Et si l’Atlantide se trouvait à proximité de Cuba?

Les recherches de cette civilisation mythique pourraient faire l'objet d'une planification stratégique au niveau de l’État.
Sputnik

La Russie n'a jamais perdu de son intérêt pour l'Atlantide — et en général pour les continents submergés et les civilisations anciennes, écrit le quotidien Nezavissimaïa gazeta. Ainsi, le 16 juin 2000, Moscou accueillait le Ier Congrès des «atlantologues», consacré principalement aux questions d'organisation. Vladimir Chtcherbakov, docteur ès sciences techniques et philosophiques, auteur de science-fiction et président du Club des mystères de Moscou, a été élu leader du mouvement atlantologique russe à l'unanimité. Cette initiative a été suivie par la formation de la Société russe d'étude des problèmes de l'Atlantide, dirigée par son président Alexandre Voronine (1954-2012). Gueorgui Nefediev, historien, philologue et président actuel de la Société russe d'études des problèmes de l'Atlantide, évoque les perspectives de la découverte de cette grande civilisation disparue.

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- Qu'est-ce qui explique votre intérêt pour l'Atlantide? A ce que je sache, vous êtes philologue — c'est-à-dire un scientifique théoriquement assez éloigné des problèmes océanologiques.

Gueorgui Nefediev: J'ai entendu parler de l'Atlantide pour la première fois quand j'avais six ans. Cela m'avait frappé. Encore à l'école, en étudiant des livres atlantologiques, je me suis penché sur les œuvres du poète symboliste russe Valeri Brioussov après avoir lu son étude «Les maîtres des maîtres. Les anciennes cultures de l'humanité et leurs relations». Ensuite, sa poésie a formé mon intérêt pour la poésie de l'âge d'argent russe. Cela m'a changé d'une certaine façon: c'est grâce à l'Atlantide que je suis devenu un philologue professionnel. Et puis, sans abandonner mon métier, j'ai repris — à un niveau différent — mon rêve d'enfance, les recherches de l'Atlantide légendaire qui est le mystère le plus intriguant de notre millénaire.

- A votre avis, trouvera-t-on un jour l'Atlantide? Ou n'est-elle qu'un mythe, contrairement à Troie?

Pas si sensationnel que ça: une pyramide géante repose au fond du Pacifique?
Gueorgui Nefediev: Elle sera certainement découverte. Il existe pourtant deux obstacles sur ce chemin. Le premier est lié à la nécessité d'assurer un financement approprié à un niveau très élevé — public ou international. Le deuxième réside dans l'attitude sceptique de la science traditionnelle. Même si nous présentions aujourd'hui un grand nombre d'artefacts, cela ne pourrait pas briser le mur d'incompréhension, car beaucoup de scientifiques considèrent l'atlantologie comme une fausse science, ne croient pas en une civilisation plus ancienne que celles présentées dans les manuels d'école (4.000 ou 3.000 ans avant J.C.). Les archéologues ont cependant trouvé au XXe siècle beaucoup d'objets qui n'étaient pas directement liés à l'Atlantide, mais élargissaient notre horizon historique. Ainsi, on a trouvé les villes de Çatal Höyük et Jéricho, datant de 10.000 ou 8.000 ans avant J.C. Cette période correspond à celle de l'existence de l'Atlantide, décrite par Platon dans ses Dialogues.

- Où faudrait-il la rechercher? Qu'en pensez-vous personnellement?

Gueorgui Nefediev: Il existe deux versions topographiques de la position de l'Atlantide. La première est «crétoise-minoenne»: elle pointe donc l'île de Santorin en Méditerranée. La deuxième est plus orthodoxe, «atlantique». Il y a encore plus de 40 hypothèses différentes, mais ces deux théories sont considérées comme les principales.

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La version «crétoise-minoenne» est plus commode pour la science officielle, car elle s'inscrit dans le cadre chronologique traditionnel. En même temps, les partisans de cette théorie réécrivent de fait Platon, qui se serait trompé concernant la date de la catastrophe qui aurait détruit l'Atlantide. Il affirme que cette dernière a eu lieu 9.000 ans avant son époque, alors que les partisans de cette version estiment qu'il s'agit d'environ un millénaire.
Si l'on lit attentivement les Dialogues du philosophe antique, on peut y trouver beaucoup d'arguments en faveur de la version «atlantique». Ainsi, les Égyptiens étaient en contact avec les Crétois-Minoens, mais ne les considéraient pas comme les Atlantes. L'Europe n'était pas non plus pour eux un «continent opposé» qui se trouvait, tout comme l'Atlantide, derrière les «Colonnes d'Hercule», c'est-à-dire derrière le détroit de Gibraltar.
Je pense qu'il faut rechercher l'Atlantide à proximité de Cuba. Les atlantologues occidentaux Frank Joseph et Andrew Collins sont du même avis. Des pyramides en gradin et des sphinx sous-marins ont été enregistrés en 2012 près du littoral cubain pendant la dernière expédition de Polina Zelitskaïa, et on les aurait découverts pour la première fois encore à l'époque de la crise des missiles. C'est la position possible d'Antillia, île des Sept cités, présente sur les cartes médiévales. La mémoire de cette nation submergée a été conservée jusqu'aux Phéniciens. L'Atlantide est également présente dans la mythologie des Aztèques qui l'appelaient Aztlan.

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- Selon le chercheur tchécoslovaque Zdeněk Kukal, il n'existe dans l'océan Atlantique aucun endroit correspondant ne serait-ce que partiellement à la description de Platon, et qui aurait pu subir dans un passé envisageable une catastrophe capable de détruire une île énorme voire un continent.

Gueorgui Nefediev: La science officielle souligne que la submersion rapide d'un massif terrestre important est impossible. On sait pourtant que de petites îles peuvent apparaître et disparaître très rapidement, surtout si elles sont d'origine volcanique. L'Atlantide aurait pu disparaître en résultat d'un cataclysme planétaire. L'éruption du volcan de Santorin (l'île de Santorin n'est qu'un cratère de volcan émergé de la mer), qui a détruit la civilisation «crétoise-minoenne», a sans doute provoqué des répercussions catastrophiques, mais locales, limitées par le bassin méditerranéen. C'est pourquoi je préfère l'hypothèse de la chute d'un astéroïde géant.

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- Autrement dit, vous pensez qu'un objet spatial de taille considérable serait tombé sur la Terre non seulement il y a des millions d'années, mais aussi dans un passé relativement proche?

Gueorgui Nefediev: Cette théorie est également soutenue par de nombreux autres scientifiques. Elle a notamment été présentée par le chercheur allemand Otto Muck dans son livre Une épée de feu au-dessus de l'Atlantique.

- Cette civilisation aurait dû laisser des artefacts: des pièces de monnaie, des œuvres d'art, des tablettes d'argile. A-t-on réussi à trouver quelque chose de ce genre?

Gueorgui Nefediev: Nous n'avons trouvé aucun artefact avec l'inscription «Made in Atlantis». Nous constatons pourtant partout des témoignages faisant état d'une civilisation très avancée d'un point de vue technologique, qui a existé dans un passé très lointain. Je ne parle pas nécessairement de l'Atlantide, mais d'une civilisation ancienne qui disposait de technologies de ce genre. Prenons, par exemple, les pyramides d'Égypte. Les Japonais ont tenté de construire une petite pyramide à la fin du XXe siècle, mais ont échoué.
Sans parler de la maçonnerie polygonale au Pérou et en Bolivie, ou des technologies de «pâte à modeler». C'est absolument fantastique, impossible même à l'époque contemporaine.

- Qu'est-ce que la découverte de l'Atlantide pourrait apporter à l'humanité?

Et si la Sardaigne était la mythique Atlantide?
Gueorgui Nefediev: Contrairement au cas de Troie, découverte par Heinrich Schliemann, la découverte éventuelle de l'Atlantide ne démontrera pas seulement que Platon avait raison, tout comme Homère. Elle devrait également apporter deux changements radicaux. Premièrement, elle devrait modifier toute la présentation historique (et non seulement historique) du monde. Il faudrait revoir le mythe de progrès affirmant que nous passons des formes primitives de civilisation vers des formes plus avancées. L'Atlantide pourrait faire s'effondrer le mythe du caractère linéaire du processus historique. Nous nous rendrions compte du fait qu'il est spiroïdal, comprendrons qu'il existait par le passé des civilisations plus développées que la nôtre d'un point de vue technologique (et pas seulement), mais détruites par un cataclysme planétaire.
Deuxièmement, si l'on prouvait le caractère cyclique ou périodique des catastrophes de ce genre dans l'histoire de la Terre, cela nous forcerait à en rechercher le mécanisme déclencheur. Cela pourrait notamment être le passage régulier d'une comète (par exemple, de la comète de Halley) ou la fonte des glaces polaires. La compréhension des raisons de la destruction de l'Atlantide pourrait aider notre civilisation à survivre un désastre éventuel. Cela pourrait constituer l'objectif d'une planification stratégique globale au niveau de l'État.

- Mais il faut d'abord établir la nature de l'Atlantide-même. Correspondait-elle à la description de Platon? Ou l'Atlantide réelle était-elle différente de celle présentée dans ses Dialogues?

Gueorgui Nefediev: Platon a mentionné plusieurs déluges, dont des chroniques plus précises avaient été gardées par les Égyptiens dans le temple de la déesse Neith à Saïs. Platon connaissait mieux la civilisation crétoise, car elle était historiquement plus proche de lui que celle de l'Atlantique. A mon avis, sa destruction s'est superposée à d'autres catastrophes dans la conscience historique des Grecs. Il s'agit du phénomène de palimpseste: une image nouvelle et plus spectaculaire se superpose à un tableau plus ancien.

- Est-il possible d'obtenir une coopération internationale dans les recherches de l'Atlantide? Ou est-elle déjà une réalité, marquée par un partenariat de tous les atlantologues du monde?

Gueorgui Nefediev: Il y a eu par le passé des équivalents occidentaux de notre société d'atlantologie. Elle est considérée comme russe, mais est aujourd'hui de fait internationale car nous coopérons avec des atlantologues étrangers, notamment américains. Beaucoup de nos collègues étrangers sont un peu jaloux en constatant qu'il existe en Russie une organisation active et que nous pouvons nous réunir et organiser des forums.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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