Pronom "iel" dans le dictionnaire: Jean-Michel Blanquer scandalisé
16:42 17.11.2021 (Mis à jour: 17:49 10.01.2022)
© AFP 2024 LUDOVIC MARINJean-Michel Blanquer
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L’entrée du pronom inclusif "iel" dans Le Robert a suscité un tollé dans la classe politique. Le ministre de l’Éducation s’est associé aux critiques. L’exécutif n’a jamais tranché clairement la question de l’écriture inclusive.
Alors qu’outre-Atlantique l’idéologie woke semble toucher ses limites, en France les adeptes du mouvement célèbrent une petite victoire avec l’entrée dans le dictionnaire du pronom "iel". Contraction de "il" et "elle", le mot est en effet apparu dans l’édition numérique du Robert, pour désigner "une personne quel que soit son genre".
📚 FLASH - Le pronom neutre "iel" a été ajouté dans le dictionnaire Le Robert. pic.twitter.com/zuhWzci5IA
— Mediavenir (@Mediavenir) November 13, 2021
Une initiative qui a entraîné une levée de boucliers dans la classe politique. Le député François Jolivet (LREM) a ainsi pris la plume pour solliciter directement le point de vue de l’Académie française, garante du bon usage de la langue. Dénonçant les ravages de la pensée woke "destructrice des valeurs", l’élu a demandé à la vénérable institution de se prononcer sur la question.
Il a reçu un renfort de poids dans sa démarche, en la personne de Jean-Michel Blanquer. Le ministre de l’Éducation nationale a en effet déclaré que l’écriture inclusive n’était pas "l’avenir de la langue française" sur Twitter. Il a ajouté craindre son impact sur les élèves, qui devraient plutôt tenter d’assimiler les "savoirs fondamentaux".
Je soutiens évidemment la protestation de @FJolivet36 vis-à-vis du #PetitRobert
— Jean-Michel Blanquer (@jmblanquer) November 16, 2021
L’écriture inclusive n’est pas l’avenir de la langue française.
Alors même que nos élèves sont justement en train de consolider leurs savoirs fondamentaux, ils ne sauraient avoir cela pour référence: https://t.co/09thJzQ7iN
Le Robert se justifie pour sa part en affirmant que le pronom est déjà souvent employé. Le dictionnaire, qui n’en est pas à son coup d’essai, assume sa stratégie "inclusive".
"On a constaté que ce mot prenait de l'ampleur et nous l'avons intégré […] Tous nos dictionnaires sont inclusifs depuis plusieurs années", explique ainsi au Figaro Marie-Hélène Drivaud, lexicographe au Robert.
Dans une perspective féministe, l’ouvrage avait déjà remplacé le mot "homme" par "humain" dans ses exemples, précise la responsable.
Blanquer fulminant, l’exécutif hésitant
Ce n’est pas la première fois que le ministre de l’Éducation nationale fait part de son hostilité vis-à-vis de l’écriture inclusive. En mai dernier, il avait rappelé dans une circulaire que celle-ci n’avait pas sa place à l’école, car elle entravait l’apprentissage des élèves en créant des "écueils artificiels".
Au-delà des salles de classe, Jean-Michel Blanquer ne semble pas lui-même un grand admirateur de ce type de syntaxe qu’il trouve "très laide", comme il l’avait confié sur France 3 en 2017. Il réprouve en particulier l’utilisation du point médian, censé faire apparaître simultanément le féminin et le masculin au sein d’un même mot.
Écriture inclusive: "Ce n’est pas au nom du féminisme qu’on doit attaquer la langue française", selon Blanquer pic.twitter.com/jZGkIWJ4YM
— BFMTV (@BFMTV) November 22, 2017
Mais son aversion ne semble pas être partagée par tous au sein du gouvernement. En 2017, Marlène Schiappa et Muriel Pénicaud, alors ministre du Travail, avaient ainsi promu un guide à destination des entreprises, qui encourageait explicitement l’usage du point médian, conseillant par exemple d’écrire "les client·e·s" ou les "les professionnel·le·s".
À l’époque, l’initiative avait d’ailleurs été très mal accueillie par l’Élysée. Quelques semaines plus tard, le Premier ministre Édouard Philippe avait recadré le débat, via une circulaire déconseillant l'écriture inclusive dans les textes officiels.
Depuis, certains semblent avoir tempéré leur position. Débordée par des enseignants refusant d’enseigner que le "masculin l’emporte sur le féminin", Marlène Schiappa avait ainsi haussé le ton, quelques mois plus tard. L’ex-secrétaire d'État à l’égalité entre les femmes et les hommes avait déploré que les professeurs changent d’eux-mêmes les règles de grammaire.