La Russie envisage d’effacer la dette africaine: la diplomatie tchadienne se confie à Sputnik

© Photo Djibrine Nouh AlwaliN'Djamena, Tchad
N'Djamena, Tchad - Sputnik Afrique, 1920, 10.12.2021
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À l’issue de négociations avec son homologue russe, le ministre tchadien des Affaires étrangères se penche pour Sputnik sur la coopération bilatérale, l’aide de la Russie dans la formation de cadres militaires ou encore les défis de la transition dans son pays.
Relations économiques, collaboration dans l’exploitation de ressources naturelles, processus de transition au Tchad, autant de dossiers qui ont été abordés par le ministre tchadien des Affaires étrangères Mahamat Cherif Zene dans une interview à Sputnik, après avoir effectué une visite à Moscou.
Sputnik: Vous avez discuté récemment avec le ministre Lavrov de la coopération entre la Russie et le Tchad. Dans quels secteurs N'Djaména souhaite-t-il la développer?
Mahamat Cherif Zene: "Cette visite s’inscrit dans le cadre du renforcement des relations bilatérales et nous avons eu des échanges fructueux et approfondis. Nous avons souligné la nécessité de renforcer cette coopération par des investissements concrets dans des domaines d’intérêt commun. Il va falloir peut-être trouver un cadre dans lequel on peut les identifier. Pour l'instant, il n’y a pas de domaines précis."
Sputnik: Avez-vous discuté de la formation d’une commission mixte ou de la visite d’investisseurs russes au Tchad pour identifier ces domaines?
Mahamat Cherif Zene: "Il a été dit que des investisseurs seraient intéressés par une visite au Tchad. Nous y sommes ouverts. Une fois qu’ils seront sur place, nous verrons ensemble dans quels secteurs ils peuvent investir. Nous avions, d’une manière générale, souligné la nécessité d’établir des contacts entre les deux secteurs privés. Je pense que cela peut faciliter les échanges économiques et commerciaux. Pour l’heure, ces échanges se situent à un niveau très inférieur par rapport au potentiel."
Sputnik: Le pétrole est-il le secteur le plus prometteur?
Mahamat Cherif Zene: "Pour le moment je ne peux pas vous dire que tel secteur est plus prometteur qu’un autre. Mais je pense qu’il va falloir d’abord connaître l’intérêt des investisseurs russes, puis exposer les opportunités qu’offre le Tchad. Et cela nécessite un travail de terrain qui va être fait. Mais le terrain n’est pas encore bien préparé pour parler de résultats concrets, de secteurs ou d’investissements. Tous les secteurs peuvent intéresser n’importe quel investisseur. Le Tchad est un pays qui regorge de ressources naturelles qui ne demandent qu’à être exploitées."
Sputnik: Avez-vous parlé de la dette africaine envers la Russie?
Mahamat Cherif Zene: "Non, c’est plutôt la partie russe qui nous a informés que par rapport à la dette de certains pays africains, elle envisage la possibilité de l’effacer en la transformant en des ressources que ces pays peuvent affecter au financement de projets de développement. C’est ce qui a déjà été accordé à cinq pays. Et le Tchad a aussi exprimé le souhait de faire partie de ce groupe."
D’autres créanciers ont déjà réalisé ce genre d’opérations avec des pays en voie de développement. Au lieu de rembourser sa dette au créancier, le pays bénéficiaire prend l’engagement d’affecter le montant à un ou plusieurs projets de développement pour son propre compte.
Sputnik: Concernant la formation des cadres militaires tchadiens, le ministre Lavrov a annoncé que la Russie était prête à aider. Le Tchad invitera-t-il des instructeurs russes?
Mahamat Cherif Zene: "La formation dont Lavrov a parlé à la conférence de presse est celle du maintien de la paix dans les opérations de l’Onu. Et vous savez que le Tchad est un pays qui participe à ces opérations, et plus particulièrement à la MINUSMA (Mission multidimensionnelle des Nations unies au Mali). Nous avons l’un des plus gros contingents avec plus de 1.200 soldats. À cet égard, la Russie possède une riche expérience et Lavrov a promis qu’un service russe compétent aiderait le Tchad à former ce contingent."
Sputnik: L’Union européenne a-t-elle apporté une part des ressources destinées à la transition?
Mahamat Cherif Zene: "L’Union européenne a promis… J’ai eu le privilège d’accompagner le Premier ministre, il y a de cela deux semaines, à Bruxelles. On a rencontré des responsables de l’UE. Ils ont prévu 100 millions d’euros pour la transition, mais rien n’a encore été décaissé. Et dans ces 100 millions d’euros, une partie est prévue pour le dialogue. Alors il est bien de recevoir des ressources, mais il faut recevoir ces ressources-là à temps. Si ce n’est pas le cas, on ne peut pas organiser les échéances comme prévu."
Sputnik: La menace sécuritaire peut-elle être une cause du report des élections?
Mahamat Cherif Zene: "Nous espérons que cela n’arrivera pas parce que nous sommes sincères dans notre engagement et nous pensons que les autres le sont aussi, qu’ils vont continuer à privilégier le dialogue.
Le gouvernement est dans une logique de paix et de réconciliation nationale. La guerre n’a jamais rien réglé, contrairement au dialogue et à la réconciliation nationale."
Sputnik: Quels sont les autres défis de la transition au Tchad?
Mahamat Cherif Zene: "Le défi majeur pour l’instant c’est l’insuffisance des ressources financières pour l’organisation des échéances à venir. Le second serait que ceux qui sont armés refusent la voix du dialogue.
Mais je reste optimiste et j’espère que la transition aboutira comme prévu aux objectifs souhaités et attendus par tous les Tchadiens: la formation d’organisations libres, transparentes et démocratiques pouvant ramener définitivement la paix au Tchad et la possibilité pour le pays, meurtri pendant des décennies par la guerre civile, de se consacrer à son développement, donnant la chance aux enfants tchadiens d’aller à l’école, aux autres de se soigner et de vivre normalement comme partout ailleurs dans le monde."
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