Aussitôt que le Brexit se réalisera, l'État français sera le seul membre de l'Union européenne au Conseil de sécurité de l'Onu à avoir le droit de veto et, ainsi, à pouvoir bloquer les opérations militaires indésirées. Contacté par Sputnik, M.Asselineau se demande si la création d'un tel corps militaire ne présente pas le risque de se transformer en un facteur affaiblissant la France elle-même.
«Ce qui se cache derrière, on croit comprendre par certaines indiscrétions que cela pourrait entraîner le partage du siège au Conseil de sécurité de la France, ce qui fait de la France une grande puissance, et il est beaucoup question du fait que la France pourrait partager ce siège avec l'Allemagne», estime-t-il, soulignant que ce tournant «serait une façon d'abaisser le statut international de la France».
Le peuple sera-t-il d'accord?
Cette récente proposition ne figurait d'ailleurs pas dans le programme électoral d'Emmanuel Macron et «donc il sort cette proposition d'un chapeau, sans avoir obtenu l'accord des Français sur cette affaire», poursuit le président de l'UPR. Une proposition qui signifierait possiblement que «la France pourrait aussi mettre à disposition, partager, petit à petit, sa force de frappe nucléaire avec l'Allemagne»…
«Tout ceci ce sont des éléments absolument décisifs du rayonnement de l'influence et de la souveraineté française. On connaît désormais l'inclination de M.Macron à se mettre à genoux devant l'Allemagne dans toutes les circonstances sans jamais d'ailleurs rien d'obtenir en retour», s'indigne M.Asselineau.
L'homme politique pointe un autre élément: ce n'est pas la première proposition d'avoir une armée, une défense européenne, avancée par les différents leaders français.
«C'est un serpent de mer depuis au moins trois décennies et ça ne débouche jamais sur rien. Pourquoi? Parce que tout simplement comme toutes les questions dans l'Union européenne, les intérêts nationaux des États sont totalement divergents. M.Macron ne fait pas mystère que dans son esprit cette armée européenne aurait vocation à assurer une sorte de souveraineté de l'Europe et même d'ailleurs qui s'affirmerait ainsi contre la chine et contre la Russie, ce qu'il a dit lui-même et a même précisé dans un autre entretien à Europe 1, il a même englobé les États-Unis d'Amérique parmi les pays contre lesquels une telle armée européenne pourrait se bâtir.»
Quid des autres pays de l'Europe?
«M.Macron s'avance dans ce genre d'opérations sans jamais vérifier que les autres pays de l'Union européenne, donc pas uniquement la France et l'Allemagne, 28 pays bientôt, 27 quand les Britanniques seront sortis, heureusement pour eux, de cette affaire, sont d'accord. Donc, M.Macron fait comme si les autres pays comptaient pour du beurre», pointe M.Asselineau.
En guise d'exemple, les pays de l'Est — en particulier la Pologne, les Pays baltes, la Slovaquie, la Bulgarie, la Roumanie — affichent plutôt une attitude proaméricaine. Pourquoi alors, se demande-t-il, le dirigeant français semble ne toujours pas en être conscient, ou fait semblant de ne pas en être conscient?
«Donc, lorsque M.Macron propose une armée européenne qui aurait vocation à s'opposer éventuellement, en tout cas à se découper totalement des États-Unis, on est sûr à 100, à 200% que les pays Baltes, les Polonais et d'autres pays de l'Est, sans compter même l'Allemagne, d'ailleurs, ne seront pas d'accord», constate l'interlocuteur de Sputnik, sans bien comprendre en outre ce à quoi le Président aspire en faisant de telles déclarations.
En cela, non seulement le Président de la République «cherche des verges pour se faire battre», mais semble être «totalement ignorant» des Traités européens:
«L'article 42 du Traité de l'Union européenne a pour effet de soumettre la défense, la politique européenne de sécurité et de défense de l'Union européenne sous la tutelle de l'Otan, puisque l'Otan est mentionné expressément dans cet article 42 comme ayant primauté sur toute stratégie de défense. Je pense que M.Macron est un peu un électron libre et sur ce sujet comme sur beaucoup d'autres on a l'impression qu'il parle sans savoir et que d'ailleurs il inquiète de plus en plus son entourage», résume le dirigeant de l'UPR.
Par la suite, Donald Trump avait qualifié d'«insultante» cette idée et proposé aux Européens de payer leur part à l'Otan, subventionnée largement par Washington. Vladimir Poutine a à son tour qualifié cette intention des Européens de désir naturel qui serait «un processus positif pour le renforcement du monde multipolaire».
Angela Merkel a de son côté soutenu l'idée, estimant que l'éventuelle création d'une armée européenne pourrait montrer au monde que la guerre est impossible en Europe et «complèterait l'Otan sans jamais remettre en cause le lien» avec l'Alliance. De plus, la chancelière allemande a proposé aux eurodéputés de mettre en place un conseil de sécurité européen «qui permettrait de prendre des décisions importantes plus rapidement».