Trump met fin à la guerre commerciale, le Canada reste méfiant

La guerre tarifaire entre les États-Unis et le Canada toucherait-elle à sa fin? Donald Trump a annoncé qu’il allait lever les taxes sur l’importation d’acier et d’aluminium en provenance du Canada, une bonne nouvelle pour l’industrie automobile canadienne. Mais malgré cette détente, le Canada redoute toujours le protectionnisme de Trump.
Sputnik

Une véritable saga est peut-être sur le point de s’achever. Il ne s’agit pas de Game of Thrones, mais de la ratification finale du nouvel accord de libre-échange entre les États-Unis, le Canada et le Mexique.

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Depuis l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche, en novembre 2016, le Canada peinait vraiment à s’entendre avec son voisin. Bien avant sa victoire, Trump avait promis de revoir les accords économiques conclus entre les États-Unis et d’autres pays. Son slogan «America First» illustrait bien sa position protectionniste. En août 2017, Trump écrivait sur Twitter que l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA) était «le pire accord jamais conclu». Cette déclaration avait suscité beaucoup d’inquiétude au Canada.  

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Mais voilà que Donald Trump a accepté de lever les taxes sur l’acier et l’aluminium en provenance du Canada, qu’il avait imposées en juin 2018. Le nouvel accord de libre-échange a été conclu le 30 septembre dernier, mais le gouvernement Trudeau avait averti qu’il ne le signerait pas avant que Trump ne revienne sur cette décision. Après d’intenses négociations, Ottawa avait fait de la suppression de ces tarifs douaniers une condition indispensable à sa signature définitive. 51% de la production canadienne d’acier et 84% de celle aluminium sont acheminés aux États-Unis et étaient respectivement taxés à la hauteur de 25% et 10% avec ces mesures.

«Nous avons toujours dit très clairement que tant que ces tarifs douaniers seraient en place, il nous serait très difficile d’avancer vers une ratification du nouvel Accord de libre-échange nord-américain», a rappelé la ministre des Affaires étrangères, Chrystia Freeland, lors d’une interview à la radio de la chaîne canadienne CBC. 

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Tout en saluant la nouvelle, le gouvernement canadien a annoncé qu’il allait suspendre ses mesures de représailles. Après l’entrée en vigueur de ces taxes, le Canada avait imposé des tarifs similaires, entrant alors en guerre tarifaire avec l’Oncle Sam.

«L’élimination des tarifs et des contre-mesures est une véritable situation gagnant-gagnant pour toutes les parties en cause; il s’agit d’une excellente nouvelle pour les travailleurs canadiens et américains, nos communautés et nos économies», s’est félicité le ministre des Finances, Bill Morneau, par voie de communiqué le 20 mai dernier.

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Malgré cet important développement, Chrystia Freeland dit toujours craindre le nationalisme économique du Président Trump. La ministre se dit encore «très inquiète du protectionnisme américain». Dans ce dossier, il faut dire que l’approche de Mme Freeland a semblé complètement à l’opposé de celle de ses homologues américains. Tout au long des négociations, des tensions importantes ont été observées entre les deux camps. De même, Donald Trump ne semble pas compter Justin Trudeau parmi ses dirigeants favoris…

«Il serait naïf de penser qu’on est assuré d’une quelconque sécurité durable lorsqu’on traite avec l’administration Trump. […] Il faut toujours rester vigilant», a souligné Mme Freeland sur CBC.

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L’industrie automobile se réjouit de la suppression des tarifs douaniers sur l’acier et l’aluminium, mais ce n’est pas du tout le cas des producteurs de lait. Pour s’entendre sur un nouvel accord, le Canada a dû faire d’importances concessions sur la gestion de l’offre, un système qui favorise les producteurs canadiens de lait, de poulet et d’œufs.

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En limitant les importations américaines dans ce secteur, le Canada protégeait des producteurs menacés par la concurrence américaine. La gestion de l’offre n’a pas été complètement abolie, mais elle a été assouplie à la demande des États-Unis. Cette décision suscite toujours la colère de nombreux producteurs canadiens. On accuse Justin Trudeau d’avoir sacrifié l’industrie du lait pour sauver celle de l’automobile, concentrée dans la province de l’Ontario. Le Premier ministre a toutefois promis qu’il n’irait pas plus loin dans le processus d’assouplissement de ce système:

«On a demandé trois fois aux producteurs laitiers d’en faire un peu plus et je peux vous dire qu’on ne leur demandera plus rien, parce que les accords que l’on est en train de négocier et ceux que l’on négociera à l’avenir ne leur porteront plus aucune atteinte. C’est une promesse que je peux vous faire aujourd’hui», a déclaré Justin Trudeau lors d’une assemblée publique dans la ville québécoise de Saint-Hyacinthe, le 18 janvier 2019.

Un nouveau chapitre a donc été ouvert sur le plan des relations commerciales entre les États-Unis et le Canada. Il reste maintenant à savoir combien de temps il durera.

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