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Présidentielle: cent jours avant le scrutin, le nucléaire d’Alstom revient dans le giron français
Présidentielle: cent jours avant le scrutin, le nucléaire d’Alstom revient dans le giron français
Sputnik Afrique
EDF et General Electric sont parvenus à un accord pour le rachat des activités nucléaires d’Alstom. Ce pilier de la souveraineté française se retrouve de... 18.01.2022, Sputnik Afrique
2022-01-18T20:05+0100
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"C’est un moindre mal. Ce n’est pas le schéma idéal, mais cela repasse sous pavillon français." Bien qu’il ne veuille pas "cracher dans la soupe", le montant de la transaction reste dans la gorge de Frédéric Pierucci, ancien président monde de la division chaudière d’Alstom et auteur du livre choc Le Piège américain (Éd. J.-C. Lattès, 2019).Le 12 janvier, Challenges annonçait qu’EDF et General Electric (GE) s’étaient accordés sur le rachat des ex-activités nucléaires d’Alstom. Mais EDF, qui ne voulait pas débourser plus d’un milliard, se retrouverait à régler un chèque de 1,1 milliard d’euros à la firme de Boston.Acquises en 2015 par le groupe américain, les activités nucléaires d’Alstom recouvraient notamment l’entretien des turbines des centrales de conception française (en France et à l’étranger), ainsi que la maintenance de celles des sous-marins d’attaque nucléaires et du porte-avions Charles-de-Gaulle.Le retour de ces activités dans le giron tricolore est d’autant plus appréciable que le groupe américain n’avait pas hésité une seconde à s’en servir comme levier de pression sur EDF. En février 2016, afin de renégocier ses contrats de maintenance, GE était allé jusqu’à suspendre plusieurs jours l’entretien des turbines Arabelle qui équipent les centrales nucléaires… La France ayant bien failli se retrouvée plongée dans le noir.Autre client de taille de cette filiale rebaptisée GEAST (pour GE-Alstom): la Marine nationale, pour l’entretien des turbines des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) et du porte-avions Charles-de-Gaulle.Ce dossier de rachat, présenté comme le "vœu d’Emmanuel Macron" et "souhaité par les pouvoirs publics depuis début 2020", est en réalité dans les tuyaux depuis très exactement… trois ans. Frédéric Pierucci a démarché dès février 2019 les autorités françaises. Sans grand succès au départ."Pendant deux ans, ça a été “circulez il n’y a rien à voir”""Je suis allé deux fois à Bercy proposer ce projet-là", relatait-il en juin 2019, lors d’un colloque à l’Assemblée, regrettant le désintérêt de l’exécutif. En effet, bien que Pierucci soit parvenu à réunir un groupe d’anciens collègues et d’investisseurs prêts à récupérer les anciennes activités nucléaires d’Alstom, il restait à obtenir le feu vert de Bercy. "On ne l’a jamais eu. Pendant deux ans, ça a été “circulez il n’y a rien à voir”", relate notre intervenant.Un attentisme d’autant plus difficile à comprendre pour l’ancien dirigeant que la remise en vente de cette ancienne branche d’Alstom était attendue. En effet, le géant américain rencontre de graves difficultés financières depuis des années.Malgré la cession de toutes ses activités de finance et de gestion aéroportuaire à travers le monde tout au long des années 2010, Goldman Sachs estimait fin 2018 que GE devrait encore céder pour 20 milliards d’actifs afin de résorber une partie de sa dette à l’horizon 2020.Quelques mois plus tard, l’intention du groupe américain de remettre en vente GEAST fuite dans la presse… sans que rien ne se passe côté français. Rien… du moins jusqu’en 2020. "DGE, DGA, Matignon, je suis allé voir tout le monde", se rémémore Pierucci, "puis arrive le Covid et tout le monde devient souverainiste."Une lenteur qui pénalise les finances publiquesLe dossier passe alors de Bercy à l’Élysée. Il est décidé qu’EDF se chargera de récupérer GEAST. Un plan qui déplait fortement à l’énergéticien qui s’interroge sur la viabilité financière d’une telle opération. En effet, GEAST étant l’un de ses fournisseurs, l’énergéticien va donc payer à GE les profits que ses propres futures commandes pourraient faire gagner à l’ex-filiale d’Alstom.Par ailleurs, rien ne dit que les autres clients de GEAST lui resteront fidèles après ce rachat. Parmi les adeptes historiques de ces turbines made in France, le russe Rosatom, principal concurrent d’EDF. S’ajoute à cela le fait qu’une partie des activités de la filiale sont condamnées par la législation européenne en matière de lutte contre le réchauffement climatique, dans la mesure où elles versent dans le charbon.Bref, là encore, les choses ont traîné en langueur. Il a fallu attendre fin septembre 2021 pour que l’ouverture des négociations avec GE soit enfin annoncée… Soit deux ans après la mise en vente de la filiale. Un timing parfait pour Emmanuel Macron, ainsi que GE, mais beaucoup moins pour le contribuable.Moins de trois semaines après le début des négociations, Emmanuel Macron fait volte-face sur le nucléaire. Lors de la présentation de son plan France 2030, le chef de l’État sort un sacré lapin de son chapeau, annonçant vouloir "relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays". En signe de bonne volonté, l’occupant de l’Élysée promet un investissement d’un milliard d’euros dans les petits réacteurs modulaires (SMR).Une série de mesures qui ne fait que renforcer l’appétit et la position de la partie américaine. D’où la facture plus salée que prévu pour le groupe public tricolore. Mais qu’à cela ne tienne, du côté de l’exécutif, on met en avant l’objectif de maintenir la "souveraineté nationale".Un rachat qui tombe à point nommé?Un comble! En juin 2014, c’est Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint de l’Élysée, qui plaide en faveur de la vente d’Alstom à l’américain. Un dossier ficelé lors de son passage à la tête du ministère de l’Économie entre août 2014 et août 2016. C’est d’ailleurs son conseiller à Bercy d’alors, en charge du financement export, Hugh Bailey, qui deviendra le lobbyste de GE France avant d’en prendre la tête en avril 2019.Un rebondissement parmi tant d’autres dans une affaire à l’envergure de scandale d’État. Menée par le député d’opposition Olivier Marleix (LR), une commission d’enquête parlementaire avait accablé la responsabilité de l’actuel locataire de Élysée dans ce dossier.Faute de parvenir à incriminer le chef de l’État, protégé par la majorité présidentielle au Palais Bourbon, le député avait dénoncé un "pacte de corruption" au profit d’Emmanuel Macron, alors en recherche de soutiens financiers pour assouvir ses ambitions politiques.Dans une lettre adressée au Parquet national financier début 2019, l’élu s’"interroge [sur] le fait que l’on puisse retrouver dans la liste des donateurs ou des organisateurs de dîners de levée de fonds des personnes qui auraient été intéressées aux ventes précitées" d’actifs industriels stratégiques français, tels qu’Alstom, Alcatel, Technip ou encore STX.Quoi qu’il en soit, Emmanuel Macron est attendu à Belfort depuis plusieurs mois. Ex-site historique d’Alstom où est produite la fameuse turbine Arabelle, qui équipe le tiers du parc mondial de centrales nucléaires, le chef de l’État entend y célébrer la "reconquête industrielle française" sous son quinquennat… Y penser réclame du culot. Le faire relève de l’indécence.
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nucléaire, emmanuel macron, alstom, general electric, le parquet national financier (pnf), belfort, alcatel-lucent, olivier marleix, technipfmc, edf, corruption, charles de gaulle (porte-avions), industrie, extraterritorialité
"C’est un moindre mal. Ce n’est pas le schéma idéal, mais cela repasse sous pavillon français." Bien qu’il ne veuille pas "cracher dans la soupe", le montant de la transaction reste dans la gorge de Frédéric Pierucci, ancien président monde de la division chaudière d’Alstom et auteur du livre choc Le Piège américain (Éd. J.-C. Lattès, 2019).
Le 12 janvier,
Challenges annonçait qu’EDF et General Electric (GE) s’étaient accordés sur le
rachat des ex-activités nucléaires d’Alstom. Mais EDF, qui ne voulait pas débourser plus d’un milliard, se retrouverait à régler un chèque de 1,1 milliard d’euros à la firme de Boston.
"On arrive à un montant astronomique, très loin des évaluations de base. Il fallait le faire quand je l’ai proposé en 2019, car là on l’aurait racheté au bon prix", réagit l’ancien cadre supérieur d’Alstom auprès de Sputnik.
Acquises en 2015 par le groupe américain, les activités nucléaires d’Alstom recouvraient notamment l’entretien des turbines des centrales de conception française (en France et à l’étranger), ainsi que la maintenance de celles des sous-marins d’attaque nucléaires et du porte-avions Charles-de-Gaulle.
Le retour de ces activités dans le giron tricolore est d’autant plus appréciable que le groupe américain n’avait pas hésité une seconde à s’en servir comme levier de pression sur EDF. En février 2016, afin de renégocier ses contrats de maintenance, GE était allé jusqu’à
suspendre plusieurs jours l’entretien des turbines Arabelle qui équipent les centrales nucléaires… La France ayant bien failli se retrouvée plongée dans le noir.
Autre client de taille de cette filiale rebaptisée GEAST (pour GE-Alstom): la Marine nationale, pour l’entretien des turbines des sous-marins nucléaires d’attaque (SNA) et du porte-avions Charles-de-Gaulle.
Ce dossier de rachat, présenté comme le "
vœu d’Emmanuel Macron" et "
souhaité par les pouvoirs publics depuis début 2020", est en réalité dans les tuyaux depuis très exactement… trois ans. Frédéric Pierucci a démarché
dès février 2019 les autorités françaises. Sans grand succès au départ.
"Pendant deux ans, ça a été “circulez il n’y a rien à voir”"
"
Je suis allé deux fois à Bercy proposer ce projet-là", relatait-il en juin 2019,
lors d’un colloque à l’Assemblée, regrettant le désintérêt de l’exécutif. En effet, bien que Pierucci soit parvenu à réunir un groupe d’anciens collègues et d’investisseurs prêts à récupérer les anciennes activités nucléaires d’Alstom, il restait à obtenir le feu vert de Bercy. "
On ne l’a jamais eu. Pendant deux ans, ça a été “circulez il n’y a rien à voir”", relate notre intervenant.
Un attentisme d’autant plus difficile à comprendre pour l’ancien dirigeant que la remise en vente de cette ancienne branche d’Alstom était attendue. En effet, le géant américain rencontre de graves difficultés financières depuis des années.
"General Electric était avant tout une banque: GE Capital. À l’époque des subprimes, le gouvernement américain a injecté 139 milliards de dollars dans cette seule entreprise pour la sauver de la banqueroute. […] Sinon, c’était Alstom qui rachetait GE pour 1 dollar symbolique", rappelle Frédéric Pierucci. "Donc ce n’était pas compliqué de comprendre qu’il y avait un mur de dette qui arrivait."
Malgré la cession de toutes ses activités de finance et de gestion aéroportuaire à travers le monde tout au long des années 2010, Goldman Sachs estimait fin 2018 que GE devrait encore céder pour 20 milliards d’actifs afin de résorber une partie de sa dette à l’horizon 2020.
Quelques mois plus tard, l’intention du groupe américain de remettre en vente GEAST fuite dans la presse… sans que rien ne se passe côté français. Rien… du moins jusqu’en 2020. "DGE, DGA, Matignon, je suis allé voir tout le monde", se rémémore Pierucci, "puis arrive le Covid et tout le monde devient souverainiste."
Une lenteur qui pénalise les finances publiques
Le dossier passe alors de Bercy à l’Élysée. Il est décidé qu’EDF se chargera de récupérer GEAST. Un plan qui déplait fortement à l’énergéticien qui s’interroge sur la viabilité financière d’une telle opération. En effet, GEAST étant l’un de ses fournisseurs, l’énergéticien va donc payer à GE les profits que ses propres futures commandes pourraient faire gagner à l’ex-filiale d’Alstom.
Par ailleurs, rien ne dit que les autres clients de GEAST lui resteront fidèles après ce rachat. Parmi les adeptes historiques de ces turbines made in France, le russe Rosatom, principal concurrent d’EDF. S’ajoute à cela le fait qu’une partie des activités de la filiale sont condamnées par la législation européenne en matière de lutte contre le réchauffement climatique, dans la mesure où elles versent dans le charbon.
Bref, là encore, les choses ont traîné en langueur. Il a fallu attendre fin septembre 2021 pour que l’ouverture des négociations avec GE soit enfin annoncée… Soit deux ans après la mise en vente de la filiale. Un timing parfait pour Emmanuel Macron, ainsi que GE, mais beaucoup moins pour le contribuable.
"Comment le dire de manière… positive? Lorsque vous avez le Président qui dit qu’on va racheter une entreprise à huit mois des élections, lorsque vous êtes vendeur, vous vous frottez les mains. Après avoir dit cela, on dit “je vais relancer le nucléaire en France” [Macron l’a annoncé le 12 octobre 2021, ndlr], donc le prix continue de monter… sachant qu’on vend l’entité au client: donc on capitalise des profits qui en fait ne sont pas des profits pour l’acheteur, car l’acheteur c’est le client."
Moins de trois semaines après le début des négociations, Emmanuel Macron fait volte-face sur le nucléaire. Lors de la présentation de son plan France 2030, le chef de l’État sort un sacré lapin de son chapeau, annonçant vouloir "relancer la construction de réacteurs nucléaires dans notre pays". En signe de bonne volonté, l’occupant de l’Élysée promet un investissement d’un milliard d’euros dans les petits réacteurs modulaires (SMR).
Une série de mesures qui ne fait que renforcer l’appétit et la position de la partie américaine. D’où la facture plus salée que prévu pour le groupe public tricolore. Mais qu’à cela ne tienne, du côté de l’exécutif, on met en avant l’objectif de maintenir la "souveraineté nationale".
Un rachat qui tombe à point nommé?
Un comble! En juin 2014, c’est Emmanuel Macron, alors secrétaire général adjoint de l’Élysée, qui plaide en faveur de la vente d’Alstom à l’américain. Un dossier ficelé lors de son passage à la tête du ministère de l’Économie entre août 2014 et août 2016. C’est d’ailleurs son conseiller à Bercy d’alors, en charge du financement export, Hugh Bailey, qui deviendra le lobbyste de GE France
avant d’en prendre la tête en avril 2019.
Un rebondissement parmi tant d’autres dans une affaire à l’envergure de scandale d’État. Menée par le député d’opposition Olivier Marleix (LR), une commission d’enquête parlementaire avait accablé la responsabilité de l’actuel locataire de Élysée dans ce dossier.
Faute de parvenir à incriminer le chef de l’État, protégé par la majorité présidentielle au Palais Bourbon, le député avait
dénoncé un "pacte de corruption" au profit d’Emmanuel Macron, alors en recherche de soutiens financiers pour assouvir ses ambitions politiques.
Dans une lettre adressée au Parquet national financier début 2019, l’élu s’"interroge [sur] le fait que l’on puisse retrouver dans la liste des donateurs ou des organisateurs de dîners de levée de fonds des personnes qui auraient été intéressées aux ventes précitées" d’actifs industriels stratégiques français, tels qu’Alstom, Alcatel, Technip ou encore STX.
Quoi qu’il en soit, Emmanuel Macron est attendu à Belfort depuis plusieurs mois. Ex-site historique d’Alstom où est produite la fameuse turbine Arabelle, qui équipe le tiers du parc mondial de centrales nucléaires, le chef de l’État entend y célébrer la "reconquête industrielle française" sous son quinquennat… Y penser réclame du culot. Le faire relève de l’indécence.