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Terrorisme au Burkina Faso: "l’État est en train de perdre la région de l’Est"
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Au Burkina Faso, la lutte antiterroriste patine malgré les efforts du gouvernement. Dans la région de l’Est, frontalière du Bénin et du Togo, les groupes armés... 22.10.2021, Sputnik Afrique
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Attaques armées qui se multiplient, déplacement massif des populations, établissements financiers qui ferment les uns à la suite des autres, arrêt du trafic routier dans certaines zones... Ce sont là autant de faits qui, selon lui, "attestent clairement" du tableau dramatique qu’il vient de dresser de la situation.Il en veut également pour preuve la récente sortie sur Facebook de Paripouguini Lompo, président du conseil régional qui, dans une publication, a laissé entendre que l’État avait déjà perdu plusieurs localités et que si rien n’était fait, c’est toute la région qui risquait de l’être.Contacté par Sputnik, ce dernier n’a pas souhaité commenter ses propos. Qu'importe, pour Daouda Diallo, "voir le premier responsable politique de la région de l’Est s’indigner et étaler ainsi son mécontentement sur les réseaux sociaux illustre bien la délicatesse de la situation".Une situation délicateRien ne va plus dans la région de l’Est. Dans cette partie du Burkina Faso qui couvre 17% du territoire national (274.200 km²) et qui fait frontière avec le Togo et le Bénin (deux pays côtiers visés par les djihadistes), les offensives armées, enlèvements et intimidations se succèdent ces derniers mois à un rythme effréné. Et le couvre-feu en vigueur depuis mars 2019 n’a que trop peu prouvé son efficacité stratégique.Un temps acculés par les forces de défense et de sécurité (FDS), les groupes terroristes ont su faire évoluer leurs stratégies en opérant de façon plus coordonnée, se sont réarmés et ont surtout accru leur mobilité et leur force de frappe. Ils contrôlent désormais des portions de la route nationale qui relie la capitale Ouagadougou à certaines localités de la région. D'autres, et c’est notamment le cas des communes de Kantchari et de Diapaga, vivent au rythme de leurs menaces et exactions constantes.À Kantchari, alors qu’elles venaient à peine d’ouvrir leurs portes à l’occasion de la rentrée scolaire du 1er octobre, les écoles ont dû fermer sous la menace.Pendant ce temps à Diapaga, l’insécurité a eu raison de tous les établissements financiers.La Caisse populaire était jusque-là le dernier établissement encore ouvert à Diapaga.Les attaques affectent considérablement l’économie et le tissu social dans la région de l’Est. Daouda Diallo estime toutefois qu’"il n’est pas encore trop tard pour rattraper le tir", tout en précisant que "cela ne sera possible qu’au prix d’une volonté politique forte".Une communauté au cœur de la tourmentePlusieurs groupes liés pour certains à Al-Qaïda* évoluent au Burkina Faso, le plus important étant sans doute le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM). Mais faute de revendications, les auteurs de ces attaques récurrentes sont baptisés HANI (hommes armés non identifiés). Le sort de la communauté peule –accusée de collaborer avec les HANI en leur fournissant notamment un soutien logistique et humain– demeure incontournable dans la problématique de la lutte contre le terrorisme au Burkina Faso, et plus particulièrement dans la région de l’Est.La stigmatisation de cette communauté est une réalité communément admise au Sahel. Et le fait que certains Peuls aient rejoint les rangs de factions djihadistes ou même en soient les fondateurs, comme c’est le cas d’Ibrahim Malam Dicko avec Ansarul Islam, a favorisé l'amalgame entre djihadistes et Peuls, et encourage notamment des groupes d’autodéfense comme les Koglweogo, de la communauté mossi majoritaire dans le pays, à mener des actions punitives.Ce fut le cas début janvier 2019 quand, en représailles à l'assassinat -imputé à des terroristes- du chef du village de Yirgou, situé dans la province du Sanmatenga (région du Centre-nord, frontalière de celle de l’Est), les Koglweogo s’en sont pris à des Peuls de la localité, ainsi à ceux des villages environnants. Le bilan de ces violences –les premières du genre depuis le début des attaques djihadistes au Burkina Faso en 2015– a été estimé à 49 morts, selon les autorités, mais à plus de 200 d’après le CISC.Et plus récemment, en mai 2020, 12 Peuls suspectés de terrorisme et détenus au poste de gendarmerie de Tanwalbougou, une commune de la région de l’Est, avaient trouvé la mort dans leur cellule, dans des circonstances encore obscures plus d’un an après les faits.Pour Daouda Diallo, "c'est la réponse étatique au problème du terrorisme qui a contribué à exposer la communauté peule à tel point que les populations ont le sentiment que les FDS s’en prennent volontiers aux villages peuls ou aux individus ayant un faciès peul" .Et pourtant, déplore-t-il, "le terrorisme n’a pas de visage ou d’ethnie".*Organisation terroriste interdite en Russie
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Terrorisme au Burkina Faso: "l’État est en train de perdre la région de l’Est"
19:50 22.10.2021 (Mis à jour: 17:42 10.01.2022) Au Burkina Faso, la lutte antiterroriste patine malgré les efforts du gouvernement. Dans la région de l’Est, frontalière du Bénin et du Togo, les groupes armés continuent de gagner toujours plus de terrain. Une situation qui inquiète responsables politiques et acteurs de la société civile.
"La violence monte en puissance. L’État est en train de perdre le contrôle sur cette région stratégique, il n’a plus l’initiative. C'est le sentiment qu'on a tous", confie à Sputnik Daouda Diallo, secrétaire général du Collectif contre l'impunité et la stigmatisation des communautés (CISC, qui regroupe une trentaine d’associations burkinabè œuvrant pour la plupart pour les droits humains).
Attaques armées qui se multiplient, déplacement massif des populations, établissements financiers qui ferment les uns à la suite des autres, arrêt du trafic routier dans certaines zones... Ce sont là autant de faits qui, selon lui, "attestent clairement" du tableau dramatique qu’il vient de dresser de la situation.
Il en veut également pour preuve la récente sortie sur Facebook de Paripouguini Lompo, président du conseil régional qui, dans une publication, a laissé entendre que l’État avait déjà perdu plusieurs localités et que si rien n’était fait, c’est toute la région qui risquait de l’être.
Contacté par Sputnik, ce dernier n’a pas souhaité commenter ses propos. Qu'importe, pour Daouda Diallo, "voir le premier responsable politique de la région de l’Est s’indigner et étaler ainsi son mécontentement sur les réseaux sociaux illustre bien la délicatesse de la situation".
Rien ne va plus dans la région de l’Est. Dans cette partie du Burkina Faso qui couvre 17% du territoire national (274.200 km²) et qui fait frontière avec le Togo et le Bénin (deux pays côtiers visés par les djihadistes), les
offensives armées, enlèvements et intimidations se succèdent ces derniers mois à un rythme effréné. Et le
couvre-feu en vigueur depuis mars 2019 n’a que trop peu prouvé son efficacité stratégique.
Un temps
acculés par les forces de défense et de sécurité (FDS), les groupes terroristes ont su faire évoluer leurs stratégies en opérant de façon plus coordonnée, se sont réarmés et ont surtout accru leur mobilité et leur force de frappe. Ils contrôlent désormais des portions de la route nationale qui relie la capitale Ouagadougou à certaines localités de la région. D'autres, et c’est notamment le cas des communes de Kantchari et de Diapaga, vivent au rythme de leurs menaces et exactions constantes.
À Kantchari, alors qu’elles venaient à peine d’ouvrir leurs portes à l’occasion de la rentrée scolaire du 1er octobre, les écoles ont dû fermer sous la menace.
Pendant ce temps à Diapaga, l’insécurité a eu raison de tous les établissements financiers.
La Caisse populaire était jusque-là le dernier établissement encore ouvert à Diapaga.
"La situation est très préoccupante. Il faut dire que d’une façon ou d’une autre, les communes et départements sont en train de tomber [sous le contrôle des groupes armés, ndlr] les uns à la suite des autres, ce qui occasionne un déplacement massif des populations vers la ville de Fada N'Gourma [la capitale régionale]", s’inquiète le secrétaire général du CISC.
Les attaques affectent considérablement l’économie et le tissu social dans la région de l’Est. Daouda Diallo estime toutefois qu’"il n’est pas encore trop tard pour rattraper le tir", tout en précisant que "cela ne sera possible qu’au prix d’une volonté politique forte".
Une communauté au cœur de la tourmente
Plusieurs groupes liés pour certains à Al-Qaïda* évoluent au Burkina Faso, le plus important étant sans doute le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM). Mais faute de revendications, les auteurs de ces attaques récurrentes sont baptisés HANI (hommes armés non identifiés). Le sort de la communauté peule –accusée de collaborer avec les HANI en leur fournissant notamment un soutien logistique et humain– demeure incontournable dans la problématique de la lutte contre le terrorisme au Burkina Faso, et plus particulièrement dans la région de l’Est.
La
stigmatisation de cette communauté est une réalité
communément admise au Sahel. Et le fait que certains Peuls aient rejoint les rangs de factions djihadistes ou même en soient les fondateurs, comme c’est le cas d’Ibrahim Malam Dicko avec Ansarul Islam, a favorisé l'amalgame entre djihadistes et Peuls, et encourage notamment des groupes d’autodéfense comme les Koglweogo, de la communauté mossi majoritaire dans le pays, à mener des actions punitives.
Ce fut le cas début janvier 2019 quand, en représailles à l'assassinat -imputé à des terroristes- du chef du village de Yirgou, situé dans la province du Sanmatenga (région du Centre-nord, frontalière de celle de l’Est), les Koglweogo s’en sont pris à des Peuls de la localité, ainsi à ceux des villages environnants. Le bilan de ces violences –les premières du genre depuis le début des attaques djihadistes au Burkina Faso en 2015– a été estimé à 49 morts, selon les autorités, mais à plus de 200 d’après le CISC.
Et plus récemment, en mai 2020, 12 Peuls suspectés de terrorisme et détenus au poste de gendarmerie de Tanwalbougou, une commune de la région de l’Est, avaient trouvé la mort dans leur cellule, dans des circonstances encore obscures plus d’un an après les faits.
Pour Daouda Diallo, "c'est la réponse étatique au problème du terrorisme qui a contribué à exposer la communauté peule à tel point que les populations ont le sentiment que les FDS s’en prennent volontiers aux villages peuls ou aux individus ayant un faciès peul" .Et pourtant, déplore-t-il, "le terrorisme n’a pas de visage ou d’ethnie".
"On aurait pu penser que les autorités tireraient des leçons des drames ayant affecté la communauté peule dans la région de l’Est et changeraient leur stratégie, mais non. Car on constate du côté de la frontière avec la Côte d’Ivoire que cette communauté est également ciblée. Si les opérations militaires continuent d’être menées de la sorte, cela risque de pousser une partie des Burkinabè à rejoindre l’ennemi, toute chose qui ne pourrait que compliquer la tâche des forces de défense et de sécurité et dégrader davantage la situation sécuritaire", prévient Daouda Diallo.
*Organisation terroriste interdite en Russie