Des femmes autochtones sont-elles stérilisées de force au Canada?

Le Canada est-il vraiment le paradis des droits de l’Homme? Certains pourraient en douter, car des femmes autochtones y seraient encore stérilisées contre leur gré. Une pratique interdite, mais qui existerait encore dans l’ouest canadien. Mais qu’est-ce qui explique ce phénomène grave? Les explications de Sputnik.
Sputnik

Après la vente controversée de véhicules blindés à l'Arabie saoudite, un autre scandale a refait surface au pays de l'érable. Depuis quelques semaines circulent des informations selon lesquelles des femmes autochtones auraient été stérilisées de force. En Amérique, les Autochtones sont les personnes dont les ancêtres habitaient le territoire avant l'arrivée des Européens. Plusieurs d'entre eux vivent dans des conditions précaires et dans des régions éloignées des grands centres.

Cette histoire est évidemment considérée comme une grave violation des droits de la personne. Plusieurs organismes au Canada ont dénoncé la situation, de même qu'Amnistie internationale qui a demandé à ce qu'un représentant indépendant soit chargé de mener une enquête. Tout récemment, des représentants des peuples autochtones ont encore manifesté pour dénoncer la situation.

Le Canada est-il vraiment le paradis des droits de l'Homme?

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C'est en novembre 2018 que l'affaire a fait surface, après que la sénatrice Yvonne Boyer ait décidé d'en parler aux médias. Dans les derniers jours, l'histoire a pris plus d'ampleur. Des femmes amérindiennes auraient été contraintes, sous la pression, de subir une opération de stérilisation dans des hôpitaux qui n'ont pas tous été identifiés. C'est le témoignage de femmes recueilli par deux chercheurs de l'Université Brandon, au Manitoba, qui prouverait la véracité de cette affaire. La plupart de ces femmes ont décidé de conserver l'anonymat.

La stérilisation de femmes autochtones est une pratique qui remonte aux années 1930, mais serait réapparue dans quatre provinces: l'Alberta, la Saskatchewan, le Manitoba et l'Ontario. La pratique existerait aussi plus au nord: au Yukon, dans les territoires du nord-ouest et au Nunavut. Pour prévenir d'éventuels avortements, du personnel hospitalier déciderait d'opérer des femmes sans leur consentement explicite, souvent après un accouchement. Une pratique qui reviendrait dans l'histoire de manière intermittente.

Le phénomène ne toucherait donc pas le Québec, grande province francophone, mais le Canada anglais. Dans l'histoire, les colonisateurs anglais ont d'ailleurs entretenu un rapport plus conflictuel aux Premières Nations que les colonisateurs français.

Une pratique qui viserait à prévenir des avortements

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Évidemment, rien n'autorise des médecins ou du personnel infirmier à stériliser des femmes autochtones au Canada. Une réalité qui s'ajoute à l'étonnement et à l'indignation. Au Canada, le système de santé relève des gouvernements provinciaux et aucune loi n'autorise à procéder à une telle intervention.

Mais alors, dans quelles circonstances ces stérilisations forcées ont-elles été pratiquées? Toute la lumière est loin d'être encore faite sur cette affaire et c'est pourquoi divers organismes réclament qu'une enquête soit rapidement initiée. Les autorités et le gouvernement disposent de peu d'informations, ce qui ne facilite pas la prise en charge du dossier.

Le mystère plane toujours autour de cette histoire

Dans la tourmente, le gouvernement libéral de Justin Trudeau vient d'annoncer qu'il ne prévoyait pas modifier la loi pour criminaliser la stérilisation forcée de femmes, qu'elles soient autochtones ou d'origine européenne. Sur le plan juridique, on estime que des outils existent déjà pour faire face à ce genre de problématique, ce qui est effectivement le cas. Des représentants des peuples autochtones se sont récemment réunis dans la capitale d'Ottawa pour demander au gouvernement de modifier le Code criminel. Jusqu'à aujourd'hui, leurs revendications n'ont pas été entendues.

Pour en savoir plus, Sputnik a rejoint Rachel Rappaport, l'attachée de presse de la Ministre des Services aux Autochtones, Mme Jane Philpott. Sans surprise, l'attachée de presse a condamné cette pratique et a rappelé qu'aucune loi ne l'autorisait. 

«Seuls les praticiens, tels que les obstétriciens et les gynécologues, peuvent ordonner des procédures telles que la ligature des trompes. […] Les politiques de consentement éclairé sont administrées au niveau local au sein de l'hôpital, ce qui signifie que les administrateurs de l'hôpital et les autorités doivent contribuer à empêcher cette pratique», a souligné Rachel Rappaport.

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Mme Rappaport a rappelé que le domaine de la santé ne relevait pas des compétences du gouvernement fédéral, ce qui le déresponsabiliserait en quelque sorte. «Au Canada, toute mesure doit être prise de concert avec les ministères de la Santé des provinces et des territoires, car les services de santé sont principalement fournis par les provinces et les territoires», a affirmé l'attachée de presse de la ministre Philpott.

Rachel Rappaport affirme que le Ministère des Services aux Autochtones (anciennement Ministère des Affaires autochtones) allait travailler de concert avec différents partenaires amérindiens pour mettre fin à la situation. Des associations professionnelles comme la Société des obstétriciens et des gynécologues du Canada devraient aussi être consultées.  

Le gouvernement fédéral devrait jouer «un rôle de premier plan afin de faciliter le dialogue». Il n'a toutefois été question d'aucun échéancier.

«La stérilisation forcée de certaines femmes autochtones est une grave violation des droits de la personne. Le gouvernement du Canada est fermement convaincu que toutes les femmes autochtones doivent bénéficier de services de santé sécuritaires sur le plan culturel, peu importe où elles habitent. Nous nous sommes engagés à travailler avec nos partenaires pour améliorer la qualité des services de soins de santé offerts aux peuples autochtones», a affirmé l'attachée de presse de la Ministre des Services aux Autochtones, Mme Jane Philpott.

Évidemment, cette affaire pourrait nuire à l'image du Canada sur la scène internationale. L'image de «paradis des droits que l'homme» que le Canada s'est forgée semble de plus en plus fragile. Il faut dire aussi que l'action de Justin Trudeau est de plus en plus critiquée, même dans les milieux de gauche. Le jeune premier ministre engagerait beaucoup d'actions symboliques, mais ne ferait rien de concret pour faire avancer des dossiers importants comme celui de l'environnement. L'amélioration de la qualité de vie des personnes autochtones serait un autre dossier qu'il négligerait.

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