L'attaque d'une église au Burkina, «symbole de la haine et de l'aveuglement religieux»

Le 12 mai, six personnes, dont un prêtre, ont été tuées lors de l'attaque d'une église catholique à Dablo, dans le Centre-nord du Burkina Faso. Interrogées par Sputnik, plusieurs personnalités politiques, dont Tahirou Barry, ancien ministre de la Culture, sont d'accord pour y voir une tentative de monter les communautés les unes contre les autres.
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Une attaque contre une église catholique au Burkina Faso, plusieurs morts
Dans la matinée du dimanche 12 mai, des hommes armés non identifiés ont fait irruption en pleine messe dans une église catholique de Dablo, une commune de la province du Sanmatenga, à environ 200 kilomètres au nord de Ouagadougou, capitale du Burkina Faso. Le prêtre célébrant et cinq fidèles ont été abattus.

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Commentant pour Sputnik cette énième attaque armée, qui a choqué l'opinion nationale et internationale de par son aspect religieux, l'ancien ministre burkinabè de la Culture et candidat à la présidentielle de 2020, Tahirou Barry, y voit «le triste symbole de l'intolérance, de la haine et de l'aveuglement religieux».

«Ces terroristes essaient d'attenter dangereusement à notre cohésion sociale. Leur objectif évident est d'ériger les communautés les unes contre les autres, de faire en sorte que notre vivre-ensemble s'effondre. Nous avons conscience de cela, nous devons donc lutter résolument contre eux tout en restant debout et unis. Ces forces du mal ne peuvent triompher que si nous nous laissons diviser», a déclaré l'ancien ministre à Sputnik.

Un point de vue que partage Achille Tapsoba, vice-président chargé des questions politiques du Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP, parti de l'ex-Président Blaise Compaoré) pour qui «l'union des Burkinabè est incontournable».

«La grande leçon de cette attaque est qu'il faut œuvrer à consolider toujours plus la cohésion entre les communautés religieuses pour éviter le risque de fracture. En tant qu'attaque ciblée qui intervient peu après la libération d'otages dans le Nord du pays, on peut penser à première vue qu'il s'agit de représailles, mais on doit surtout y voir une stratégie qui est déployée depuis un bout de temps par ces terroristes pour créer une psychose généralisée», a confié à Sputnik Achille Tapsoba.

Également interrogé par Sputnik, Chrysogone Zougmoré, le président du Mouvement Burkinabè des Droits de l'Homme et des Peuples (MBDHP), qui voit également dans cette attaque «une stratégie adoptée actuellement par les terroristes pour emmener les Burkinabè à s'entre-déchirer», appelle l'État, les divers regroupements religieux, la société civile et les citoyens à la vigilance.

Plusieurs victimes dans l'attaque d'une église au Burkina
L'attaque de l'église à Dablo, qui survient deux jours après la libération dans le nord du Burkina de quatre otages (deux Français, une Américaine et une Sud-coréenne), n'est pas la première à cibler une communauté religieuse ou un lieu de culte dans le pays.
Fin avril, le pasteur et quatre fidèles de l'église protestante de Silgadji, une commune rurale de la province du Soum, dans le nord du Burkina, ont été tués lors d'une attaque menée par des hommes armés. Par ailleurs, plusieurs imams ont également été assassinés ces dernières années dans cette partie du pays.

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Depuis 2015, les attaques armées, attribuées à des groupes djihadistes par les autorités burkinabè, ont fait plus de 300 morts. Ces attaques, qui touchent essentiellement le nord et l'est du pays, sont devenues particulièrement fréquentes et meurtrières à partir de 2018.

«Ces attaques, peu importe la communauté ciblée, ne sont pas près de s'arrêter tant qu'il n'y aura pas une riposte conséquente des forces de sécurité. Il faut à ce propos se réjouir du fait qu'il y a ces derniers mois une progression de la riposte de l'armée burkinabè, qui se traduit le terrain par des pertes significatives dans des rangs des terroristes», a soutenu Achille Tapsoba.

Tahirou Barry souligne lui aussi ce «rôle capital» que doit jouer le gouvernement et l'armée burkinabè dans la lutte contre le terrorisme.

«Le gouvernement doit donner tous les moyens qu'il faut aux forces armées nationales pour faire face à ce fléau», a déclaré l'ancien ministre.

​​​Dans la foulée de l'attaque à Dablo, Roch Kaboré, le Président burkinabè a assuré que ces hommes armés non identifiés seront traqués.

«Nous resterons debout et nous traquerons ces forces obscurantistes qui veulent mettre à mal notre vivre-ensemble et saper nos efforts de développement», a martelé le chef de l'État.

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