«Internet souverain»: réduire la dépendance à l'égard de l'Occident est «logique»

Où mènera l’«Internet souverain» en Russie? Depuis que ce projet de loi a été annoncé, les soupçons à son propos ne s’apaisent pas. Et si la «souveraineté numérique russe» influençait le monde entier? Sputnik a posé cette question pressante aux experts Piotr Dvoryankine et Ioulia Iachkova afin de comprendre à quoi il fallait s’attendre à l’avenir.
Sputnik

Le porte-parole du Président russe, Dmitri Peskov, a déclaré ce mercredi 27 janvier que les États-Unis pourraient déconnecter la Russie de l'Internet mondial, raison pour laquelle celle-ci envisage d'adopter la loi sur l'«Internet souverain». «Ce n'est pas lié à l'isolement et à la fermeture de notre pays», a assuré le représentant du Kremlin.

Piotr Dvoryankine, membre du conseil des experts de la Douma d'État [chambre basse du parlement russe, ndlr] sur le soutien législatif au développement des technologies financières, et partenaire dans la transformation numérique et le travail avec les autorités publiques de l'agence de conseil Perform, partage ce même avis.

Selon lui, «formellement, les législateurs russes ont justement de bons objectifs. La tentative de réduire la dépendance à l'égard de l'Occident est une action logique, du point de vue de la préservation de la souveraineté nationale».

L’«Internet souverain» est un moyen de «survivre si la Russie est déconnectée de force»
Quant aux débats législatifs et à l'amendement du projet de loi, en rappelant qu'il ne s'agit que de la première lecture, Piotr Dvoryankine indique qu'il sera possible d'exercer un impact significatif sur ce qui sera finalement adopté dans le cadre de la deuxième lecture. En outre, selon lui, «les législateurs eux-mêmes, du moins dans l'espace public, déclarent ouvertement vouloir inviter à la discussion des experts spécialisés».

Quant aux inquiétudes concernant l'influence de la «souveraineté numérique russe» sur le Web en principe, M.Dvoryankine estime que «l'adoption de cette loi et sa prochaine mise en œuvre auront un impact non seulement sur le segment russe d'Internet, mais également sur l'ensemble du réseau mondial si son segment russe peut subir de graves changements», sans pourtant mentionner l'idée de se déconnecter:

«L'accessibilité, la rapidité et la fonctionnalité de l'Internet dans les conditions de l'économie numérique vers lesquelles nous évoluons rapidement, peuvent être comparées à l'oxygène pour les organismes vivants et à SWIFT pour le système bancaire», conclut Piotr Dvoryankine.

Tout en rendant compte de la nécessité de ce projet comme moyen de cybersécurité interne et de réponse à la stratégie agressive des États-Unis, Ioulia Iachkova, cheffe du cabinet d'avocats spécialisé dans le digital DLC LLC, mentionne également un possible impact négatif causé par la réalisation de cette idée.

Selon Ioulia Iachkova, «l'État devrait absolument s'attendre à une éventuelle réaction négative de la part du public, car la mise en œuvre du projet de loi contribuerait à renforcer la censure et nécessiterait d'importantes dépenses budgétaires».

Dans le même temps, Mme Iachkova précise qu'il est difficile de prédire ce qui se passerait sur le marché dans de nouvelles conditions.

«Internet souverain» en Russie: une parlementaire russe explique son initiative
La Douma a soutenu le 12 février un projet de loi qui, de l'avis de ses initiateurs, est capable de garantir le fonctionnement ininterrompu d'Internet en Russie, même en cas de déconnexion du réseau mondial.

Après son adoption, les médias étrangers se sont mis à débattre vivement de ce sujet, comparant la Russie à la Chine, accusant les autorités russes de contrôler le cyberespace et de se préparer à une cyberguerre.

Pourtant, les initiateurs de ce projet, la sénatrice Lioudmila Bokova et le sénateur Andreï Klichas, l'expliquent par la mesure de se préserver contre la stratégie nationale de cybersécurité des États-Unis, signée par Donald Trump en septembre dernier, qui énonce le principe du «maintien de la paix par la force».

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