Un général émirati soupçonné de torture pourrait prendre la direction d’Interpol, située en France

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Interpol Logo - Sputnik Afrique, 1920, 17.11.2021
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Le général Ahmed Naser Al-Raisi tient la corde pour devenir le nouveau président de l’organisation policière internationale. Il est pourtant soupçonné d’avoir fait torturer des opposants politiques. Le silence français sur la question fait tache.
Récemment pointés du doigt par l’UE pour "violation des droits de l’homme", les Émirats arabes unis voient désormais leur candidat à la présidence d’Interpol pris dans la tourmente. Le général Ahmed Naser Al-Raisi, principal candidat pour ce scrutin, est en effet rattrapé par des affaires de tortures, rapporte Le Monde.
Haut responsable de la sécurité intérieure dans son pays, il est visé par plusieurs plaintes. L’une d’elles déplore notamment les conditions d’emprisonnement "moyenâgeuses" du poète et militant Ahmed Mansoor, réduit à vivre dans une cellule de quatre mètres carrés. Une incarcération qui s’apparente à de la "torture" et à des "actes de barbarie", selon le document.
Même calvaire pour l’universitaire britannique Matthew Hedges, dont l’arrestation à l’aéroport de Dubaï en 2018 avait entraîné un différend politique entre Londres et Abou Dhabi. Soupçonné d’espionnage et retenu prisonnier pendant près de sept mois, il avait déclaré avoir été bourré de médicaments et contraint à des aveux forcés.
Il avait finalement été gracié et expulsé du pays. Lui aussi a porté plainte contre le général Ahmed Naser Al-Raisi.
La potentielle élection du général émirati à Interpol suscite donc l’indignation, particulièrement en France où l’institution à son siège.
"C'est absurde. C'est un très mauvais coup porté aux institutions internationales […] C'est un peu comme si on élisait comme président de l’OMS le patron d'un grand laboratoire privé, connu pour avoir commercialisé des produits toxiques et mortifères", explique à Franceinfo William Bourdon, avocat d’Ahmed Mansoor.

Macron fait la sourde oreille

À Paris, la fronde est notamment menée par le député Hubert Julien-Laferrière (Génération écologie), qui a rallié une trentaine de parlementaires à sa cause, pour dénoncer la candidature du général émirati.
Des courriers ont été envoyés au Président de la République et au ministre de l’Intérieur, qui sont pour l’heure restés sans réponse. Un mutisme qui pourrait s’expliquer par la prévalence des intérêts économiques.
"Les Émirats arabes unis sont un gros client en termes de ventes d’armes. Peut-être y a-t-il une difficulté pour notre pays à s’opposer à une telle candidature", confie ainsi à TV5 Monde Hubert Julien-Laferrière.
Gros importateur d’armes, le pays du Golfe entretient en effet un partenariat privilégié avec Paris. Depuis 2012, Jean-Yves Le Drian s’est ainsi rendu plus d’une vingtaine de fois à Abou Dhabi.
La base aérienne d'Al-Dhafra, la plus grande du pays, abrite également de nombreux appareils français. Elle avait d’ailleurs été mise à contribution lors de la récente prise de Kaboul par les talibans*, pour faire transiter les ressortissants français.
Les démêlés du général Al-Raisi ne contribueront en tout cas pas à redorer l’image d’Interpol, ternie par plusieurs scandales ces dernières années. Son ancien président chinois, Meng Hongwei, avait notamment été condamné à 13 ans de prison pour corruption, début 2020.
Le nom du nouveau président sera connu fin novembre.
*Organisation sous sanctions de l'Onu pour activités terroristes
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