Le Président soudanais Omar el-Béchir, au pouvoir depuis trois décennies, a été destitué et arrêté ce jeudi 11 avril. Ces informations, initialement révélées à Sputnik par une source au sein du service de sécurité local, ont été confirmées par le ministre de la Défense, Ahmed Awad Ibn Auf, au cours de son allocution télévisée.
«J'annonce, en tant que ministre de la Défense, la chute du régime et le placement en détention dans un lieu sûr de son chef», a-t-il précisé.
Le ministre a également confirmé la dissolution du gouvernement et a annoncé la mise en place d'un conseil militaire voué à diriger le pays pendant deux ans. La destitution du Président Omar el-Béchir a également été confirmée.
Selon ces annonces, la période de transition sera suivie par des «élections libres et équitables».
Le ministère a également déclaré l'état d'urgence pour trois mois et la fermeture de l'espace aérien du pays pendant un jour. Un couvre-feu a été instauré pour un mois avec une interdiction de circuler entre 22h00 et 04h00.
Plus tôt, la chaîne Al-Hadath avait annoncé que, lors d'une réunion d'urgence, l'armée soudanaise avait décidé ce jeudi matin de destituer le Président du pays. Ces informations ont été confirmées par Adel Mahjoub Hussein, ministre de la Production et des Ressources économiques du Darfour du Nord ainsi que par deux responsables soudanais haut placés cités par Associated Press.
Les organisateurs des manifestations dénoncent les annonces de la Défense
L'Association de professionnels soudanais (APS), principal organisatrice des manifestations contre le Président el-Béchir, a dénoncé la création du conseil de transition en appelant à poursuivre le sit-in lancé le samedi 6 avril devant le ministère de la Défense.
Le parti d'opposition Umma a aussi rejeté ces annonces, a déclaré à Sputnik sa vice-présidente, Mariam al-Sadiq al-Mahdi. Selon elle, il s'agit d'une tentative pour «contourner les demandes du peuple soudanais».
«Les manifestations au Soudan se poursuivront jusqu'à ce que toutes les demandes du peuple soient satisfaites», a-t-elle ajouté.
Tout au long de la matinée, des milliers de Soudanais se sont rassemblés dans le centre de la capitale, anticipant l'annonce de la destitution du Président.
«Le régime est tombé, le régime est tombé!», scandaient des manifestants réunis devant le quartier général des forces militaires.
Réactions de la communauté internationale
Le ministère égyptien des Affaires étrangères a appelé la communauté internationale à soutenir le choix du peuple soudanais, selon un communiqué mis à la disposition de Sputnik. La diplomatie égyptienne a qualifié ces événements de «période historique décisive».
Moscou espère, à son tour, que les forces politiques et que les militaires soudanais réussiront à éviter une escalade de la situation, a déclaré la porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, Maria Zakharova, lors de son point-presse hebdomadaire.
«Moscou espère que toutes les forces politiques soudanaises ainsi que les organes militaires agiront de manière responsable afin de stabiliser la situation le plus vite possible et éviter sa future escalade. Nous appelons à la résolution des problèmes internes soudanais par des moyens pacifiques et démocratiques sur la base d'un vaste dialogue national», a-t-elle précisé.
Le Président turc Recep Tayyip Erdogan a également commenté la situation au Soudan.
«Nous avons des relations très étroites et chaleureuses avec le Soudan. Et nous voulons que ce pays surmonte les problèmes actuels par une voie démocratique et que la société arrive à une réconciliation», a-t-il déclaré aux journalistes.
Manifestations au Soudan
Dès le samedi 6 avril, des milliers de Soudanais ont commencé à se réunir devant le quartier général de l'armée afin de défier le pouvoir d'Omar el-Béchir. Les manifestants ont fait face à plusieurs reprises à des assauts du service de renseignement NISS, qui a tenté en vain de les disperser à l'aide de gaz lacrymogènes, selon les organisateurs des manifestations cités par l'AFP.
L'agence de presse Suna a rapporté que 11 personnes, dont six membres des forces de l'ordre, sont décédées le 9 avril dans des incidents similaires.