Jusque-là, la confrontation entre la Hongrie et l'Ukraine se limitait aux piques verbales et au blocage des réunions de la commission Otan-Ukraine par les autorités hongroises, écrit mercredi le quotidien Kommersant. Mais hier, le ministère des Affaires étrangères ukrainien a promis d'expulser prochainement le consul hongrois de la ville transcarpate de Beregovo, pour avoir délivré un passeport hongrois à de nombreux habitants locaux. Budapest estime que ces actions n'ont rien d'illégal et promet de répondre à Kiev par la réciproque. Bruxelles et Washington appellent les parties au dialogue et au compromis. D'autant que «la Russie pourrait profiter de ce conflit», a déclaré le chef de la diplomatie ukrainienne Pavel Klimkine.
La nouvelle aggravation des relations a été provoquée par une vidéo publiée par les médias ukrainiens ce 19 septembre, montrant une cérémonie à huis clos de délivrance de passeports hongrois au consulat de Beregovo. On y voit plusieurs personnes prononcer en chœur le serment: «Je considère la Hongrie comme ma patrie, je serai un citoyen loyal, je servirai la Hongrie et la protégerai». La vidéo continue avec les conseils des collaborateurs de la mission diplomatique de cacher l'obtention du passeport hongrois aux fonctionnaires ukrainiens, le tout autour d'une coupe de champagne.
La loi ukrainienne n'autorise pas l'obtention d'une autre citoyenneté à moins de renoncer à son passeport ukrainien. Mais de facto, les Ukrainiens sont nombreux à posséder la citoyenneté d'autres pays, principalement voisins. Néanmoins, dans ce cas précis, le Service de sécurité ukrainien (SBU) et le Parquet ont ouvert une enquête. Selon le procureur général Iouri Loutsenko, la «qualification juridique préliminaire» du crime de Beregovo est «haute trahison».
La vidéo a été évoquée par Pavel Klimkine et son homologue hongrois Peter Szijarto à New York en marge de l'Assemblée générale des Nations unies. Mais à l'issue de leur discussion, les deux chefs de diplomatie ont reconnu n'avoir abouti à rien. Le ministre hongrois n'a pas nié la délivrance de passeports hongrois, tout en ajoutant que «cela ne constituait aucune violation».
Rappelons que Kiev et Budapest sont en conflit depuis l'an dernier, après l'adoption de la loi ukrainienne sur l'éducation restreignant l'enseignement dans les langues des minorités nationales. Le gouvernement hongrois, qui accorde beaucoup d'attention à ses compatriotes en Transcarpatie ukrainienne, a perçu cette loi comme une atteinte à ses propres intérêts. Budapest a alors bloqué la commission ministérielle Otan-Ukraine. Ses représentants ne seront pas non plus présents à la réunion de deux jours des ministres de la Défense de l'Alliance et de ses partenaires qui commence aujourd'hui à Bruxelles. Une telle situation ne convient ni à la direction de l'Alliance, ni à son principal acteur — Washington.
Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.