Curiosité, méfiance et attirance réciproque, entre français et Russes, c'est un peu l'amour vache. C'est en tout cas l'enseignement que l'on peut tirer des études croisées de deux instituts de sondage, le français Harris Interactive et le russe VTsIOM (Centre russe d'étude de l'opinion publique), sur la perception de chaque pays par les citoyens de l'autre.
Le résultat est quasiment sans surprise: l'opinion sur l'«autre» est scindée en parties presque égales. 54% des Français et 42% des Russes évaluent positivement les relations bilatérales entre leurs pays respectifs. Par ailleurs, 57% des Français font confiance aux médias hexagonaux, un sentiment un peu plus mitigé en Russie, puisque seuls 46% des répondants, tandis que les Russes font confiance à 46% des répondants.
Jean Radvanyi, politologue, professeur à l'Institut des langues et civilisations orientales (Langues'O), commente ces résultats pour Sputnik France:
«En Russie, on éprouve une "curiosité inquiète" envers la France. Autrement dit, les Russes s'intéressent à notre pays, mais s'inquiètent de certaines manifestations tant dans la politique étrangère française, que dans la situation avec des migrants, avec des manifestations, avec des émeutes dans la banlieue parisienne.»
Pour le politologue, il semble évident que les Russes interrogés connaissent mieux la France que les Français, la Russie. Et il donne un exemple: quand on demande à un Russe quels écrivains français ils peuvent citer, les noms de Victor Hugo, Jules Verne sortent naturellement, pour les monuments culturels, Notre-Dame et la tour Eiffel sont nommées… Par contre, si on pose la même question aux Français, ils éprouvent des difficultés à répondre.
«L'ancienne génération connaît la Russie mieux que les jeunes Français,» assure Jean Radvanyi.
Les résultats des recherches menées par Harris Interactive ont étés publiés à la veille de la Coupe du monde. Le sondage montrait que l'opinion française sur la Russie est fortement divisée, avec 57% ayant une vision négative de la Russie, bien que son image aux yeux des Français se soit améliorée par rapport à 2014, lorsque 78% des répondants avaient une perception négative de la Russie.
«La Coupe du Monde a eu un impact positif sur l'opinion de la Russie et ses conséquences seront entendues pendant longtemps, assure le professeur de l'INALCO, mais j'ai remarqué lors du championnat que les supporters français n'étaient pas nombreux, ils étaient influencés par l'image négative de la Russie dans les médias, ont entendu parler de l'insécurité et du "régime autoritaire".»
«La France a gagné au stade Loujniki devant une poignée de fans français,» regrette Jean Radvanyi.
«Les médias russes et français devraient faire des efforts pour créer une image plus positive du pays partenaire, estime Jean Radvanyi. Mais, en même temps, c'est un travail que l'on fait depuis longtemps. A mon avis, c'est pour cela aussi que le Dialogue de Trianon a été créé: pour multiplier les points de contact entre les sociétés civiles de nos deux pays.»