Influenceurs plus riches que des grands patrons: est-ce à la portée de tout le monde?
© Photo Pixabay / geraltInfluenceurs et réseaux sociaux.
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Cela semble facile de créer un compte gratuit sur une plateforme comme TikTok ou Twitch en espérant devenir un influenceur célèbre. L’économiste Philippe Béchade analyse pour Le Désordre mondial les intérêts en jeu.
Il y a encore quelques années, quand une soi-disant célébrité en ligne, un "influenceur", gagnait beaucoup d’argent, les gens pensaient que sa fortune provenait de sa simple présence sur le Web. Or, ce n’était absolument pas le cas. L’écrasante majorité de ces stars tirait sa renommée et sa fortune de la télévision, du cinéma ou d’une marque commerciale connue. Leur présence en ligne n’était que la continuité et le reflet de leur renommée "hors ligne".
Mais les choses ont changé. Le mois dernier, le Wall Street Journal a relaté que des influenceurs connus uniquement grâce à des plateformes en ligne comme TikTok gagnaient désormais plus que certains PDG de grandes marques américaines. Charli D’Amelio, une danseuse américaine de 17 ans, est ainsi devenue la TikTokeuse la mieux payée au monde. En 2021, elle a gagné 17,5 millions de dollars grâce à la plateforme chinoise qui rassemble un milliard d’utilisateurs dans le monde. C’est plus que les revenus déclarés en 2020 du PDG d’Exxon Mobil, Darren Woods (15,6 millions de dollars) et du PDG de Starbucks, Kevin Johnson (14,7 millions de dollars), selon le journal.
Philippe Béchade, président du think tank "Les Éconoclastes" et rédacteur en chef de La Bourse au quotidien, dresse le portrait des top influenceurs en prenant l’exemple de la plateforme TikTok:
"Huit sur dix sont dans le domaine du ‘lifestyle’, très bancable et monétisable, car on rentre dans le secteur marchand avec le placement de produits ou de services. On est très loin de la philosophie de l’influenceur politique qui peut peser sur les grandes tendances."
Qui décide aujourd’hui du succès des influenceurs?
"Il y a un phénomène d’alchimie, et puis il y a les algorithmes qui peuvent créer une accélération alors que les médias mettaient autrefois le focus sur une personnalité. C’est ce que l’on appelle l’effet de propagation virale", explique l’économiste.
Par ailleurs, un rapport sur les revenus générés par Twitch, l’application de streaming appartenant à Amazon, a été divulgué en octobre dernier. Il a révélé que des "gamers" et des animateurs de talk-show amateurs avaient gagné des millions de dollars sur une période de 26 mois, uniquement en abonnements directs, dons et revenus publicitaires.
"En effet, les gamers ont été les premiers à avoir des audiences de plus de 100 millions de followers. Les jeux en ligne sont planétaires".
Quel pourrait être l’impact politique et économique de cette tendance sur notre monde? Il ne fait aucun doute que la richesse donne un pouvoir d’influence. Kim Kardashian, star de téléréalité et influenceuse, a ainsi réussi à parler avec Donald Trump à propos de la réforme des prisons.
"On peut imaginer que les algorithmes ne sont peut-être pas neutres et que des influenceurs potentiels sont carrément censurés parce qu’ils ont eu une réflexion ou qu’ils sont critiques des autorités ou des Gafam. Il doit y avoir des choses à ne pas dire sur les réseaux pour ne pas s’en faire bannir", estime Philippe Béchade.