Gaz hilarant: "C’est inquiétant lorsque ça concerne des phénomènes de masse"

Cartouche protoxyde d'azote - Sputnik Afrique, 1920, 20.01.2022
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En vogue chez les jeunes, l’usage récréatif du protoxyde d’azote serait responsable d’une augmentation des troubles neurologiques, dangereux aussi pour la société. Jean-Charles Dupuy, de SOS Addictions, alerte sur un phénomène en expansion.
Aux abords de certains lycées ou collèges, un œil averti peut vite repérer les petites cartouches grises de protoxyde d’azote qui jonchent le sol.
Un endroit incongru pour ce gaz qui est utilisé en anesthésie, dans l’industrie ou encore en cuisine dans les siphons de crème Chantilly. Sauf, que depuis quelques années, le "proto" est détourné de son usage à des fins récréatives chez les plus jeunes. Un mésusage qui consiste à l’inhaler par le biais d’un ballon.

"Cela provoque une euphorie, ils ressentent comme une distorsion des choses: une montée dans le cerveau qui fait qu’ils sont totalement hilares pendant un bref instant", explique Jean-Charles Dupuy, le vice-président de SOS Addictions.

Une pratique qui peut pourtant avoir de graves conséquences, puisqu’elle peut causer une asphyxie par manque d’oxygène, une perte de connaissance ou encore une désorientation. Consommé à forte dose et/ou sur une longue période, le "proto" peut provoquer des atteintes de la moelle épinière ou des problèmes psychiques.

Un produit dangereux

Des troubles neurologiques qui seraient d’ailleurs en forte hausse chez les jeunes consommateurs. Ainsi selon un rapport de l’Agence de sécurité sanitaire, 134 cas, dont 126 symptomatiques, ont été rapportés durant 2020 aux centres antipoison. Un quart de ces cas ont été signalés en Île-de-France. L’agence parle d’ailleurs de "croissance" qui s’accélère. Et pour cause, en 2019 il y avait eu 46 cas et 20 entre 2017 et 2018.
Un phénomène qui n’étonne guère le vice-président de SOS Addictions: "on a commencé à en entendre parler il y a plus de cinq ans". La différence, explique-t-il, se trouve dans le fait que "les gamins se sont emparés de cela". En effet, 5,5% des élèves de 3e disent avoir déjà essayé le gaz hilarant, d’après une enquête menée par l’Observatoire français des drogues et toxicomanies, publié récemment.

Accidents sous "proto"

Une initiation précoce qui pourrait être encore plus dangereuse "si les enfants en consomment en plus de l’alcool ou des produits à base sirop qui contiennent des opiacés", car "cela majore les risques", prévient Jean-Charles Dupuy.

"C’est inquiétant lorsque ça concerne des phénomènes de masse", alerte le vice-président de SOS Addictions.

Si les très jeunes sont touchés par ce fléau, les jeunes adultes ne sont malheureusement pas en reste. En témoignent, les nombreux rodéos sauvages en trottinette, sous gaz hilarant, qui ont eu lieu sur les Champs-Élysées. Ou encore l’accident causé par une automobiliste ayant renversé cinq piétons après avoir consommé du "proto".
Certaines préfectures ont déjà interdit l’usage de ce gaz sur la voie publique. C’est le cas par exemple des Alpes-Maritimes et des Hauts-de-Seine. Par ailleurs, le Parlement s’est emparé de cette question de santé publique en adoptant, en mai dernier, une loi interdisant notamment le fait "d’offrir à un mineur du protoxyde d’azote, quel qu’en soit le conditionnement", mais également d’en vendre, y compris aux personnes majeures, dans les débits de boissons ainsi que dans les débits de tabac.
Suffisant pour endiguer le problème? Rien n’est moins sûr.

"Comme d’habitude, on peut contourner la loi avec Internet, donc ceux qui veulent vraiment en obtenir arrivent à en trouver", conclut Jean-Charles Dupuy.

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