Alors que la campagne de communication antirusse menée par le gouvernement de Theresa May dure depuis maintenant un mois, le laboratoire spécialisé de Porton Down a rendu ses conclusions le 3 avril. Et son directeur, Gary Aitkenhead, a reconnu dans une interview accordée à Sky News que si les chercheurs avaient pu établir le type d'agent utilisé, ils n'avaient en revanche pas pu déterminer avec certitude la source du poison.
«À ce stade, avec le travail accompli jusqu'ici, nous avons établi qu'il s'agissait de Novichok. […] Ce n'est pas notre travail de dire où il a été fabriqué.»
Le scientifique a ensuite expliqué que la provenance de l'agent toxique pouvait être «établie en compilant plusieurs informations», auxquelles le gouvernement britannique aurait accès, tout en insistant sur le fait que les preuves scientifiques ne sont «qu'une information» nécessaire, mais insuffisante pour déterminer l'origine de l'attaque.
«Selon des experts internationaux, des substances toxiques similaires peuvent être produites dans une vingtaine de pays à travers le monde.»
À Moscou également, de nombreuses personnalités ont immédiatement réagi à ces déclarations. Le chef du renseignement russe a rappelé que la Russie avait toujours nié être impliquée dans la tentative d'assassinat de M. Skripal avant de qualifier les accusations britanniques de «provocation grotesque».
La porte-parole du Ministère des affaires étrangères russe, Maria Zakharova, a quant à elle choisi l'ironie en expliquant que Londres pourrait aller jusqu'à blâmer les hackers russes tandis que son homologue auprès de l'administration présidentielle, Dimitri Peskov, estimait que «ce marasme [était] allé trop loin» avant d'ajouter:
«Le ministre britannique des Affaires étrangères, qui a accusé le Président Poutine, et la Première ministre devront d'une manière ou d'une autre regarder dans les yeux leurs collègues de l'Union européenne […] et devront d'une manière ou d'une autre présenter leurs excuses à la Russie.»
Car les déclarations de Gary Aitkenhead viennent contredire celles de Boris Johnson, ministre des Affaires étrangères dans le gouvernement de Theresa May, qui a expliqué à plusieurs reprises que le personnel de Porton Down avait pu établir «sans l'ombre d'un doute» la provenance de l'agent toxique utilisé contre M. Skripal et sa fille.
«Le personnel de Porton Down a été absolument catégorique. J'ai demandé personnellement à l'un d'entre eux "En êtes-vous sûrs?" et il a répondu "Sans l'ombre d'un doute". Nous n'avons donc pas d'autres alternatives que de prendre les mesures nécessaires», déclarait Boris Johnson à la Deutsche Welle le 20 mars dernier.
Le mensonge du ministre des Affaires étrangères de Theresa May aurait presque pu passer inaperçu, si le ministère n'avait pas supprimé un tweet du 22 mars dans lequel il écrivait que les experts de Porton Down avaient déterminé que le poison avait été «produit en Russie».
Au lieu de s'excuser pour des déclarations sur l'affaire Skripal démenties depuis par Porton Down, le ministère des Affaires étrangères du Royaume-Uni a effacé la preuve de les avoir jamais faites. Heureusement que j'ai aussi fait une capture d'écran en tweetant ça pour la 1re fois.
Des déclarations mensongères qui dans l'immédiat n'ont pas l'air d'inquiéter Boris Johnson outre mesure, au vu des réactions dans la presse britannique:
Imaginez que le Labour ait mal informé le Royaume-Uni sur l'empoisonnement de #Skripal. Imaginez qu'un ministre des Affaires étrangères issu du Labour ait MENTI comme #BorisJohnson. Les médias demanderaient sa démission (et sa tête!). OÙ EST LE SCANDALE AUJOURD'HUI? @BBCNews #RussiaGate