontaire.
«Pour le moment, les études scientifiques indiquent que les pays qui ont mis en place des mesures d’interdiction de voyage n’ont pas réussi à prévenir la propagation du virus», s’est justifiée l’administratrice en chef de la santé publique durant le même point de presse à Ottawa.
«Concernant nos frontières, j’ai encore parlé à M. Trudeau hier. On a un différend. Il faut faire la distinction entre les marchandises puis les personnes. C’est important que les médicaments, la nourriture continuent d’entrer. Par contre, là où on a un différend, c’est que moi, je continue de penser que ce n’est pas une bonne idée de continuer à recevoir des touristes étrangers», a plaidé M. Legault.
Entretenant pourtant de très bonnes relations avec le gouvernement Trudeau, la direction de la Ville de Montréal montre aussi des signes d’impatience devant cette situation jugée très dangereuse.
Selon Radio Canada, les autorités politiques et sanitaires de Montréal sont consternées devant «l’inaction» d’Ottawa à l’aéroport Pierre-Elliott-Trudeau, aéroport de la métropole portant le nom du père du Premier ministre.
La ville de Montréal «consternée» par le manque de contrôle aux aéroports
Ces derniers jours, des reportages ont effectivement fait état d’une situation où presque aucun contrôle n’est fait auprès des passagers pour assurer la sécurité du pays. Toutefois, au matin du 16 mars, Ottawa n’écartait pas totalement l’idée de limiter l’atterrissage des vols internationaux à quatre aéroports: Montréal, Toronto, Calgary et Vancouver.
«On veut forcer le fédéral à prendre ses responsabilités», ont déclaré deux sources proches de Valérie Plante, maire de la métropole québécoise.
Selon un médecin généraliste pratiquant à Gaspé, ville de l’Est du Québec, la situation est appelée à s’empirer dans les prochains jours. Chargé entre autres de contrer la propagation du virus dans sa région d’assignation, le médecin met en garde contre un éventuel manque de ressources:
«Au Québec, François Legault a une bonne attitude, mais ça décolle au même rythme qu’en Italie. Nous avons commencé les démarches en retard... On n’a pas réussi à freiner la progression suffisamment et les gens ne comprennent rien à la quarantaine... […] Il faut insister sur l’importance de respecter les mesures de distance sociale et de quarantaine», insiste le médecin ayant gardé l’anonymat.
Le 12 mars, Québec avait déjà annoncé qu’il interdisait les événements en milieu clos de plus de 250 personnes et obligé ses fonctionnaires à se mettre en quarantaine pour 14 jours en revenant de l’étranger.
«S’il y a trop de cas simultanés, les urgences et les hôpitaux seront rapidement débordés. Ce n’est pas qu’une question économique… Par exemple, si l’éclosion part dans la ville de Gaspé, nous aurons seulement quatre lits dédiés aux soins intensifs. Les patients très malades du coronavirus le sont pour au moins deux semaines, ce qui signifie qu’ils resteraient au moins deux semaines aux soins intensifs. Selon ce scénario, les autres patients qui ont besoin de soins intensifs seront traités dans les corridors ou mourront faute de ressources», avertit le médecin québécois.