Dépigmentation de la peau, une pratique africaine à la mode mais très dangereuse

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crème, image d'illustration - Sputnik Afrique, 1920, 11.02.2023
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En Afrique, la dépigmentation volontaire de la peau est devenue une mode incontournable. Cette pratique, désastreuse, se répand non seulement en ville mais aussi à la campagne. Sputnik Afrique a parlé à plusieurs militantes contre ce fléau.
"Au Tchad, cette pratique est devenue banale", a indiqué à Sputnik Afrique Achouak Daoud Mahamat, jeune entrepreneuse tchadienne dans le domaine du cosmétique bio, qui a subi cette procédure. Selon elle, elle est utilisée par des femmes vivant en ville mais surtout dans les villages.
"Elles ne savent pas comment l'utiliser, même s’il faut se pigmenter, elles ne savent pas." Parce que le climat au Tchad n'y est pas favorable. Et l'exposition au soleil amène la dégradation de la peau. Cela "entraîne aussi les infections", dit-elle.
Cette mode, qui consiste à obtenir un teint clair, est destinée à se rendre attirante et "bénéficier de l'attention des gens". "Aujourd'hui, même les jeunes filles de quinze, seize ans, les filles qui ne sont même pas majeures utilisent ces produits et elles ne savent pas leur dangerosité."
Or, cela peut endommager le foie, parfois les reins, et peut entraîner aussi des lésions cérébrales chez le fœtus pour les femmes enceintes, énumère-t-elle. Et de partager sa propre expérience:
"J'ai été dépigmentée depuis des années, Mais j'ai vu que cela m'avait entraîné un dégât pour la peau, mes pieds et mes mains."

Pour certaines, c'est du "suivisme"

"C'est vrai que la dépigmentation dans le pays a pris de l'ampleur", concède la jeune activiste Zara loksala Vanzou, responsable des interventions sociales et des affaires juridiques au Parlement des jeunes filles leaders du Tchad. Mais beaucoup regrettent d'avoir suivi cette mode, d’après elle.
"Avant de se lancer dans la dépigmentation, il faut penser aux conséquences qu'on va rencontrer plus tard. Il y a assez de conséquences, comme le cancer de la peau."
L’épiderme devient en effet fragile. "La plupart des jeunes sont conscientes, mais pour certaines, c'est juste par suivisme."
Afin de combattre ce fléau, les militantes font des affiches qui montrent les méfaits de cette pratique. Et donnent les témoignages des personnes qui ont déjà vécu cela.
D'après la consultante sénégalaise Dija Boye, les pratiques de dépigmentation cosmétique volontaire (DCV) sont très répandues dans son pays, aussi bien qu’au Nigéria, au Congo, en Côte d'Ivoire, au Mali, en somme un peu partout en Afrique.

Des standards occidentaux

Au Sénégal, ce sont en majorité des femmes de 18 à 60 ans, a-t-elle confié à Sputnik Afrique. "Souvent, la plupart de celles qui utilisent ces produits ont entre la vingtaine et la trentaine", dit la femme qui a participé à plusieurs campagnes contre la DCV. Mais "on voit de plus en plus d’hommes d'autres contrées, par exemple au Congo, qui ont recours à la dépigmentation".
La popularité de cette pratique, selon elle, s'explique par le fait que le "référencement du beau a été altéré par la néo-colonisation". L'Africain attire plus avec tons plus clairs, pour ne pas dire blanc. "On croit que plus on est de carnation claire, plus on est jolie."
Le premier danger de la dépigmentation, c'est la fragilisation de la peau, explique Dija Boye. "On est en train d'agresser et de fragiliser cette peau de manière quotidienne en y mettant des produits toxiques, ou en tout cas des produits dont l'usage n'était pas destiné à cela."
Ensuite, c'est l'apparition de vergetures parce que la dépigmentation affecte la cicatrisation. "On entend souvent parler de problème de risque diabétique! On parle souvent d'hypertension!"
Pour résister à une pression sociale, il faudrait souvent pouvoir se construire une force de caractère, estime la militante. S'il s'agit d'un problème d'estime de soi. Si la personne ne se croit pas belle, il faut dans ce cas attirer l'attention sur l'estime de soi et l'acceptation de soi.
"Mais en général, le message est unique: c'est de ne pas s'y adonner."

Il y a celles qui sont satisfaites

Il existe cependant des femmes qui ne regrettent pas d’avoir eu recours à la DCV.
La Sénégalaise Ndeye Arame Ka, directrice de la compagnie Skin Care By Kaba, qui utilise elle-même des produits cosmétiques de ce genre, a confié à Sputnik Afrique avoir décidé de recourir à la DCV à l'âge de 23 ans.
"Pour la procédure, j'achetais des produits cosmétiques et je faisais mes propres mélanges sur la base de collagène et de carotte."
À part l'allergie, elle n'a pas eu de problèmes de santé. Pour cette raison, elle aurait eu recours à la DCV de nouveau parce que ces procédures n'ont pas gâté sa peau. Elle utilise des produits pour la DCV depuis 2012.
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