Alors qu’à l’Assemblée nationale, les débats sur l’extension du pass sanitaire ont donné lieu à plusieurs passes d’armes, le Sénat, où le texte est désormais examiné, s’est lui aussi illustré par quelques morceaux de bravoure.
L’intervention de Claude Malhuret, du groupe Les Indépendants-République et territoires, a en particulier été remarquée. Le sénateur de l’Allier s’est en effet lancé dans une longue tirade ironique contre les opposants au pass sanitaire, visant spécialement son collègue Stéphane Ravier (RN).
«En écoutant notre collègue Ravier, j’ai soudain compris que nous vivions sous le joug d’une dictature et que sans une poignée d’héroïques résistants, nous ne nous en serions pas aperçus […] Après que, pendant des années, onze vaccins nous aient été injectés à l’insu de notre plein gré, au douzième… bingo!... Nos yeux se sont dessillés grâce à ces combattants de la liberté, qui ont eu le courage de nommer l’infamie du pass sanitaire», a-t-il ainsi déclaré.
L’élu a encore moqué les «résistants numériques» voulant lutter contre le virus à la manière des «Polonais de 1940 contre les chars soviétiques», c’est-à-dire à «mains nues», ou bien à l’aide de la controversée chloroquine et même d’un «médicament redécouvert: le Ricard».
Claude Malhuret s’est spécialement élevé contre les réseaux sociaux et contre plusieurs personnalités y ayant leurs habitudes, parmi lesquelles Francis Lalanne, Florian Philippot ou François Asselineau, tous opposés à l’extension du pass sanitaire.
«Heureusement, comme Zorro, Facebook et Twitter sont arrivés, permettant à une avant-garde éclairée de se regrouper contre le totalitarisme vaccinal […] En définitive, la meilleure preuve des progrès de l’humanité c’est qu’en 2.500 ans, nous sommes passés de Socrate sur l’Agora, à Francis Lalanne sur Facebook», a ainsi lâché le sénateur devant ses pairs.
Diverses réactions
La tirade du sénateur n’a pas manqué de faire réagir. Certains ont salué l’éloquence de l’élu, comme le journaliste Bertrand Hadet de BFM TV, qui a plaisanté sur une possible anthologie des meilleurs discours du sénateur.
Il faudrait éditer un recueil des meilleurs discours de @ClaudeMalhuret. pic.twitter.com/wlzd78SFjl
— Bertrand Hadet (@bertrandhadet) July 23, 2021
D’autres se sont montrés plus critiques, saluant la forme mais dénonçant le fond, comme l’ancien sénateur de Paris Yves Pozzo di Borgo.
Le plaisir des mots au service militant d'une décision liberticide !
— Yves Pozzo di Borgo (@YvesPDB) July 23, 2021
D’autres encore ont mis en exergue les approximations historiques d’une tirade riche en références culturelles. L’invasion soviétique de la Pologne n’a pas eu lieu en 1940 mais en 1939, a notamment souligné le compte EELV du 5e arrondissement parisien. En outre, l’image des soldats polonais combattants «à mains nues» les chars est plutôt associée à l’invasion allemande du pays, à la même époque. Loin d’être une réalité historique admise, ce mythe a surtout servi à la propagande nazie pour dénigrer l’incompétence de l’armée polonaise, rapportait d’ailleurs un article du Guardian, il y a quelques années.
Malhuret confond Allemands et Soviétiques, se trompe d'un an, et reprend un vieux tropisme polonophobe. Mais que vaut l'histoire face au plaisir d'un effet rhétorique? https://t.co/QluV7l214V
— EELVParis5 🌻 (@EELVParis5) July 24, 2021
Claude Malhuret est un habitué ce type de sorties fracassantes au Sénat. En mai 2020, il s’en était notamment pris à Jean-Luc Mélenchon, sceptique sur la stratégie de déconfinement de l’exécutif. Le sénateur avait alors raillé le «professeur Mélenchon, de la faculté de médecine de La Havane», à la tribune.
En avril 2019, l’élu de l’Allier avait également tourné en ridicule les dernières mobilisations des Gilets jaunes, alors que le mouvement s’essoufflait. Il avait traité les manifestants de «canards décapités, s'enivrant de selfies sur fond de poubelles en feu».