Le mélanome, tout aussi dangereux qu'un cancer du cerveau

Jusqu'à 9.000 personnes atteintes du mélanome sont diagnostiquées chaque année en Russie: il s'agit de la tumeur maligne la plus répandue. Au stade initial le mélanome peut être soigné dans 90% des cas, c'est pourquoi à l'heure actuelle l'accent est mis sur la prévention et le dépistage précoce de la maladie.
Sputnik

Comment reconnaître un cancer de la peau? Peut-on s'en prémunir? Nikolaï Potekaev, spécialiste indépendant en dermatovénérologie et en cosmétologie du ministère russe de la Santé, directeur du Centre de recherche pratique en dermatovénérologie et de cosmétologie de Moscou, professeur à l'université nationale russe de recherches en médecine Pirogov, répond à Sputnik.

Le cancer de la peau progresse dans le monde entier, sachant que de plus en plus de patients guérissent et vivent longtemps sans récidive. Est-ce grâce à de nouveaux médicaments et méthodes de traitement ou à un meilleur diagnostic?

Il s'agit avant tout du diagnostic et du travail avec la population. Malheureusement, chaque année, le nombre de cas de mélanome et d'autres tumeurs malignes de la peau grandit. Cela se passe dans le monde entier, pas seulement en Russie. Mais cette tendance négative s'accompagne d'une circonstance importante: on meurt moins du mélanome.

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Le mélanome fait partie des malformations de la peau et des tumeurs cancéreuses dans l'ensemble les plus perfides. Il est tout aussi dangereux que le glioblastome (tumeur cérébrale) et métastase aussi vite.

Le mélanome évolue en quatre stades. Pendant les deux premiers la tumeur se trouve seulement dans la peau, elle ressemble à un petit grain de beauté noir qui n'inquiète pas du tout. L'organisme ne le combat pratiquement pas. Si le mélanome est dépisté à cette étape et qu'il est opéré, l'individu est débarrassé aussi bien de la tumeur que des métastases éventuelles. Mais il n'est pas rare que les patients arrivent chez les oncologues quand leurs organes internes sont déjà atteints. Les spécialistes savent qu'il s'agit d'une métastase, commencent à chercher le foyer et découvrent le mélanome sur la peau. Les métastases dans les organes internes sont signes de quatrième stade quand, malheureusement, il est très difficile d'aider le patient. C'est le danger du mélanome. Même lors d'un examen du patient par son médecin, il n'est pas toujours évident de déterminer s'il s'agit d'une tumeur. Il faut un spécialiste, un dermatologue ou un oncologue.

En dix ans, grâce à un sérieux travail préventif à Moscou, de plus en plus de cas de cancer de la peau sont diagnostiqués au premier ou au deuxième stade. Si, en 2007, le mélanome était découvert au stade précoce dans 69% des cas, aujourd'hui ce chiffre est de 83%. Au final, dans l'année qui suit le diagnostic, la mortalité a diminué de 10,7% en 2012 jusqu'à 4,6% en 2018.

Pratiquement tout le monde a des grains de beauté. Comment savoir que ce n'est pas un simple grain de beauté mais probablement un mélanome?

Premièrement: en cas d'apparition d'une nouvelle formation qui suscite des soupçons chez le patient lui-même. Il ne le comprend pas. Deuxièmement: si l'individu avait un grain de beauté qui a commencé soudainement à s'agrandir. Troisièmement: si le grain de beauté a changé de couleur. Quatrièmement: il a commencé à gratter, à faire mal. En fait, toute sensation subjective au niveau des grains de beauté doit susciter des craintes. Parce que les grains de beauté sont «muets», nous ne les sentons pas. Si le patient ressent son grain de beauté, c'est une sérieuse raison de consulter un médecin.

Cinquièmement: il faut tirer la sonnette d'alarme si autour du grain de beauté est apparu un anneau d'inflammation, une rougeur. Enfin, si sur le grain de beauté poussaient des poils (le plus souvent il s'agit de taches de naissance) et qu'ils sont soudainement tombés.

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Tout le monde doit savoir ces choses-là. Nous l'expliquons constamment aux patients, ainsi qu'à nos collègues et aux médecins généralistes: nous organisons dans notre centre des conférences pour la population, des écoles spéciales, des manuels pour les médecins. Grâce à quoi le cancer de la peau est diagnostiqué de plus en plus souvent au stade initial.

Quel spécialiste est-il préférable de consulter si un grain de beauté inquiète: un dermatologue ou directement un oncologue?

D'abord un dermatologue. S'il soupçonne une tumeur, le patient est envoyé chez un oncologue qui précisera le diagnostic et choisira le traitement approprié. Si le dermatologue diagnostique des kératoses séborrhéiques, des papillomes, des acrochordons, des nævus mélanocytaires et d'autres néoformations bénignes de la peau, on proposera au patient une observation dynamique de la formation ou son ablation dans un établissement dermatologique. Dans l'ensemble, si un grain de beauté suscite des soupçons, il est préférable de consulter immédiatement un dermatologue.

D'autant qu'à Moscou, dans toutes les filiales de notre centre, fonctionnent depuis janvier 2019 des cabinets pour diagnostiquer les tumeurs de la peau. Nos spécialistes ont suivi une formation spéciale de dermato-oncologie. C'est pourquoi ils connaissent mieux ce problème que la plupart de leurs confrères. Dès le moindre soupçon le patient est envoyé dans une structure d'expertise - au Centre de diagnostic invasif de la peau, qui dispose d'équipements uniques pour la photométrie numérique et le dermo-scanner luminescent, ainsi que pour dresser ce qu'on appelle un passeport ou une carte de la peau.

Les cabinets des filiales sont également liés au Centre de diagnostic non invasif à l'aide des technologies de télémédecine. D'ailleurs, deux appareils de diagnostic du centre ont été conçus et brevetés par nos collaborateurs. Ils n'existent nulle part ailleurs. Nous avons même reçu pour cette élaboration un prix du gouvernement de Moscou pour les exploits dans la science et les innovations.

Dans les huit premiers mois de l'année, presque 85.000 personnes ont consulté les cabinets pour le diagnostic de néoformations malignes cutanées. 5.000 personnes ont été envoyées chez nous avec des suspicions de tumeur. Le diagnostic a été confirmé chez 2.088 personnes. Et il ne s'agissait pas seulement du mélanome. Les experts ont souvent dépisté le basaliome - une tumeur maligne qui ne donne pas de métastases mais détruit la peau et les tissus sous-cutanés quand sa taille augmente. Un carcinome spinocellulaire a été également diagnostiqué chez certains patients.

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Ce sont de très bons résultats, et aujourd'hui nous comptons étendre l'expérience moscovite à d'autres régions de la Russie.

Qui souffre le plus souvent du cancer de la peau, qui est dans le groupe à risques?

Dans la structure des maladies cancéreuses, les tumeurs malignes cutanées chez les hommes sont en troisième place après les néoformations du système broncho-pulmonaire et de la prostate. Chez les femmes elles sont en deuxième position juste après le cancer du sein.

Dans le groupe à risques figurent les amateurs de bronzage, mais il existe également des facteurs héréditaires. L'individu peut être porteur d'un gène lié au mélanome, soit il peut avoir de nombreux grains de beauté d'un type particulier - nævus dysplastiques. Quand l'individu possède un seul grain de beauté de ce type, les chances de contracter le mélanome ne sont pas très élevées. En présence de dix nævus ou plus les risques sont multipliés par 12.

Quelles sont les principales méthodes de prévention du cancer de la peau?

Le mélanome se développe à cause des mélanocytes - des cellules qui secrètent le pigment mélanine qui protège notre peau contre l'impact des rayons du soleil. Il absorbe l'ultraviolet afin de créer un écran protecteur de la peau et empêcher les ultraviolets de pénétrer en profondeur et d'affecter d'autres structures de la peau et de la fibre sous-cutanée. En abusant du soleil, l'effet sur la peau n'est pas amorti par la sécrétion de la mélanine. C'est pourquoi je ne préconise à personne de se faire bronzer spécialement.

De plus, il faut obligatoirement utiliser des moyens de protection avec un filtre 50+. Il faut mettre de la crème solaire 20 minutes avant de sortir au soleil pour qu'elle soit absorbée. Et évidemment, il faut surveiller l'état de la peau, de tous ses grains de beauté. Je suggère même de faire un passeport de la peau qui permet de compter absolument tous les grains de beauté sur la peau et de suivre leur évolution.

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