Le plan banlieue est mort… Vive le plan Banlieue! En effet, Emmanuel Macron enterrait, en mai dernier, le projet de Jean-Louis Borloo, évalué à 48 milliards d'euros, qui avait pour objectif de redynamiser la politique de la Ville. Pis, le président de la République estimait alors qu'il fallait une nouvelle approche et qu'en 2018: «poursuivre dans cette logique est poursuivre dans l'assignation à résidence, la politique spécialisée […] je n'y crois pas.»
«Lorsque l'on compare avec d'autres situations, par exemple aux États-Unis où les ghettos noirs américains sont complètement délaissés, car l'intervention de l'État sur tout ce qui est politique sociale est très faible, on voit que l'on n'a pas du tout les mêmes situations en termes de violences urbaines, d'économie parallèle, de pauvreté et de morts brutales.»
«Quand on a des politiques spécifiques qui sont mises en place pour ces populations, mais sans vraiment prendre en considération les besoins et désirs des individus, sans faire en sorte qu'eux-mêmes soient acteurs et respectés, c'est très souvent une voie qui mène vers l'échec.»
Un échec également renforcé par l'essence même des différentes politiques de la Ville, conçues pour jouer le rôle de «rustines». En effet, comme l'explique Fabien Truong, «les problèmes que l'on a dans les quartiers populaires sont liés à l'absence de mixité sociale, à la disparition du plein emploi et au manque d'emploi dans ces zones géographiques. Tous ces facteurs sont les conséquences d'un changement de société, de contextes économiques beaucoup plus larges, beaucoup plus globaux.»
«De ce point de vue là, les problèmes rencontrés en banlieues sont des symptômes plus profond et révélateur des dysfonctionnements de la société toute entière, pas des problèmes de banlieue.»
Pour Fabien Truong, le cœur du problème reste l'accès à l'emploi, qui découle des questions de transformation du post-fordisme. «D'un point de vue purement fonctionnel, vous aviez dans les quartiers populaires dans les années 50 à 70 toute une réserve d'ouvriers qui avait du travail. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas parce que le marché de l'emploi s'est transformé, il y a un problème de surnuméraire.»
«Je vais être caricatural, mais ce n'est pas en repeignant une cage d'escalier que vous allez régler la question de l'emploi. Tout le monde le sait très bien.»
«Les quartiers populaires fournissent une bonne partie des emplois dans les centres urbains et centres-ville qui ne seraient pas toujours fournis par les habitants de ces centres-ville, il y a un jeu de flux très important» explique Fabien Truong.
Et d'autres parts, comment mieux partager le travail ou créer de nouvelles formes de travail dans de nouveaux secteurs? Cette deuxième option nécessite une véritable politique de formation, comme le détaille Fabien Truong.
«Dans ce cas, il faut massivement former la jeunesse vers les nouveaux secteurs porteurs, mais attention, il n'y a pas que le 2.0…! Comment on fait par exemple en France pour anoblir le travail manuel quand il y a tout un tas de métiers qui ont été complètement dévalorisés symboliquement avec la survalorisation du seul travail intellectuel.»
Et d'ajouter,
«Un certain nombre de jeunes pourrait pénétrer certains secteurs de l'emploi, mais ils sont dévalorisés, dévalorisants, ça pose des questions de plus grande ampleur.»
Reste à savoir, si la création, par l'Élysée, d'une «plate-forme des stages» qui espère assurer 30.000 «stages de qualité» sera suffisante pour répondre au défi majeur de l'emploi dans les banlieues et les zones périurbaines.