«Au Canada, la Covid-19 nous a fait réaliser à quel point les systèmes de santé étaient fragiles et les vagues de chaleur pourraient encore plus les fragiliser», laisse tomber en entrevue Fateh Chebana, professeur à l’Institut national de la recherche scientifique du Québec.
Sur la base de ce constat, divers paliers de gouvernement sont en train d’élaborer des programmes de prévention des chaleurs extrêmes. Principal concepteur d’un système d’alerte pour le Québec, Fateh Chebana avertit d’emblée que le Canada connaîtra «de plus en plus de vagues de chaleur inhabituelles»:
«Dans les faits, nous avons actualisé un système qui existait déjà depuis 2010. La nouveauté tient au fait que les seuils de température établis sont évolutifs. Nous ne mettons pas seulement l’accent sur les températures élevées, mais sur les variations, car elles peuvent perturber l’équilibre corporel. […]. La pandémie a montré que seule une dizaine de personnes de plus dans un service d’urgence pouvait saturer ses capacités. Il y a rapidement trop de pression sur le système hospitalier», constate le chercheur.
Fin juin, début juillet, le pays de l’érable a traversé une canicule historique. La température la plus élevée enregistrée a été de 49,6 °C dans le village de Lytton, en Colombie-Britannique. Un record absolu dans un pays plus connu pour ses froids polaires que ses canicules.
Vagues de chaleur de plus en plus fréquentes
Dans cette province de la côte du Pacifique, la chaleur aurait directement ou indirectement causé la mort de plus de 800 personnes. Réagissant à cet épisode inédit, le conseil municipal de Vancouver vient d’adopter une motion exigeant l’élaboration d’un plan d’action pour faire face aux prochaines vagues, toutes amplifiées par le réchauffement climatique, selon la plupart des experts. Combinées à la sécheresse, les températures élevées sont aussi responsables de feux de forêt dont l’ampleur étonne, brasiers concentrés dans l’ouest et en Ontario.
«Pour l’instant, notre système fonctionne seulement pour la grande région de Montréal, mais le but sera de l’étendre à tout le Québec. […] Les autorités vont préparer le système pour l’utiliser sur le terrain et nous pourrons ensuite l’ajuster», précise le professeur de l’Institut national de la recherche scientifique du Québec.
Le 14 juillet dernier, le gouvernement de la Colombie-Britannique avait déjà annoncé que plusieurs mesures seraient prises pour réduire la pression sur le personnel ambulancier, surchargé à la fois par les surdoses d’opioïdes, la pandémie et les chaleurs intenses.
Des ressources insuffisantes
Dans les provinces de l’ouest en particulier, les médias pointent du doigt le manque de ressources, comme les climatiseurs et l’accès à des fontaines rafraîchissantes. En Colombie-Britannique, seulement un tiers de la population est dotée d’un système minimal de climatisation, selon une enquête menée en 2020 par BC Hydro, la société d’État chargée de produire et de distribuer l’électricité dans la province. Pour Fateh Chebana, ce sont autant d’éléments illustrant la nécessité, pour le Québec et les autres provinces, de se doter de tels systèmes:
«Dans un avenir rapproché, nous aimerions nous adresser directement aux personnes dotées d’un profil à risque. Pour ce faire, nous devons développer des modèles qui cibleront encore plus précisément les personnes vulnérables», conclut-il.