Droit de vote à 16 ans? "Ils n’ont pas le vécu ou le recul pour se prononcer en politique"

© REUTERS / SARAH MEYSSONNIERSecond tour des régionales, 27 juin 2021
Second tour des régionales, 27 juin 2021 - Sputnik Afrique, 1920, 27.10.2021
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Véritable marronnier politique à l’approche de chaque élection, le droit de vote à 16 ans refait parler de lui. Si des personnalités de gauche comme Anne Hidalgo plaident en sa faveur, cette mesure est loin de faire l’unanimité chez les Français.

"On ne peut pas continuer à prendre des décisions aujourd’hui, mais qui impactent notre futur […] Les jeunes de 16 ans doivent pouvoir se prononcer. C’est leur avenir."

Anne Hidalgo, candidate à la présidentielle de 2022, a réitéré sur Franceinfo sa volonté d’abaisser la majorité électorale à 16 ans si elle est élue. Une proposition sur laquelle Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon s’étaient déjà prononcés favorablement.
Si le sujet revient régulièrement au cœur de l’actualité politique depuis 1974, date à laquelle Valéry Giscard d’Estaing a abaissé la majorité à 18 ans, qu’en pense la population? À cette question, les Parisiens rencontrés par Sputnik ne sont pas unanimes:
"Ce serait très bien de voter à 16 ans, sachant que maintenant ils sont assez matures pour cela", se réjouit un riverain. "Si on veut que les jeunes gens s’intéressent plus à la politique, c’est certainement bien de les inviter à participer vraiment", abonde dans son sens une Parisienne. Des propos qui font écho à ceux d’Anne Hidalgo. Selon l’édile de Paris en effet, cela pourrait "redonner une envie de démocratie".
Seul hic: l’abstention. Aux élections régionales de 2021, ils étaient 87% âgés de 18-24 ans à s’abstenir! Chez les 25-34 ans, ce chiffre est également trop élevé, à savoir 83%.

Un coup de fouet démocratique?

Alors pour "revitaliser la démocratie, émanciper et responsabiliser la jeunesse", le député François Jolivet (LREM) a récemment déposé une proposition de loi "actant la confiance en la jeunesse". Ce texte prévoit notamment de fixer la majorité pénale à 16 ans, la possibilité de passer le permis de conduire au même âge, mais également de permettre de voter à 16 ans.
Cette mesure ne fait pourtant pas l’unanimité dans les rangs de la majorité. En effet, en octobre 2020, le groupe Écologie, Démocratie, Solidarité avait déposé un projet de loi en ce sens. Jean Castex l’avait balayé d’un revers de main. Le Premier ministre avait ainsi déclaré que "le gouvernement ne pensait pas à ce stade que la majorité électorale soit la réponse la plus adaptée". Ce dernier préférant inciter les 18-25 ans à se rendre aux urnes.

"Les jeunes à partir de 18 ans utilisent-ils suffisamment leur droit de vote? La réponse est non", avait-il expliqué.

Or abaisser la majorité électorale ne devrait pas résoudre le problème de l’abstention, "qui est un problème structurel de désaffection par rapport au système politique officiel", expliquait récemment à Sputnik le politologue Yves Sintomer.
Gérard Filoche, fondateur du mouvement Gauche démocratique et sociale (GDS), estime également au micro de Sputnik qu’il n’est pas certain que le vote à 16 ans puisse avoir "un quelconque effet politique".

La maturité des votants en question

Selon le membre de GDS, il faudrait plutôt rendre l’école obligatoire jusqu’à 18 ans, au lieu de 16 actuellement, afin de mettre à profit ces deux années supplémentaires. Notamment avec des cours de civisme, ce qui permettrait de donner du sens au vote, et que cet acte démocratique soit fait en conscience.

"À 16 ans, on peut voter, mais c’est une question de maturité. Il faudrait prolonger l’éducation avant le vote", résume Gérard Filoche.

C’est ce qu’indique en creux un jeune homme au micro de Sputnik: "Si on leur donne le droit de vote, il est important de sécuriser leur apprentissage en termes de notion politique et campagne électorale". D’autres Français croisés dans les rues de Paris soulignent aussi une possible immaturité de ces jeunes: "Je me rappelle comment j’étais à 16 ans, on n’est pas trop renseigné sur la politique, on est plutôt amené à suivre les tendances de nos parents ou même la mode de voter pour une telle ou telle personne", prévient un Francilien.
D’autant plus "que l’on n’a pas vraiment le vécu ou le recul pour pouvoir se prononcer en politique. On peut commencer à affiner ses idées, mais voter à cet âge-là c’est prématuré", estime un autre passant.

"J’ai mes sœurs, elles ne s’intéressent absolument pas à la politique, donc je ne pense pas que leur vote serait réfléchi", ironise une trentenaire.

En outre, une mère de famille avance également que ces jeunes seraient "toujours sur leur smartphone" et "influencés par les réseaux sociaux, ce qui n’est pas très favorable". Elle avance qu’ils "n’auraient pas le sens des réalités". "J’estime que l’on doit avoir une conscience politique assez développée pour voter, à 16 ans on est encore un peu dans l’expectative donc 18 ans c’est bien", fait valoir quant à lui un quadragénaire.
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